Séparation de biens et portée de la clause de contribution aux charges du mariage

Cour de cassation

chambre civile 1

Audience publique du mercredi 1 avril 2015

N° de pourvoi: 14-14349

Publié au bulletin

Rejet

Mme Batut (président), président

SCP Le Bret-Desaché, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 17 décembre 2013), qu'après le divorce des époux X...- Y..., qui avaient adopté le régime de la séparation de biens, des difficultés sont nées pour la liquidation et le partage d'un immeuble indivis entre eux ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à aucune créance à son bénéfice au titre du financement de l'immeuble indivis, le solde du prix de vente de ce bien devant être partagé entre les époux selon la quote-part détenue par chacun d'eux résultant de l'acte d'acquisition, alors, selon le moyen :

1°/ que lorsque le contrat de mariage des époux séparés de biens stipule une présomption de contribution des époux aux charges du mariage, il appartient aux juges du fond de rechercher par une interprétation de la volonté des époux si ces derniers avaient entendu stipuler une présomption simple ou une présomption irréfragable en s'interdisant de prouver que l'un des conjoints ne s'est pas acquitté de son obligation ; qu'en énonçant qu'il aurait été jugé par la Cour de cassation que la présomption selon laquelle chacun des époux « sera réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage » interdit de prouver que l'un ou l'autre des conjoints ne s'est pas acquitté de son obligation, quand il lui appartenait de rechercher, si en l'espèce, dans la volonté des époux, cette stipulation avait la portée d'une présomption irréfragable, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1537 et 214 du code civil ;

2°/ qu'en présence d'une présomption selon laquelle chacun des époux « sera réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage », il appartient à celui des époux qui sous couvert de contribution aux charges du mariage, s'oppose au paiement d'une créance au titre du remboursement par l'autre époux des échéances de l'emprunt réglées pendant le mariage pour l'acquisition de l'immeuble indivis constituant l'ancien domicile conjugal, en l'occurrence à Mme Y..., de démontrer l'existence d'un déséquilibre à son détriment dans la contribution respective des époux aux charges du mariage ; qu'en se fondant pour statuer comme elle l'a fait sur la circonstance que M. X... n'établit pas que sa participation aurait compte tenu du remboursement des échéances du prêt, excédé le montant de sa contribution aux charges du mariage ni avoir été le seul à avoir jamais contribué, la cour d'appel a violé les articles 1315, 1537 et 214 du code civil ;

Mais attendu que, d'une part, après avoir relevé que les époux étaient convenus, par une clause de leur contrat de mariage, que chacun d'entre eux serait réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage, et en avoir déterminé la portée, la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a souverainement estimé qu'il ressortait de la volonté des époux que cette présomption interdisait de prouver que l'un ou l'autre des conjoints ne s'était pas acquitté de son obligation ; que, d'autre part, après avoir constaté que l'immeuble indivis constituait le domicile conjugal et retenu que les règlements relatifs à cette acquisition, opérés par le mari, participaient de l'exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage, elle en a justement déduit, sans inverser la charge de la preuve, que M. X... ne pouvait bénéficier d'une créance au titre du financement de l'acquisition de ce bien ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à aucune créance au bénéfice de M. X..., la répartition du solde du prix de vente de la maison située ...à Saint-Nazaire intervenant au regard de la quote-part détenue par chacun des époux dans cette acquisition tel que cela résulte de l'acte notarié du 1er mars 1999 soit 95/ 150ème pour M. X... et 55/ 150ème pour Mme Y... ;

Aux motifs qu'aux termes des dispositions de l'article 1537 du Code civil, les époux contribuent aux charges du mariage suivant les conventions contenues à leur contrat et s'il n'en existe point à cet égard, dans la proportion déterminée à l'article 214 du Code civil ; qu'aux termes de l'article 214 du Code civil si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives ; que M. Marc X... et Mme Françoise Y... se sont mariés le 6 décembre 1997 après avoir, selon contrat de mariage du 27 novembre 1997 passé en l'étude de Maître Z...et A..., notaires associés, adopté le régime de la séparation des biens ; qu'au chapitre des charges du mariage il est indiqué que « chacun des époux sera réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage » ; que les époux ont fait l'acquisition le 1er mars 1999 d'une maison sise ...à Saint-Nazaire dans les proportions de 95/ 150 pour M. X... et de 55/ 150 pour Mme Y... pour la somme de 1. 400. 000 F laquelle a constitué leur domicile conjugal ; qu'aux termes d'une ordonnance de non conciliation du 9 octobre 2006 la jouissance du domicile conjugal a été attribuée à l'époux, à titre onéreux, à charge pour lui de régler les emprunts immobiliers y afférents pour le compte de l'indivision et du fait de cette prise en charge sans versement d'une quelconque indemnité d'occupation ; que le divorce des époux X.../ Y... a été prononcé le 22 septembre 2008 par le juge aux affaires familiales de Saint-Nazaire, le jugement de divorce dans les rapports entre époux, en ce qui concerne leurs biens, prenant effet dès l'ordonnance de cause (sic) acquise en date du 9 octobre 2006 ; que cette décision est devenue définitive le 23 novembre 2008 ; que le bien immeuble indivis a été revendu par Maître B...aux termes d'un acte du 15 février 2008 pour un montant de 570. 000 euros et le solde du prêt remboursé soit la somme de 90. 846, 09 euros de sorte que la comptabilité du notaire présentait à a suite de cette opération un solde créditeur pour le compte de l'indivision X.../ Y... de 479. 153, 91 euros ; que selon ordonnance du juge de la mise en état du 6 mars 2008 chacun des époux a reçu à titre provisionnel sur leurs droits à venir dans la liquidation une somme de 50. 000 euros ; que Maître Bruno C... a dressé un procès-verbal de difficultés le 4 octobre 2010 retenant le principe d'une créance de l'époux de 100. 104, 46 euros ; que ce procès-verbal de difficulté fait référence à un acompte à M. X... le 6 janvier 2009 à hauteur de 80. 000 euros et à un autre acompte qui lui a été versé de 49. 841, 96 euros ; que le premier juge indiquant que « Mme Y... ne pouvait prétendre que la répartition du solde doive se faire en fonction de la part de chacun dans cette acquisition, dans la mesure où elle n'a jamais réglé 55/ 150 du prix d'achat » a entériné le procès-verbal établi par Maître C... à savoir :

- la somme de 72. 606, 22 euros pour Mme Y... sous déduction de l'acompte reçu le 18 février 2010,

- la somme de 400. 649, 91 euros sous réserve des acomptes perçus ;

que Mme Y... fait grief au premier juge d'avoir considéré que les époux avaient souhaité déroger à l'article 214 du Code civil et cela alors même qu'ils ont retenu pour l'acquisition du logement de la famille une proportion d'acquisition de 95/ 150 et de 55/ 150 ; qu'elle souligne également que Maître C... a effectué les calculs contenus au procès-verbal de difficultés selon un tableau synoptique produit par M. X... lequel au demeurant montre qu'elle a contribué à proportion de ses ressources à hauteur de 53. 833 euros ; qu'à tout le moins la cour devrait considérer que Mme Y... est bien fondée à se prévaloir d'une donation rémunératoire ; que sur la portée de la clause contenue au contrat de mariage, qu'au chapitre charges du mariage du contrat de mariage il est indiqué que chacun des époux « sera réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage » ; que contrairement aux affirmations de M. X... il a été jugé (Civ. 1ère 25 septembre 2013) que cette présomption interdit de prouver que l'un ou l'autre des conjoints ne s'est pas acquitté de son obligation ; que l'époux séparé de biens ne peut réclamer, au moment de la liquidation du régime matrimonial, le versement d'une indemnité compensatrice au titre d'un prétendu excès de contribution aux charges du mariage pour avoir financé seul l'acquisition de l'immeuble indivis qui constituait le domicile conjugal ; qu'en l'espèce, les époux n'ont pas entendu déroger aux règles légales applicables et ont convenu lors de la rédaction de leur contrat de mariage d'une dispense de reconstitution de compte entre eux ; que les parties ont encore affirmé leur position lors de l'acquisition de l'immeuble en faisant le choix des quotités indivises déjà rappelées soit pour M. X... 95/ 150 et pour Mme Y... 55/ 150, cette répartition n'étant pas le fruit du hasard comme le souligne Mme Y... dans ses écritures, et ayant été opérée en raison des gains effectifs des époux et des conditions personnelles de contribution aux charges de chacun ; que l'attestation de Maître B...qui n'était pas le notaire rédacteur de l'acte et qui a indiqué que la répartition des époux ne préjugeait aucunement des remboursements qui allaient être opérés par la suite, n'est pas de nature à modifier l'argumentation précédente, alors même que d'autres notaires qui n'avaient pas été mandatés par Mme Y... ont conclu à l'absence de créance de M. X... ; qu'ainsi M. X... a contribué aux charges du mariage à proportion de ses revenus, soit dans des proportions plus importantes que Mme Y..., qui s'est acquittée de sa contribution à proportion de ses propres facultés sans pouvoir prétendre à l'existence d'une créance à son profit ; que d'ailleurs il n'établit pas que sa participation aurait, compte tenu du remboursement des échéances du prêt, excédé le montant de sa contribution aux charges du mariage ni avoir été le seul à avoir jamais contribué ;

Alors d'une part, que lorsque le contrat de mariage des époux séparés de biens stipule une présomption de contribution des époux aux charges du mariage, il appartient aux juges du fond de rechercher par une interprétation de la volonté des époux si ces derniers avaient entendu stipuler une présomption simple ou une présomption irréfragable en s'interdisant de prouver que l'un des conjoints ne s'est pas acquitté de son obligation ; qu'en énonçant qu'il aurait été jugé par la Cour de cassation que la présomption selon laquelle chacun des époux « sera réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage » interdit de prouver que l'un ou l'autre des conjoints ne s'est pas acquitté de son obligation, quand il lui appartenait de rechercher, si en l'espèce, dans la volonté des époux, cette stipulation avait la portée d'une présomption irréfragable, la Cour d'appel a violé les articles 1134, 1537 et 214 du Code civil ;

Alors d'autre part, qu'en présence d'une présomption selon laquelle chacun des époux « sera réputé s'être acquitté jour par jour de sa part contributive aux charges du mariage », il appartient à celui des époux qui sous couvert de contribution aux charges du mariage, s'oppose au paiement d'une créance au titre du remboursement par l'autre époux des échéances de l'emprunt réglées pendant le mariage pour l'acquisition de l'immeuble indivis constituant l'ancien domicile conjugal, en l'occurrence à Mme Y..., de démontrer l'existence d'un déséquilibre à son détriment dans la contribution respective des époux aux charges du mariage ; qu'en se fondant pour statuer comme elle l'a fait sur la circonstance que M. X... n'établit pas que sa participation aurait compte tenu du remboursement des échéances du prêt, excédé le montant de sa contribution aux charges du mariage ni avoir été le seul à avoir jamais contribué, la Cour d'appel a violé les articles 1315, 1537 et 214 du Code civil.

Cour de cassation

chambre civile 1

Audience publique du mercredi 1 avril 2015

N° de pourvoi: 14-12938

Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président

SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 10 décembre 2013), qu'après le divorce des époux X...-Y..., qui avaient adopté le régime de la séparation de biens, des difficultés sont nées lors de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux, notamment pour le partage d'une indemnité d'assurance perçue à la suite de l'incendie d'un immeuble indivis ;

Attendu que M. X...fait grief à l'arrêt de juger que cette indemnité doit être partagée par moitié entre lui et Mme Y... ;

Attendu que, d'une part, après avoir relevé que les époux étaient convenus, en adoptant la séparation de biens, qu'ils contribueraient aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives et que chacun d'eux serait réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive en sorte qu'ils ne seraient assujettis à aucun compte entre eux ni à retirer à ce sujet aucune quittance l'un de l'autre, la cour d'appel a souverainement estimé qu'il ressortait de la volonté des époux que cette présomption interdisait de prouver que l'un ou l'autre des conjoints ne s'était pas acquitté de son obligation ; que, d'autre part, après avoir constaté que l'immeuble litigieux constituait le domicile conjugal et retenu que les paiements effectués par le mari participaient de son obligation de contribuer aux charges du mariage, la cour d'appel en a justement déduit, sans inverser la charge de la preuve ni méconnaître le principe de la contradiction, que M. X...ne pouvait réclamer, au moment de la liquidation de leur régime matrimonial, l'attribution de l'intégralité de l'indemnité d'assurance, subrogeant ce bien, au titre du financement de l'acquisition et de l'amélioration de celui-ci ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier avril deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour M. X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR jugé que l'indemnité d'assurance relative au sinistre incendie doit être partagée par moitié ;

AUX MOTIFS QUE « par acte notarié du 19 décembre 1984, les deux époux ont acheté en indivision par moitié un immeuble au prix de 340. 000 F, financé pour 180. 000 F par un emprunt constaté par acte sous signatures privées ; que l'acte notarié ne dispose d'aucune remarque sur l'origine des fonds utilisés par l'acquéreur, et notamment aucune déclaration d'usage de fonds personnels par un époux ; que cet immeuble a subi un sinistre d'incendie et, sur transaction, une indemnité d'assurance en représente aujourd'hui la valeur ; que M. X...demande un partage inégal en sa faveur de cette indemnité ; que pour cela, il fait valoir qu'il a financé l'intégralité de l'acquisition de cet immeuble, apport initial puis les intérêts et l'assurance du crédit immobilier, qu'il a financé seul les travaux d'aménagement, d'amélioration et d'agrandissement de 1984 à 1999, notamment au moyen d'une donation reçue en 1985 de ses grands-parents ; qu'il affirme avoir toujours payé seul les impôts et dépenses d'entretien et d'assurance afférents, son épouse ne démontrant pas avoir participé à ces financements, alors qu'elle n'avait aucun revenu, et alors que le prix de vente de son auto-école n'a jamais servi au financement ; qu'il signale que l'immeuble n'était pas achevé lors de sa vente, ce qui a justifié les travaux qui ont suivi l'achat ; qu'à l'inverse, Mme Y... désire sur appel incident voir partager par moitié cette indemnité ; qu'à cette fin, elle fait valoir que le crédit immobilier a été consenti aux noms des deux époux, lesquels ont souscrit l'assurance obligatoire à leurs deux noms, que M. X...ne justifie pas avoir alimenté seul le compte ouvert par les époux, qu'elle-même a arrêté son activité d'auto-école afin d'élever les deux enfants du couple, de telle sorte qu'il appartenait en contrepartie à M. X...de subvenir à toutes les charges financières de la famille ; qu'elle signale avoir dû quitter le domicile conjugal dans la précipitation à raison des violences répétées de son mari et s'être retrouvée seule et sans emploi ; que l'acte d'acquisition de l'immeuble ne stipule aucun remploi et désigne les deux époux, cet immeuble était achevé au moment de la vente et il n'y a eu besoin d'aucuns travaux à propos desquels M. X...ne rapporte aucune preuve, ni de leur nécessité, ni de leur financement, seuls des travaux de second oeuvre ayant été entrepris ; que s'il était fait droit à la demande de son mari, elle demanderait que l'apport qu'elle a également fait soit pris en compte ; que la cour constate que les époux se sont mariés après avoir conclu le 3 septembre 1982 un contrat de mariage sous séparation de biens, dont l'article 2 précise qu'ils contribueront aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives et que chacun d'eux sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive en sorte qu'ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux ni à retirer à ce sujet aucune quittance l'un de l'autre ; qu'elle constate qu'ils ont acheté en indivision par moitié une maison en 1984, décrite à l'acte comme immeuble neuf, chantier déclaré achevé depuis août 1979 ; que le vendeur était le banquier « Crédit immobilier de la Gironde », déclarant agir sur jugement de saisie du tribunal de grande instance de Bordeaux en date du 30 avril 1981 ; qu'il est manifeste que cette vente était la suite d'une construction achevée mais non financée ; que les explications du mari selon lesquelles des travaux ont été nécessaires sont vraisemblables, tout comme celles de la femme selon qui la maison était habitable, les travaux ne concernant que des finitions et aménagements ; que les époux ont alors habité la maison qu'ils venaient d'acheter en indivision par moitié et en ont fait leur domicile conjugal, y élevant leurs enfants ; que la cour en déduit qu'ils ont ainsi rempli leurs charges du mariage et assuré ensemble la direction morale et matérielle de leur famille, autant par l'achat de la maison que dans l'exécution des travaux qui ont suivi, nécessaires au logement ; puis, que la femme a cessé son activité professionnelle extérieure pour se consacrer à l'entretien du foyer et aux deux enfants tandis que le mari continuait à travailler à l'extérieur et à rapporter ses revenus au foyer, assurant le paiement des emprunts ; que le mari affirme y avoir investi un don de sa famille de 50. 000 francs et fournit une attestation relative à ce don ; mais qu'aucun élément ni indice n'incite à penser que cette somme a servi à des travaux sur la maison ; que de même il affirme avoir effectué deux emprunts auprès de sa famille et cela est attesté, le témoin signalent qu'ils ont été intégralement remboursés ; mais que la nature familiale des prêts ne modifie pas les données juridiques de la question, il s'agit toujours du financement du domicile conjugal et de son aménagement ; que la femme signale avoir perçu le prix de vente de son activité professionnelle d'auto-école, abandonnée pour se consacrer à sa famille ; mais qu'aucun élément ni indice n'incite davantage à penser que cette somme a été investie dans l'immeuble ; qu'il n'en sera pas plus amplement discuté ; que la cour en déduit que les deux époux se sont ainsi réparti leur contribution aux charges du mariage en proportion de leurs facultés respectives, ce dont leur contrat affirmait la présomption tout en les dispensant de quittance ; que les paiements effectués par le mari étaient causés et, l'équitable répartition de la contribution aux charges du mariage ayant eu pour effet que la maison indivise par moitié a été financée, chacun des anciens époux doit en recevoir la moitié, sans qu'il y ait lieu à distinction entre l'achat et les travaux nécessaires ; que le prix de cette maison ayant été remplacé par une indemnité, ce partage par moitié s'applique à cette dernière ; qu'en conséquence, aucune expertise n'est nécessaire » ;

ALORS, de première part, QUE lorsque le contrat de mariage comporte un clause prévoyant que la contribution aux charges du mariage est réputée acquittée au jour le jour, il incombe à celui qui prétend que son conjoint n'a pas satisfait à son obligation quotidienne, de sorte que les remboursements du prêt immobilier effectués à son profit doivent être regardés comme une compensation à ce titre, d'en apporter la preuve ; qu'en retenant que les remboursements par le mari des échéances du prêt correspondaient à sa contribution aux charges du mariage, aux motifs que le prêt avait servi à acquérir le domicile conjugal, que les époux s'étaient engagés au titre de leur contrat de mariage à contribuer aux charges du mariage à proportion de leurs facultés respectives, et qu'il avait en outre été prévu à cet acte que chacun d'eux serait réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, cependant qu'il résultait de ses propres constatations qu'en vertu du contrat de mariage, le mari était réputé avoir participé aux charges du mariage en proportion de ses facultés et qu'il incombait à l'épouse de rapporter la preuve contraire, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil ;

ALORS, en tout état de cause, QU'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si Mme Y... établissait, indépendamment du financement de l'acquisition, que M. X...n'avait pas acquitté sa contribution aux charges du mariage à proportion de ses facultés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1537 du code civil ;

ALORS, de troisième part, QUE dans ses conclusions d'appel, Mme Y... n'invoquait la contribution de l'époux aux charges du mariage qu'au titre du « financement de l'acquisition » de l'immeuble (conclusions d'appel adverses, 1-1., p. 6 à 9 et en partic. p. 7), et non du « financement des améliorations de l'immeuble » (conclusions d'appel adverses, 1-2., p. 9 à 11) ; que dès lors, en jugeant que les travaux effectués par le mari s'analysaient comme l'une des formes de sa contribution aux charges du mariage, sans inviter préalablement les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

ALORS, subsidiairement, QU'il appartient à celui des conjoints qui prétend que l'autre n'a pas participé aux charges du mariage à proportion de ses facultés contributives, de sorte que les travaux d'aménagement du domicile conjugal doivent être regardés comme une compensation à ce titre, d'en apporter la preuve ; qu'en retenant que les travaux litigieux correspondaient à la contribution de l'époux aux charges du mariage, aux motifs qu'ils portaient sur le domicile conjugal et qu'il avait été prévu au contrat de mariage que chaque époux serait réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, cependant qu'il résultait de ses propres constatations qu'en vertu du contrat de mariage, le mari était réputé avoir participé aux charges du mariage en proportion de ses facultés et qu'il incombait à l'épouse de rapporter la preuve contraire, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil.

ECLI:FR:CCASS:2015:C100354

Analyse

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux , du 10 décembre 2013