JBL 305P MkII

Un Monitor dans le salon

La curiosité pour cette enceinte de monitoring a été vivement aiguisée par la réception très positive de la part d'Amirm dans les colonnes d'Audio Science Review.

Ensuite Thomas à fini de nous convaincre... La JBL 305P MkII est une enceinte amplifiée (le P de 305P pour "POWER"), destinée à être positionnée sur la console de studio, ou sur le bureau, ou sur un pied spécifique. L'écoute est prévue pour une distance d'un à deux mètres car il s'agit d'une enceinte "nearfield", une enceinte de proximité (un peu comme l'était la Rogers LS5/3 pour les camions de reportages la BBC).

L'enceinte fait partie d'une série pour les besoin des professionnels, à installer dans le studio pour le mix et le monitoring.

Dans cette série composée de 3 moniteurs et d'un caisson de basse, JBL apporte quelques innovations dont la plus visible est le guide d'ondes avec cette forme spécifique installée autour du dôme du tweeter. L'objectif est de proposer une meilleure image, une grande scène sonore, ainsi qu'un centre "fantôme" solide, ainsi qu'une directivité permettant d'avoir un sweet spot, un point d'écoute privilégié, plus large : il ne sera pas nécessaire d'être à un endroit précis à quelques centimètres près pour bénéficier de la meilleure écoute.

Une photo de famille de la série. Pour le modèle 308P, il faut reconnaître que les retours ne sont pas tous positif, et dans cette série, la 305P semble être le modèle le plus reconnu.

Vu le niveau dans le grave, il faudra être amateur d'écoutes de sirènes de bateau pour aller jusqu'au caisson, mais il en faut pour tous les goûts, n'est-ce pas ?

Les points qui fâchent

Au travers des lectures sur internet, on peut craindre deux points pour ces enceintes:

  • le premier point est le sifflement en continu du tweeter. En ayant discuté avec Thomas, on comprend que ce n'est pas rédhibitoire : oui, le tweeter siffle un peu, mais si l'on se contente de positionner le potentiomètre d'atténuation à l'arrière de l'enceinte entre 4 et 5, il faut vraiment coller son oreille sur le tweeter pour s'en rendre compte

  • le second point est la fiabilité. En achetant dans une grande enseigne (Thomann) on sait que la garantie sera honorée ! D'autre part, à 120€ pièce, on ne prend pas un risque inconsidéré. En électronique, c'est souvent dans les premières 48 heures que l'appareil tombe en panne. Si ce n'est pas le cas tout de suite, alors on a de grande chance que la durée de vie soit correcte. Néanmoins, il faut reconnaître à travers les lecture sur internet que JBL ne dispose pas du meilleur système de contrôle de la qualité de ses produits.

Du marché pro au salon ?

Un certain nombre de composants du marché audio pro se retrouve dans les mains des particuliers qui souhaitent du bon matériel à des tarifs réalistes. Deux cent quarante euros la paire d'enceintes, cela représente un budget ridicule ! Mais ce n'est pas tout : la JBL est amplifiée, c'est à dire que l'on n'a pas besoin d'acheter en plus un amplificateur. Pour un particulier, un lecteur quelconque, un petit DAC en XLR, et voilà pour un budget de 500€ un système. Mmm.. D'accord, mais que peut-on en attendre ? Ben, regardons les spécifications, avant de démonter !

Specifications

Tirées du mode d'emploi de la JBL, voici quelques informations.

On notera une réponse en fréquence qui commence à 43Hz, et ce sont les chauves-souris qui vont être contentes avec une extension jusqu'à 24kHz ! Blague à part, le 43Hz par rapport au volume de l'enceinte (298 x 185 x 231mm) semble incroyable, mais nous aurons l'occasion de montrer une partie des mesures du site Audio Science Review - avec l'accord d'Amirm.

L'information qui nous intéresse au premier chef est celle qui indique que deux amplificateurs sont présents par enceintes, de 41W en classe D pour chaque HP. Il y a quelques années encore il était de bon ton de considérer la classe D avec commisération. Aujourd'hui cette technologie n'est plus à remettre en question, elle permet de fabriquer des amplificateurs aux mesures exceptionnelles.

Dans le cas de la JBL, c'est presque une assurance de moins de panne. La classe D, du fait de son mode de fonctionnement, ne chauffe que très peu : enfermé dans la caisse, il vaut mieux cette technologie qu'une classe A/B qui sera plus volumineuse et lourde (plus de composants) et qui va chauffer davantage. D'autre part, le rendement de la classe D est plus élevé et en général la consommation électrique est très à la baisse par rapport aux autres technologies.

Autre information qui nous intéresse : l'enceinte accepte une connexion XLR. Personnellement, je ne me vois pas revenir en arrière. Les câbles ne sont pas onéreux du moment que l'on achète chez les pros (10€ les 5 mètres) et les connexions permettent de brancher / débrancher à chaud sans mauvaise surprise : ce qui est interdit avec du RCA n'est pas un sujet en XLR.

Connections et réglages

Et voilà le dos de l'enceinte :

9 - connecteur XLR

10 - connecteur jack 6.35mm

11- réglage de la sensibilité d'entrée

12 : réglage du niveau dans le grave, atténuation jusqu'à -3dB à 70Hz

13 : réglage du niveau dans l'aigu, jusqu'à +3dB à 10kHz

14 : réglage du volume

Inside the box

Après avoir fait le tour (extérieur) du propriétaire et recyclé une partie de la prose du constructeur, il est temps de savoir ce qu'il y a vraiment dans la boîte. Un point qui m'interpelle par exemple, est le suivant : dans une Focal Alpha (50, 65 ou 80), qui est aussi un moniteur de studio, deux amplificateurs en classe A/B sont présents, mais de puissance différente, ce qui est normal, puisque le tweeter n'a pas besoin d'autant de Watts que le haut parleur de grave. Alors que dans le cas de la JBL, nous avons la même puissance pour les deux HP.

Les chiffres pour la 305P, 306P et 308P, pour le tweeter et le boomer.

Les HP

En enlevant les quelques vis qui tiennent la plaque au dos de l'enceinte, on accède à l'intérieur. Du classique, avec le dos des HP ainsi qu'un câble à deux brins pour la LED qui est en façade. Apparemment la LED est bicolore et passe au rouge quand la partie amplificateur signale une erreur. J'ai appris quelque chose, je ne savais pas que l'on pouvait avoir couleurs avec seulement deux fils.

Comme la plupart des enceintes, un matériau amortissant est disposé tout autour, une sorte de mousse.

Les câbles des HP sont reliés à la carte en passant par une petite ferrite (pas prise en photo), détail interessant, peut être pour calmer la réception de tout le bordel numérique.

Event (arrière)

L'évent est situé en haut de la plaque arrière... Et se trouve en face du tweeter : assez curieux pour confirmer avec une mesure qu'il ne va pas jusqu'au tweeter ! Il doit y avoir environ 5cm de marge. Cela ressemble à la même pièce collée dos à dos.

Ce serait drôle d'imprimer une pièce en 3D pour modifier l'accord, mais il faudrait avoir tous les paramètres pour faire tourner du logiciel définissant la taille dudit évent. C'est dommage d'avoir un évent sur l'arrière, l'enceinte est moins facile à positionner à cause des réflexions sur le mur du fond.

Le PCB

Pardon pour la qualité des photos. Sur le PCB on identifie quelques parties et composants dont nous allons parler.

Il n'y a qu'un seul PCB, composé de deux parties. Beaucoup de composants, essentiellement les condensateurs, sont entourés d'un matériau amortissant.

La liste des parties / composants numérotés :

  1. Le bloc d'alimentation à découpage

  2. un convertisseur de tension 25V vers 3.3V

  3. un autre 25V vers 5V

  4. un petit MCU de chez ST Microelectronics STM8S005K6

  5. un ADC Cirrus Logic CS5341

  6. Un quartz... J'ai pas gratté... Pourquoi un seul quartz ?

  7. à nouveau chez STM, un amplificateur STA350

Condomania

Pour ceux qui sont soucieux de la qualité de l'alimentation à découpage-qui-va-tomber-en-panne-rapidement voici la photo du superbe condensateur de marque inconnue dans la classe 105°. Pardon pour la qualité de la photo.

Vous remarquez qu'il est positionné assez près du radiateur d'un transistor, histoire qu'il n'ait pas trop froid pendant les difficiles journées d'hiver.

Blague à part, continuons notre visite de la JBL305P...

L'alimentation doit sortir quelque chose entre 20 et 25V. La documentation de la partie amplificateur indique (nous y reviendrons) une puissance de 41W ce qui correspond à moins de 25V.

On a vu deux régulateurs de tensions, un pour le 3.3V du micro contrôleur, un en 5V pour le circuit de conversion analogique numérique.

Fonctionnement

De ce que j'ai compris du fonctionnement de l'enceinte (sans le schéma et avec des connaissances en électronique limitées), on va détailler un peu le fonctionnement :

  • Une alimentation à découpage qui sort environ 25V

  • deux régulateurs pour un 3.3V et un 5V

  • un micro-contrôleur qui gère la logique, les switchs, le potentiomètre de volume, la couleur de la LED en façade...

  • un ADC

  • un amplificateur numérique configuré en mode stéréo afin d'alimenter un 1HP de grave et 1 HP d'aigu

De ce que j'ai compris du traitement du signal, le flux est le suivant :

  • L'entrée analogique sur la XLR ou le jack est ensuite convertie en signal numérique par l'ADC

  • La sortie de l'ADC est envoyé à l'amplificateur via une communication I2S

  • L'entrée de l'amplificateur est un flux I2S, qui est manipulé par la partie Digital DSP de l'amplificateur

  • Puis envoyé vers la partie POWER de l'amplificateur


Micro Contrôleur STM8S005K6

Le STM8S005K6 est un micro contrôleur 8 bits (du genre Atmel dans un Arduino) qui tourne à 16MHz (wha) et qui n'est pas impliqué dans le trajet du signal. Il est présent parce que l'enceinte a des switches et un bouton de volume sur sa plaque et que le processeur d'amplification à besoin qu'on lui explique comment il doit fonctionner.

Je pense aussi qu'il doit communiquer avec l'amplificateur sur les pates 20 et 32 pour récupérer un statut d'erreur afin de faire passer la LED de la face avant de blanc à rouge, et peut être plus, du genre temporisation et reset.

C'est aussi ce circuit qui gère la mise en fonctionnement / veille après un certain temps de l'amplificateur.

Le MCU doit récupérer une valeur du potentiomètre en 0 et 5V et doit faire sa conversion sur 8 bits pour envoyer le niveau de volume à l'amplificateur : bonne nouvelle, le réglage de volume est numérique (c'est un peu ironique, n'est-ce pas ?).

Ce qui veulent en savoir plus peuvent aller se manger la documentation. Ce qui aurait été sympa, c'est d'avoir le code source du contrôleur et de pouvoir s'amuser avec, peut être dans quelques décennies lorsque tout ça tombera dans le domaine public.

La liste des pates de l'ampli. On peut comprendre qu'une communication I2C est effectuée avec le micro contrôleur sur les broches 33 / 34.

L'amplificateur dispose de différente configuration et je suppose que c'est sur la communication I2C que l'on peut le configurer (mono / stéréo / 2.1).

Autre exemple, le MCU est relié aux switches derrière l'enceinte. Sur les papattes du MCU on récupère la position des switches, et sur le port I2C on commande à l'amplificateur la correction du grave en envoyant les bits qui définissent le niveau de grave du zinzin.

Convertisseur Numérique Analogique ADC

Voici le bloc fonctionnel du convertisseur. On voit à quoi sert le quartz sur la carte, c'est pour la master clock de l'ADC.

Quand on regarde la liste des fonctionnalités, on voit quelques points sur lesquels il n'y a rien à dire, mais d'autres qui font grincer les dents.

  • Advanced Multi-bit Delta-Sigma Architecture

  • 24-bit Conversion

  • Supports All Audio Sample Rates Including 192 kHz

  • 105 dB Dynamic Range at 5 V

  • -98 dB THD+N

  • 90 mW Power Consumption

  • High-Pass Filter to Remove DC Offsets

  • Analog/Digital Core Supplies from 3.3 V to 5 V

  • Supports Logic Levels between 1.8 V and 5 V

  • Auto-Detect Mode Selection in Slave Mode

  • Auto-Detect MCLK Divider

Le points le plus délicat à accepter est un SINAD de -98... Et encore, ce sont les spécifications du composant, c'est à dire au mieux, et c'est très rare que les chiffres fournis sur la spéc soient ceux de l'implémentation.

Du coup, à quoi bon brancher un DAC avec un SINAD à -120dB si c'est pour se retrouver avec une conversion qui fait perdre plus de 20dB ? C'est Thomas qui avait raison : autant connecter l'enceinte sur la sortie de la carte son, du moment que l'on ne se récupère pas de bruit de masse, cela fera l'affaire.

En lisant un peu plus la documentation, on s'aperçoit que le circuit peut fonctionner en 3.3V ou 5V. Dans le dernier cas, les performances sont meilleurs de 2 ou 3 dB. Comme on a repéré un petit régulateur 5V près du circuit de Cirrus Logic on se dit que le pire est évité.

Amplificateur digital STA350BW

Ce composant en provenance de STMicroelectronics est un amplificateur numérique. Comme le montre le Block Diagram, l'entrée audio se fait par l'interface I2S : le signal est envoyé par l'ADC sur cette interface.

La configuration s'effectue par le port I2C (atténuation des niveaux graves / aigus, réglage du volume...) et c'est pour cela qu'un micro-contôleur est installé sur la carte, afin d'envoyer les paramètres à l'amplificateur.

Contrairement à une Focal Alpha XX qui dispose de deux amplificateurs mono, un pour chaque HP, la JBL utilise un circuit Class D stéréo, et chacune des voies est utilisée pour chaque HP.

Une autre "indication" lue sur la carte de la JBL est que visiblement la carte est la même pour les trois enceintes de la famille (305 / 306 / 308).

La différence de puissance de l'amplificateur doit uniquement provenir de l'alimentation. En effet, la tension d'alimentation de l'amplificateur est comprise en 5V et 25V (max 30V).

En lisant les spécification de JBL et celle de l'amplificateur, il y a tout de même quelque chose d'un petit peu dérangeant. Le même ampli est donné pour 41W, ou 56W, d'après la documentation :

Le petit graphique qui fâche. Dans aucun cas avec 1% de THD l'amplificateur est capable de sortir 41W. Pour cela, il faut être à 10% de THD.

Personnellement, c'est le coup de grâce après l'ADC.

Conclusion

Bon, il est nécessaire de prendre en compte le prix de vente. Pour ce tarif, la technologie déployée est impressionnante et seulement accessible à une entreprise telle que JBL. Ce n'est pas du tout une enceinte "traditionnelle" avec une caisse, des HP et un filtre. La JBL est un produit numérique, même si de l'extérieur cela ressemble à une enceinte traditionnelle. A l'intérieur, il y a un savoir faire évident, certainement acquis sur de nombreux autres produits, et redéployé ici.

Oui oui oui, à ce tarif, la JBL est imbattable. Si l'on souhaite aller vers un kit Logitech à peine moins cher, préférer la paire de JBL est l'assurance d'un gain énorme en qualité.

Toutefois, de mon point de vue, sans trop considérer le tarif, je trouve que les composants ne sont pas d'une qualité suffisante. Je sais que la petite Focal 50 est un peu plus chère, mais sincèrement je pense que c'est un bien meilleur choix du point de vue de mon analyse technique (et je comprends que l'on puisse ne pas le partager).

Je vous le dit, la JBL 305P MkII est une source de questionnement pour moi.

Par exemple, je ne supporte pas du tout son niveau de grave : apparemment c'est le point fort du produit. Les specifications des composants embarqués, 10%THD, SINAD de -98... Ne me plaisent pas du tout d'un point de vue technique, mais sommes nous en train de totalement surestimer nos capacités à entendre ? Est-ce que 10% de THD ce n'est pas audible ? De nombreuses personnes trouvent le produit excellent, n'est-ce pas ? Pour ma part, le grave me le rend presque rédhibitoire. Ensuite, la définition, le niveau de détail ne sont pas hors norme. Alors pour le tarif, le niveau de grave est énorme et ceux qui aiment le grave seront servis, et pour le tarif, la résolution, forcément pour le tarif, pour le tarif, pour le tarif. Pour ma part, je me suis rendu les enceintes agréables en corrigeant énormément le grave. Il reste encore quelques pistes à explorer avec le fichier de correction que Thomas me propose d'utiliser. On verra.