Here It Is
Comme dans “La Prière”, de Francis Jammes,Léonard Cohen énumère les misères du monde : la vie sordide du clochard, la solitude de l’ivrogne, la souffrance du malade, l’angoisse de la nuit du cœur… comme si elles concernaient Dieu lui-même (« Ce que vous faites au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites » - Matthieu,25,40).
Mais, alors que la chanson de Georges Brassens se termine sur une note d’espoir et de gratitude, Léonard Cohen inscrit la sienne dans la perspective de la mort inéluctable, comme dans un cycle de rédemption dont les acteurs sont « à usage unique ». Chacun naît, vit, et meurt. L’amour naît, l’amour meurt. Nous sommes simplement de passage (« Passing Through »).
Cette attitude de résignation, que l’on peut ressentir dans de nombreuses chansons de Léonard Cohen, n’est pas une forme de désespoir, mais une constatation que l’amour est indissociable de la vie, même s’il lui arrive de mourir, comme elle et avec elle.
Voici
C’est ta couronne
Le sceau que t(u) apposes
C’est ton amour
Pour toutes choses
C’est ton carton
Urine et caddy
Et ton amour
Pour tout ceci
Que vive chacun
Et que chacun meure
Mon cœur, bonjour,
Et Adieu, mon cœur
Voici ton vin
Ta chute quant t(u) es soûl
Voici ton amour
Ton amour pour tout
C’est ta maladie
Ton lit et ta poêle
Et c’est ton amour
Pour lui et pour elle
Que vive chacun
Et que chacun meure
Mon cœur, bonjour,
Et Adieu, mon cœur
Et voici la nuit
Ce sont les prémisses
Et voici ta mort
Dans le cœur de ton fils
Et voici l’aurore
(Tandis que la mort veille)
Et voici ta mort
Au cœur de ta fille
Que vive chacun
Et que chacun meure
Mon cœur, bonjour,
Et Adieu, mon cœur
Te voilà pressée
Te voilà partie
Et voici l’amour
Sur lequel on bâtit
Voici ta croix
Tes clous et le mont
Voici ton amour
(Et) son inclination
Que vive chacun
Et que chacun meure
Mon cœur, bonjour,
Et Adieu, mon cœur
(Traduction - Adaptation : Polyphrène)