Paroisse et curés 9

On est frappé par ce nombre élevé de décès. Dans le registre de décès de Folx-les-Caves, il y 42 décès entre juin 1655 et décembre 1675, soit environ 2 par an. Si l’on considère les 160 habitants du dénombrement de janvier de 1693, on peut évaluer le taux de mortalité en 1693 à 10 % de la population.

En mai 1694 [1], Nicolas du Rieu fait les comptes de son fermier Jean de Thier [2] « de toutte les années que le dit de Thier peut avoir demeuré dans la maison pastorale dudit Sr pasteur. Ces comptes s’étalent sur deux ans. Ceci signifie que Nicolas avait une ferme qui était devenu inhabitable du fait de la guerre.

Le 30 août 1695, Philippe Mathy est tué par les Français dans les Caves de Folx. Il était dîmeur du chapitre Saint-Denis.

Le curé du Rieu fut obligé de demander de l’aide.

Déjà, le 24 décembre 1687, le chapitre St-Denis décide de lui faire un don.

« Messieurs deliberants sur la demande leurs faite par lettre addressée a mons[ie]ur leur doyen par le s[ieu]r pasteur de Fooz en Braibant, ont accordez audit s[ieu]r pasteur la somme de diex sept pattacons et demy une fois par grâce, et sans le pouvoir tirer en consequence, ordonnants a Philippe Mathy leur dismeur dudit Fooz de les furnir audit s[ieu]r pasteur a compte de ce qu’il reste de sa repriese, ce fait au chap[it]re le vingtequattrieme de décembre 1687.

Nouvelle intervention du chapitre de Saint-Denis le 14 septembre 1695.

« Messieurs ayants entendu les plaintes leur faites parle s[ieu]r Pasteur de Fooz en B[ra]bant ordonnent a leur Receveur deluy refurnir pour leur quolte ce quil sera paroitre d avoir exposé pour eux tant sauver leur cloche decimale, porte de l’eglise et autres choses nécessaires et luy payer ce quil aura exposé pour le pain vin et chandeles et la somme de dix escus veoir sans le tirer en consequence, le constituant pour lever les cens signeuriaux tant en argent qu’en epeaute que Messieurs luy accordent a son profit particulier veoir en annotant diligement touttes les payes pour les rendre au compteur et être vasisé a leur regne, fait au Chap[it]re ce 14e 7bre 1695. »

Dans une lettre adressée en 1699 [3] à l’évêque de Namur, le curé du Rieu nous fait revivre les malheurs de la guerre à cette époque à Folx-les-Caves.

« Represente en düe Reverence le Subsigné curé de Foulx que ledit lieu de sa résidence a souffert tout ce que la rage de la dernière guerre at peu produire par pilleries, ravages, fouragements campemens, destruction de maisons sans qu’il en soit restée une entier, terres incultes, abandonnemens presque general des manants jusque a cette presente année, dans lesquels maux il at été enveloppé sans qu’il lui soit restée aucunne chose ni meuble ni maison qui at été tellement rasée [en] 1694 qu’il ne reste meme aucunne piece de bois sauve la cave et quelque muraille. Ayant été obligé de faire sa retraite dans l’eglise jusqu’aujourdhuy sans aucunne apparence de se loger autrement, attendu que la misere de ses oüailles est egale, et qu’ils se trouvent dans une desolation qui ne peut cito finir, ce qu’etant comme le remontrant ne voit voit aucun jour de se rétablir d’ailleurs : n’aiant aucun moien pour attaquer les decimateus : n’etant d’autre part convenable ni resonable de presser les miserables manants à faire ce qu’ils ne peuvent exécuter pour eux-mêmes.

Il demande à l’évêque d’utiliser le capital d’une rente de « douze stiers demy et un dosin de segle [4] » en vue de reconstruire le presbytère.

[1] Autre-Eglise GSN 4819. Les greffes scabinaux d’Autre-église sont dans un grand désordre. On y trouve beaucoup d’actes relatifs à la baronnie de Jauche et à ses villages, dont Folx-les-Caves.[2] Jean de Thier apparait au recensement de1693 de Folx-les-Caves : « Jan de Tierre et sa femme et quatre enfans ensemble six personne consommant sept stiers de bled l’allant chercher a Louvain. » Dans le registre paroissial de Folx-les Caves, on indique le baptême de deux enfants Je ne sais où ont été baptisés les autres.[3] AEBxl, Conseil de Brabant, Procès de clercs, 3075.[4] Avant l’introduction du système métrique, les volumes de grain étaient exprimés en muid, setier ( stiers). La contenance réelle de ces mesures varie suivant l’endroit. Généralement, dans nos régions, on considère 1 muid de seigle == 240 litres == 8 setiers == 12 dosins.

Ces notes dans le registre paroissial et cette lettre nous font comprendre que Folx-les-Caves et sa région sortent complètement ravagés de la guerre de la ligue d’Augsbourg, qui, rappelons-le, se termina en 1697, par une paix de compromis signée à Ryswick. Les belligérants étaient épuisés, il n’y avait ni vainqueurs ni vaincus.

Un autre témoignage de ce ravage de Folx-les-Caves, se trouve dans le testament de l’épouse de Guillaume le Rousseau [2], riche propriétaire à Folx-les-Caves et Bousval. Il avait hérité de ses parents de « la seigneurie [3] de Heusbeek, les biens de la Pisselotte et la « Tour [4]» où ils résident et telle qu’ils la labourent, avec la cense, la maison, la brassine [5], la houblonnière, le fournil, le vivier et les terres; le bien comprend aussi les bâtiments, pourprise et tenure de l’autre cense située auprès du cimetière dudit Folx, tenue à ferme par Arnould Soignies ».

Dans ce testament [6], le 30-10-1697, elle résume la situation : "considérant que cette dernière guerre at tellement ruiné tous les biens de la famile, tiré les bastiments par terre, enlevé les despouilles et reduit la plus part des terres en friche, qu'il at fallu lever de l'argent a frais pour subsister et payer les charges journalières et que maintenant Dieu ayant rendu la paix par sa grace, il serat necessair de lever encor argent à fraix ou de vendre du bien pour remettre les bastiments en estat, les teres en culture et aultres necessités de famille.."

La famille le Rousseau est ruinée et ne s’en remettra jamais. La suite de leur histoire est émaillée de saisies judicaires, de procès.

Nicolas du Rieu décède le 4 janvier 1701 ; il est enterré dans l’église près de l’autel sous la trompette de l’ange (ad cornu angeli). Sa tombe a disparu.

Joseph Plisnier, curé de 1701 à 1753.

Le successeur de Nicolas du Rieu est Joseph Plisnier. Après les nombreuses destructions dues aux guerres incessantes, nous passons dans une période moins troublée.

Néanmoins, il y a toujours des problèmes de disette.

En 1702, le mayeur de Jauche fait une remontrance [7] aux bouchers de cette communauté, car ils ne déclarent pas correctement les bêtes qu’ils abattent. « Il est venu a la cognoissnace du remonstrant que dans la dite communauté, il y at des bouchers et aultres qui n’ont fait un juste rapport des bestes qu’ils ont tués mais en ont recelés plusieurs au grans priudice de la ditte communauté ».

En 1709, vu le manque de céréales, les autorités demandent « la visitte des espèces de grains qui se retrouve dans chacque maison de ce lieu (Foolz) avec le nombre des personnes de chasque famille avec leurs noms et surnoms ».

Pour commencer, on trouve :

« Prismes le S[ieu]r Josephe Plisnier pasteur, Rogier Plisnier, Marie Manry ; Jenne sa servante, Pierre Gravel, Jean Rousseau, Barbe Alglave, Marie Anne Grave 8 p[er]sonnes

en bled 40 St[ie]rs

en froment 5 St[ie]rs

en bled 40 St[ie]rs

Au total 143 personnes dans 27 ménages, dont 43 n’ont pas de grain.

[2] E. de Buisseret et P. de Tienne, Généalogie le Rousseau, Intermédiaire des généalogistes, n° 78, p. 377-399.[3] AEBxl, Conseil de Brabant Cour féodale, n°7334. La seigneurie de Heusbeeck est décrite comme suit « certain manoir en grandeur d’environ d’un bonnier ou soulait être une maison par les troubles brulée, maintenant devenu jardin soubs la baronnie de jauche au village de foulx devant le cementiere illec.. »[4] Ce qui reste de la cense de la Tour est aujourd’hui la ferme de la Vallée au 10 rue de la Brasserie à Folx-les-Caves.[5] Brassine = brasserie. D’où le nom actuel de la rue où elle se situait : rue de la Brasserie.[6] NGB 16832, notaire Franckart à Nivelles.[7] AELLN, GSN 3309.