La Chrysopée analyse 1

L’observation des Hommes a noté ce point particulier de leur nature, et qui veut qu’en eux la Paresse soit la mère de tous les Vices. Ce qui s’explique par le fait que le refus de la Chair de participer aux exigences des oeuvres de l’Esprit tend invinciblement à générer en eux-mêmes les éléments contraires susceptibles de mieux servir ce honteux défaut.

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En introduction à sa Chrysopée du Seigneur, ce bon Raymond Lulle, brillant alchimiste et donc pour son époque un hérétique notoire, nous fait une synthèse de ce qu'il appelle à juste titre : la mère de tous les Vices.

La Paresse est d'abord et avant tout, l'absence de volonté. Au temps de Raymond Lulle, le nom de ce Vice majeur est académique et canonique, il renferme la noirceur de sa propre malédiction, celle qui consiste à faire subir à celui qui se vautre dans cette perversion, car s'en est une, les affres et souffrances des lois d'asservissement du Destin.

De nos jours, où ou pour des raisons d'efficacité marketing, et de saine pratique de slogans publicitaires, médiatiques et politiques, la Paresse a une connotation par trop sulfureuse et négative pour être employée pour vendre ses services diaboliques aux individus qui se soumettent à ses lois, alors, comme l'imagination des manipulateurs de consciences faibles ne connaît pas de limite, la Paresse est travestie avec des oripeaux sensés lui redonner une apparence vertueuse, qu'elle s'efforce de singer grossièrement en toute imposture. La Paresse s'appelle donc aujourd'hui : Vaine prise de tête, confort, facilité, absence d'effort et de contrainte, tranquillité, zen attitude et autres appellations qui sont autant de masques, derrière lesquels se dissimulent les petits et grands démons de la Paresse.

Ces slogans, rabâchés dès le plus jeune âge aux enfants par le truchement de la télévision, et d'adultes eux-mêmes contaminés, deviennent à l'adolescence leur base culturelle et amorale, au point que lorsqu'il leur est demandé de faire un petit effort de réflexion, exercice éminemment salutaire sans lequel il n'y a pas de faculté volitive, ils considèrent cette demande d'effort presque comme une incongruité et une ringardise d'un autre âge.

La civilisation, pour les nouvelles générations, est à l'image des spots publicitaires qui sont devenus leurs repères culturels. Facile, simple, pas de prise de tête tel est l'arcane majeur de leur pseudo modernité.

Hélas pour eux, bernés qu'ils sont par les puissances manipulatrices qui les exploitent et les asservissent, ils découvriront probablement trop tard, que cette véritable addiction à la Paresse, passés les délices illusoires que procure toute toxicomanie, a pour redoutable conséquence d'atrophier durablement leurs facultés supérieures subtiles, celles qui justement leur permettent de s'affranchir des redoutables mâchoires du Destin et d'accéder à leur libre arbitre.

Pour retrouver l'usage de cette noble faculté qu'est le libre arbitre, il faut commencer par vaincre ce redoutable démon qu'est la Paresse. Pour y parvenir, difficile travail d'Hercule, il faut impérativement se mettre à la pratique des Vertus, et c'est en cela que réside l'essence de l'alchimie spirituelle, qui permet de transformer le plomb de la Paresse, en Or de la réflexion lumineuse. Mais avant il va falloir nettoyer les écuries d'Augias...

La Chrysopée du Seigneur de Raymond Lulle, est un concentré subtil du savoir-faire que doit parvenir à maîtriser l'oeuvrant sincère à l'exercice de ce noble Art.

Quatre Vertus Cardinales, qui devront être parfaitement maîtrisées et équilibrées entre elles afin de pouvoir passer aux trois Vertus Théologales ; chacune ayant des rapports multiples avec toutes les autres, et possédant aussi leurs revers, qui, s'il n'est pas pris garde, transforment rapidement ces Vertus en Vices.

Simple comme un jeu d'enfant, mais aussi redoutable que les douze travaux d'Hercule.

Pour parvenir à la maîtrise de cette alchimie, une lecture hermétique de cette Chrysopée est indispensable, l'analogie en est la clé, la méditation profonde l'élément indispensable à sa compréhension, et une pratique exigeante et régulière seront les indispensables conditions pour parvenir à la moindre transmutation de l'épais en subtil.

Enfin, pour ceux qui en seraient encore à se demander pourquoi la Connaissance passe obligatoirement par la pratique des Vertus, qu'ils sachent que les Vertus sont à la Divine Providence ce que les Vices sont au cruel Destin.

Que ceux qui ont des oreilles pour entendre, entendent...

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