Annexe 5 La scission de la ferme

Annexe 5  La scission de la ferme

Aujourd’hui la ferme est divisée en deux logis, l’un à front de rue avec une entrée par le grand porche situé à sa droite, l’autre dans la cour de ferme, à laquelle on accède par un porche à gauche. Le premier logis était le logis du propriétaire, appelé familièrement le « château », l’autre celui du fermier.

L’origine de cette scission était mal connue. En 1997, Roger Delooz écrivait [1] « Elle forme un long ensemble blanchi du dix-huitième siècle divisé en deux vers 1965 par l’ancien exploitant, M. Pennebrok ».

 

Les archives nous permettent de situer cette scission à 1780.

 

Du temps de la prospérité des fermes, il était rare que le fermier soit le propriétaire de la ferme. La ferme était un capital aux mains de riches propriétaires : les abbayes, la noblesse, des familles de notables. Le fermier en était l’exploitant, utilisant comme main-d’œuvre bon marché les « journaliers ». Il était rare que le propriétaire réside dans sa ferme.

 

La première mention de cohabitation propriétaire fermier que je connaisse date de 1550. Robert de Huy, qui résidait à Folx, loue la ferme [2] à Jehan Huwelet, fils de Costin. Il se réserve toutefois « ung colombier avecqz son appendance et un demy bonnier aupres de Cavez de Folz ». Ce texte n’indique pas une vraie cohabitation, mais il indiquerait que, avant la location, Robert de Huy résidait à la ferme.

 

La seconde date de 1724 [3] : Catherine-Robertine et Anne-Thérèse de Paheau louent à ferme au couple Philippe Pirmez et Catherine Lucas leur cense à Foulx. Elles se réservent un logement : « Que les dlles comparantes se reservent leur quartier ou elles sont a present avec les deux caves et grenier au dessus dudit cartier comme aussy leur petit jardin et le fumier nécessaire pour lengraisser come aussy leur etang. ».

En fait, les demoiselles Paheau habitaient au moins depuis 1709 dans la ferme de Folx-les-Caves. Leur mère Anne de Vos, veuve d’Albert de Paheau, l’avait achetée en 1699 [4] aux héritiers de la Bawette. Dans le recensement des grains [5] de Folx-les-Caves en 1709, on trouve, immédiatement après le curé : « Madame Paheau, Caterinne et Therese paheau, françoise Wilmar sa servante ». Catherine restera à Folx-les-Caves jusqu’à son mariage avec Philippe-Guillaume Malfait qui a eu lieu en l’église de Folx-les-Caves le 25 juin 1731. « Guilielmus malfait parochianus de Perwez et della Catharina de pahau parochiana mea ». Les témoins furent Philippe Pirmez et Catherine Lucas, fermiers des demoiselles Paheau. Anne-Thérèse se maria le 3 juillet 1731 à Thisnes où demeurait son époux le comte Ernest de Glymes. Ce dernier résidait à Thisnes, où il fut baptisé et où son épouse Anne-Thérèse Paheau y enfanta et décéda.

 

Un deuxième propriétaire qui habita la ferme Vlemincx fut Philippe-François Boucqueau qui l’acquit en 1748 de Philippe-Guillaume Malfait, époux de Catherine-Robertine. Sa présence est confirmée par le recensement de 1755 [6] : « Philippe francois Boucqueau fait raport être censier, sa femme, item 2 domesticques, une servante, un garde des porcqs et une garde des vaches, ». Ce petit nombre d’ouvriers agricoles pourrait étonner ; mais en fait à cette époque, le fermier était comme un directeur d’usine faisant travailler la main-d’œuvre des ouvriers embauchés à la journée. Ces ouvriers étaient appelés « journaliers ».

 

En 1764, dans un acte [7] des Greffes scabinaux de Folx-les-Caves, il est mentionné « fermier propriétaire à Foolx ». En 1768, lors de l’enquête à charge de Pierre Colon, le bandit légendaire de Folx-les-Caves, Jean Lambert de Hemptinne, maïeur de Folx requiert les commissaires de se « transporter le plus secretemen qu’il nous sera possible au village de Foolx les Caves et environs et d’interroger le Sr Boucquiau fermier y propriétaire de la cense nommée vulgairement Paheau […]. »

En 1768, il marie, à Folx-les-Caves, sa fille Livine-Thérèse, paroissienne de Folx-les-Caves, avec Louis Joseph Vlemincx, paroissien de Marilles.

En 1772 [8], il loue la ferme et en vend le bétail, meubles, effets et attirail de labour à son beau-fils et sa fille. Il se justifie : « voulant se retirer, et se défaire et abandonner son labour et se reposer des fatigues journaliers et soins que doit avoir un bon laboureur ». Les actes qui suivent le citent comme habitant à Wavre où il décédera le 25 novembre 1787.

En 1780 [9], c.-à-d. avant terme contractuel, Louis-Joseph Vlemincx renonce à son bail. L’accord qu’il fait avec son beau-père lui permet de continuer à cultiver 30 bonniers et d’occuper une partie des bâtiments de la cense de Folx-les-Caves « scavoir les batiments du coté du chemin a rate de la cuisinne de la dite cense et jusqu'à la porte d'entrée de dessous restant au censier sauf la Cave et le four et fournis qui seront communs aura la petite Cour avec la porte d'en haut ». Cette partie des bâtiments réservée à Louis Joseph Vlemincx deviendra le « logis des propriétaires, dit le château ».

Le reste de la ferme est loué le jour même à Philippe JANMART de Ramillies. Ce bail écherra à la Saint-André (30 novembre) 1786.

[1] R. Delooz, A la découverte d’Orp-Jauche et d’Hélécine, p.33.

[2] SAL 8207, f° 18r-18v.

[3] Notaire Jean Chaltin, à Jauche de 1720 à 1725, 7-12-1724, p.238 v°.

[4] Notaire François Jourdain, résidant à Bruxelles de 1695 à 1713, 11-11-1699.

[5] AEBxl, Office fiscal de Brabant n° 336.

[6] Item, n°338.

[7] GSN 439, Folx-les-Caves, 9 octobre 1764.

[8] Notaire Jean Joseph Delloye, à Perwez de 1731 à 1779, 1772, n° 8 et 9.

[9] Notaire Jean François Minet, à Dion le Mont de 1776 à 1796.