Paroisse et curés 3

Les registres paroissiaux

En plus de l’accomplissement des missions évoquées ci-dessus, ils ont une tâche administrative : la tenue des registres paroissiaux.

On a lié l’obligation de tenue par les curés des registres paroissiaux aux obligations des décrets du concile de Trente. C’est partiellement vrai.Ces registres ont une importance primordiale dans la connaissance de nos ancêtres. Avant ces registres, seuls les membres de classes sociales privilégiées laissaient une trace historique, grâce aux chroniques, aux testaments, partages, actes de vente, etc.

Ces registres consignent les baptêmes, les mariages et les décès ou enterrements.

Le concile de Trente prescrit la tenue des registres de mariages [1].

« Le curé aura un Livre, qu’il gardera bien soigneusement, dans lequel, il écrira le jour & le lieu ausquels chaque Mariage aura été fait, avec les noms des parties, & des témoins. »

Il prescrit aussi d’enregistrer les noms des parrain et marraine d’un baptême :

« Le Curé, avant que de se disposer à faire le Baptême, aura soin de s’informer de ceux que cela regardera, quel est celui, ou quels sont ceux qu’ils ont choisi, pour tenir sur les saints Fons-de-Baptéme celui qui lui est présenté, pour ne recevoir précisément qu’eux. Il écrira leurs noms dans son Livre, & les instruira de l’alliance qu’ils ont contractée, afin qu’ils ne se puissent aucunement excuser, sous pretexte d’ignorance.

En 1565, Philippe II [2] envoie des lettres à la gouvernante des Pays-Bas en vue de l’exécution énergique des décrets du concile de Trente. Parmi ses instructions, il ordonne la tenue de registres de baptêmes.

Il y a déjà des registres de baptêmes antérieurs à 1565. Ainsi à Anderlecht, le registre commence en 1551.

En 1565, le registre de baptêmes de Ste-Gudule à Bruxelles fait une allusion directe au concile de Trente. On y lit:

L’an 1565, le 19 août fut publié le concile général de Trente, dans lequel fut ordonné que les noms des baptisés, de leurs parents et parrains soient inscrits. Suivant cet ordre, ils ont été écrits dans le nouveau livre (de baptême) qui suit.

En ce qui concerne l’ancienneté des registres de mariage, en Belgique, le record est peut-être détenu par une transcription [3] d’un registre de Sainte-Gudule à Bruxelles, écrite par Jean Baptiste Houwaert [4]. Le titre [5] en est : « Extract van houwelijksceremonie vuyt het oudste register vande Goedelekercke in Brussel de data beginnende Kersmisse 1384 ».

Les registres de décès sont généralement assez sommaires. Il semble que l’Église n’ait pas donné beaucoup d’instructions à ce sujet. Dans les villes importantes, ces registres sont souvent des registres d’enterrement : on y trouve des détails concernant le cérémonial et les frais.

La tenue et la conservation de ces registres posa beaucoup de problèmes. Certains curés étaient négligents, les guerres, les incendies

[1] Abbé Chanut, op. cit., p. 309.[2] F. Willocx, op. cit., p. 124-125. Je respecte l’orthographe.[3] J. Caluwaerts, Het oudste parochieregister van het land, Brabant Cronikel, 2017, n° 1.[4] Jean Baptiste Houwaert (1626-1688). En tant qu’échevin et secrétaire de la Ville de Bruxelles, il eut accès et recopia inlassablement les anciens registres échevinaux (brûlés en 1695). Il en tira plus de 50 registres de généalogies, tableaux de quartiers et preuves. Ces registres sont conservés à la Bibliothèque royale de Bruxelles.[5] Extrait des cérémonies de mariage du plus ancien registre de l’église de (Ste) Gudule, à Bruxelles, commençant à Noël 1384.

causèrent beaucoup de pertes. Pour y remédier, il y eut beaucoup de réglementations, mais en vain.

En 1611, les archiducs Albert et Isabelle publient à Mariemont, un « Édit perpétuel [1] », considéré comme étant la base de l’uniformisation du droit privé dans les Pays-Bas méridionaux. L’article XX traite des doubles des registres paroissiaux.

« Et comme souventes fois surviennent des difficultés sur la preuve de l’eage, temps de mariage et trespas des personnes, soit pour promotion aux ordres sacrez, provision de benefices, ou estats seculiers, restitution en entier, et autres cas semblables ; avons ordonné et ordonnons aux Eschevins & autres Gens de Loy, tant des Villes que des Villages, que par chascun an ils levent doubles autenticques des registres de Baptesmes, mariages & sepultures que chacun Curé desdits lieux aura tenu de ceux advenus en sa paroisse durant ledit an, que ledit Curé sera tenu leur administrer ; & que d’iceux ils en facent seure garde en leurs archives : vueillans enoutre que les Gens de Loy des Villages facent faire un double deuxiesme desdits registres, & les envoyent au Greffe des Villes, Baillages, Chastellenies, Gouvernances et autres Sièges supérieurs de leur ressort, pour y estre conservez […] ».

Malgré de nombreux rappels, cet arrêté fut très peu suivi. Ce n’est qu’en 1778 [2], que l’impératrice Marie-Thérèse prend un arrêté sévère obligeant de rédiger les registres paroissiaux dans des registres normalisés. En voici des extraits :

1) « Les curés, vicaires ou desserviteurs d'églises paroissiales, situées dans l’étendue de notre domination aux Pays-Bas, devront se pourvoir tous les ans de deux registres en blanc, suffisants pour y inscrire les actes de baptêmes, de mariages et de sépultures qui auront lieu chaque année dans leurs paroisses respectives, lesquels registres seront divisés chacun en trois parties, dont l'une servira pour les actes de baptême, l'autre pour ceux de mariage et la troisième pour ceux de sépulture »

2) « L’enregistrement des actes de baptêmes, de mariages et de sépulture sera fait par le curé, le vicaire ou le desserviteur, ceux de baptême et de mariage d’abord après que les cérémonies en auront été faites, et ceux de sépulture au plus tard dans les vingt-quatre heures de l’inhumation ; tous lesquels enregistrements se feront de suite et sans aucun blanc, dans les parties des deux registres à ce destinées ».

Ces registres doivent entrer dans les détails les plus circonstanciés sur ce qui se rapporte aux renseignements généalogiques ; aux signatures ; à l'inscription des mariages célébrés hors de la paroisse de l'un ou l'autre des contractants ; à l'orthographe exacte des noms et prénoms des personnes ; aux soins à apporter à l'écriture ; aux ratures, additions ou renvois éventuels (art. i-xv). En un mot, c'est déjà l'état civil moderne, avec toute la précision de son formulaire.

17) « Dans le mois de janvier de chaque année, à commencer au mois de janvier 1780, chaque curé, vicaire ou desserviteur fera l'envoi d'un de ces deux registres au greffe du conseil de la province où la paroisse est située .. »

19) « Il sera payé aux curés, vicaires ou desserviteurs par la communauté de leurs paroisses, pour tenir le double des registres deux liards par acte inscrit, en ce compris la dépense des registres […] »

Cette fois-ci cette décision fut appliquée. [3]

[1] Ordonnance et Edict Perpertuel des Archiducs Nos Princes Souverains, XX., Gand 1672, p. 76.[2] Recueil des ordonnances des Pays-Bas Autrichiens, 3e série t.11, 1905, p. 293-296. [3] Actuellement, ces doubles se trouvent aux Archives de l’État. Beaucoup de communes ont gardé les originaux des registres paroissiaux de l’Ancien Régime. Ceci explique que, pour ces communes, les plus anciens registres paroissiaux de cette époque conservés par les Archives de l’État datent de 1779. Après la création de l’État civil, les registres paroissiaux sont restés dans les paroisses, ou confiés aux évêchés, mais aussi disparus, dans des mains privées ou détruits, par négligence ou incendies. Pour Folx-les-Caves, ces registres se trouvaient, en 2018, à la cure de Jandrain : pour les baptêmes 1805-1811 et 1817-1956 ; pour les mariages 1817-1908 et 1957-2014 ; pour les décès 1817-1899 et 1957-2016.