Cantique de Salomon 2

Exégèse du Cantique des cantiques de Salomon dans son aspect ésotérique et alchimique, par Jean Vauquelin des Yveteaux alchimiste normand (1651-1716)

Le Mystère occulte du Cantique des cantiques.

Par Jean Vauquelin des Yveteaux alchimiste normand (1651-1716)

1.3 l’arôme de tes parfums est exquis ; ton nom est une huile qui s’épanche, c’est pourquoi les jeunes filles t’aiment.

L’effusion de ce beaume est penetrante et la disposition que l’epouse (quoyque souilée et défigurée en apparence) a d’en estre embaumée, est un autre parfum qu’elle possede, et qui luy a esté donné par la toutte puissance du pere, de qui elle tient, et qui l’a fait naistre en elle. C’est ce qu’elle repend comme fist la Madelene aus pieds de l’epoux ou sur sa teste, et ce qui la fait courir apres celuy de l’epoux, dont elle est elle mesme en cela l’aiman, et l’objet de sa tendresse.

La descente de l'âme-de-vie dans l'incarnation terrestre (l'épais, l'oubli, l'ignorance) a pour première conséquence de plonger la faculté volitive (l'épouse) dans un espace d'insignifiance qui la sépare de la Conscience (l'époux dans sa forme glorieuse) pour cause de distorsions vibratoires. La perte de la subtile vision Juste entraînant inéluctablement une déformation de celle-ci et de tout ce que perçoit cette vision. C'est la différence qu'il y a entre la vision binoculaire organique et la faculté supérieure qu'est la clairvoyance. La belle face de l'ange qu'entrevoit la clairvoyance se transformant en horrible gargouille par la vision organique, ce qu'exprime notre alchimiste normand par : quoyque souilées et défiguré en apparence... Car cette déformation n'est pas la réalité, mais une illusion comme il y en a tant dans cet espace d'insignifiance.

La séparation du subtil de l'épais que doit accomplir la faculté volitive (l'épouse) est, dans ce verset du Cantique des cantiques de Salomon, assimilée à l'arôme des parfums. Quoi de plus subtil et de plus indicible que l'arôme d'un parfum qui tout en étant aérien, invisible, infiniment léger, peut parfaitement être fort, puissant envoûtant. Ce parfum peut avoir comme l'encens, des arômes si délicats et si spirituels qu'ils élèvent presque naturellement la faculté volitive sur des octaves très supérieures. Ils peuvent aussi avoir les lourdeurs des basses tonalités vibratoires et être alors des odeurs fétides et pestilentielles comme il en émane du monde de la décomposition et de la mort de la sphère organique.

Mais si, comme nous avons précédemment pu le voir lors du dernier article sur le livre de la Voie et de la Vertu de Lao Tseu, la Beauté est nécessairement l'attribut du Divin, l'arôme des parfums exquis est sans conteste de l'ordre de la Beauté et du Bien. Et lorsque le monde discerne la Beauté, par là le laid se révèle dit le Tao Tö King.

Remarquons au passage l'extrême maîtrise du langage analogique pour ce texte profondément hermétique.

Ton nom est une huile qui s'épanche... Difficile de comprendre l'importance de ce trope sans connaître l'extrême importance du NOM, qui est ici un NOM de pouvoir, comme je l'explique longuement dans la Véritable Histoire d'Adam et Eve enfin dévoilée (en téléchargement gratuit dans le Temple d'Hermès Trismégiste); la première chose qu'IHÔAH demande à l'Adam dans sa forme glorieuse de faire, c'est de nommer... Car par le NOM de pouvoir il manifeste à la vie ce qu'il nomme... C'est toujours la première chose que font les parents lors de la naissance d'un enfant, en vertu du principe qui veut que ce qui est en bas soit comme ce qui est en haut.

Ce NOM de pouvoir est donc un NOM sacré aux propriétés supranormales; connaître et maîtrise ce NOM relève de la Haute Magie, celle qui ouvre des vortex dans l'Éternel Moment Présent, état dans lequel les puissances supérieures interagissent entre elles pour donner vie au verbe Juste, celui qui est capable de connaître les NOMS. Nous retrouvons ce principe dans le fameux livre pour sortir au jour des anciens Égyptiens, dont les textes sacrés indiquent la nécessité pour l'Osiris N. de pouvoir connaître et nommer les puissances divines afin d’être comme elles par identification et confondement, et d’en posséder les pouvoirs.

Elle demande d’estre entraisnée, et l’est effectivement, car le corps sans l’esprit ne peut estre élevé, et saint Paul ne disoit il pas : « qui est ce qui me délivrera de ce corps de mort ? » et David, pseaume 141, s’écrie : « faittes sortir mon ame de sa prison ». Il est dit dans saint Jean : « sans moy vous ne pouvéz rien faire », et les philosophes d’un stille plus rampant disent que la poulle a besoin du coq, et que l’esprit crud extrait l’esprit digeste, non seulement dans la dissolution ; mais l’esprit exalte et sublime le corps, le volatil le fixe et l’élève à sa perfection « ut fiat filius philosophorum ».

Ces jeunes filles, ces compagnes de l’epouse, de cette vierge, sont les autres parties moins parfaittes du mesme sujet qui l’accompagnent.

On pouroit l’entendre des mineraus, vegetaus et animaus, lesquels à son exemple courent à l’odeur des parfums de cet epoux universel. Mais cette epouse seulle demande d’estre entrainée, quelque violence qu’elle semble recvoir ; et quoy que cet epoux luy face, soit en l’ambrasant, la brulant et la tourmentant, elle ne veut point qu’il la laisse seulle, elle a besoin de la main de l’époux pour aller jusques à luy, affin qu’il l’éleve à l’estat de pureté.

Nous pouvons icy faire l’application de l’aiman des philosophes et de leur acier, car ils n’entendent autre chose par là que cet epoux et cette epouse.

Jean Vauquelin des Yveteaux nous précise fort justement que l'attirance de l'épouse vers l'époux est un puissant aimant puisqu'il ne s'agit rien de moins que de la force d'Amour (ne pas confondre avec la basse émotion de la sphère organique) qui provient de la dualité du Nombre UN, et qui se trouve symbolisé par ces fameux deux serpents qui s'enroulent autour du bâton d'Hermès. Si, comme l'indique les Tables de la Loi du Sépher de Moïse, Nahash l'ardeur cupide est le puissant attracteur de l'espace d'insignifiance de la sphère du Destin, la sortie de cette sphère se fera par la puissance de la faculté volitive qui active son aimantation pour ce qui lui est le plus cher et le plus précieux, le retour à l'être aimé, l'union de l'époux et de l'épouse, son ipséité de sa forme glorieuse. La force d'Amour est donc bien celle qui est seule capable de compenser les effets d’attraction de l'ardeur cupide.

Comme le démontre admirablement notre illustre alchimiste normand, le Cantique des cantiques contient bien un extraordinaire enseignement hermétique, qui, sous l'aspect d'un conte délicieusement érotique, renferme en réalité des connaissances ésotériques de la plus haute importance. L'Ancien Testament commence par la Genèse et se termine par le Cantique des cantiques, et cet ordre n'est pas le fruit du hasard, mais celui de la Science Hermétique. Tout cela est en plus parfaitement conforme à la manifestation de nos trois puissances que sont La Providence, la Conscience et le Destin. La Conscience qui a seule la propriété d'avoir commerce avec la Providence et avec le Destin, doit donc être capable, grâce à sa faculté volitive, de passer de l'un à l'autre en toute Connaissance, et en ayant la force (sceptre du pouvoir des vertus) de ne pas se laisser asservir par les lois de causalité du Destin, l'ardeur cupide.

La maîtrise du sceptre du pouvoir se fera par l'acquisition des Vertus, c'est vrai pour le Cantique des cantiques, comme cela est vrai pour tous les grands textes mystiques, ésotériques et hermétiques dignes de ces NOMS. Nous aurons l'occasion tout au long de notre cheminement, d'en voir la pratique complexe qui nécessite un haut niveau de connaissance, et les effets réellement supranormaux auxquels l'oeuvrant peut légitimement s'attendre, mais à chaque jour suffit sa peine, car aucun des articles de l’académie d’Hermès Trismégiste ne peut révéler les richesses qu’il renferme par une lecture isolée des autres et de façon frivole et désinvolte.

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