Boogie Street

S’il existait une chanson exprimant la quintessence deLéonard Cohen, ce pourrait être « Boogie Street ». Le titre est l’anglicisation du nom d’une rue de Singapour (rue Bugis) qui fut célèbre pour l’intensité et la diversité de l’animation qui y régnait jour et nuit : commerces en tous genre (notamment trafic de contrefaçons) le jour, sexe et drogue la nuit. Comme dans « A Thousand Kisses Deep », Léonard Cohen considère qu’il y a, en chacun de nous, une « rue Bugis »,avec ses illusions, ses compromissions, ses tentations et ses vices, ses tricheries et ses recoins obscurs… A chacun ses « démons », dit-on.

Seul l’amour peut permettre de transcender et, peut-être, donner un sens, aux vicissitudes de notre âme, mais il est toujours difficile et hasardeux de cheminer dans le dédale de nos sentiments. Leur complexité et leurs conséquences évoquent le déterminisme dans le chaos. Le chaos apparent des sentiments n’est que le résultat de leur complexité, de la multiplicité de leurs causes, et de la force de leur interdépendance. Les moindres événements de la vie peuvent ainsi entraîner des cascades de « perturbations », dont les effets, bien que logiques, sont, en pratique, imprévisibles.

L’amour est alors comme un éclair qui, du plus haut des nues, illumine un instant le paysage tourmenté de notre âme pour en faire voir le dessin (ou le dessein ?).

Rue Bugis

Toi, l’auréole, toi, l’obscurcie

Qu’on se voie m’a surpris

Un baiser sur mes lèvres et puis

Revoilà rue Bugis

Un peu de vin, une cigarette

On n’ peut pas s’attarder

J’ai nettoyé la cuisinette

Le banjo accordé

A l’embouteillage, on m’attend

On m’a gardé une place

Je suis ce que je suis, étant

De retour rue Bugis

Oh, mon Amour, j’ai en mémoire

Quels plaisirs nous connûmes

Les chutes et les rivières

Où tous deux nous baignâmes

Stupéfait par ta beauté rare

Soumis à ton service

Par de telles consignes, on prépare

Un homme à rue Bugis

Toi, l’auréole, toi, l’obscurcie…

Venez donc, mes amis, sans peur

Si légers sont nos êtres

Car nous sommes faits d’amour, pour

Disparaître en amour

Bien que les plans de la chair soient

Sur la porte en notice

Nul encore ne nous dit à quoi

Peut servir rue Bugis

Toi, l’auréole, toi, l’obscurcie

Qu’on se voie m’a surpris

Un baiser sur mes lèvres et puis

Revoilà rue Bugis

Un peu de vin, une cigarette

On n’ peut pas s’attarder

(Traduction – Adaptation : Polyphrène)