I'm Leaving the Table

D’aucuns penseraient que cet Album de Léonard Cohen, « You want it darker » est celui de l’adieu. Il est vrai que plusieurs titres, dont celui-ci, évoquent la vieillesse est ses dégâts, la fin inéluctable de toutes choses, et le bout du chemin… Les initiés sont certains, cependant, que Léonard Cohen n’a pas dit son dernier mot, et savent qu’il nous prépare encore de sublimes poèmes et de splendides chansons. « I’m Leaving the Table » fait partie de ces chansons que Léonard Cohen a longuement, patiemment, ciselées, polies, affinées, avant de nous les offrir belles et pures comme si elles venaient de naître.

Dans l’ombre crépusculaire de « You want it darker », « I’m leaving the table » évoque, sur un ton désabusé, avec une lucidité résignée, la fin du jeu de l’amour, et les termes de la séparation : le temps a fait son œuvre, chacun a suivi son chemin, et, lorsque les chemins divergent, les liens se distendent. C’est comme cela ; nul n’y peut rien : les corps vieillissent, les passions s’affadissent, les pulsions faiblissent, et les démons eux-mêmes s’assagissent ! Aucun des anciens amants n’en est coupable : seul le temps est responsable.

Et pourtant, quand le jeu de l’amour est fini, quand l’amour n’est plus un jeu, c’est alors qu’apparaît ce trésor inépuisable, éternel, absolu qu’est l’Amour : non plus un jeu qu’animent les pulsions, mais le sentiment profond qui réunit deux cœurs. Le temps n’est pas si malfaisant : il permet de voir plus clair, plus loin, plus vrai !

ALN

Je Quitte la Table

Je quitte la table à jeux

C’est dit : j’abandonne

Sur ton cadre-photo

Je n’ connais personne

Si j’ t’ai jamais aimée, Oh, non

Quel honteux affront

Si j’ t’ai jamais aimée

Si j’ai su ton nom

Je ne vais pas me plaindre

Pas besoin d’avocat

Et pas besoin de te rendre

Je ne te vise pas

J’ nai pas b’soin d’une amante, Non, oh non

La pauvre bête chancelle

J’ nai pas b’soin d’une amante

Donc éteins la chandelle

Personne n’a disparu

Ni prime ni rançon

Petit à petit

Nous nous détachons

Nous dépensons ce bien, Oh non, non

Que l’amour n’offre point

Je sais, tu le sens bien

La tendresse revient

J’ n’ai pas b’soin de raison

Pour ce que je deviens

J’aurais bien des excuses

Mais elles ne valent rien

Je n’ demande pas pardon, non, non, non , non

On n’ peut plus blâmer personne

Je quitte la table à jeux

C’est dit : j’abandonne

Je quitte la table à jeux

C’est tout : j’abandonne

(Traduction – Adaptation : Polyphrène)