Chelsea Hotel #2

Voici ma 127ème traduction – adaptation de chansons de Léonard Cohen, et ce n’est pas un hasard si j’ai longtemps délaissé cette chanson, pourtant très célèbre et remarquable à de nombreux égards. Ce délai est le fait d’une gêne, non pas à l’évocation crue d’une relation sexuelle, mais parce que cette chanson révèle l’intimité de la vie d’une tierce personne, en l’occurrence Janis Joplin, nommément désignée par Léonard Cohen à de nombreuses reprises. C’est sans doute la chanson à propos de laquelle il est le plus loquace. Il a du reste admis que cette désignation était, de sa part, « une indiscrétion », notamment par la révélation de détails intimes que l’on ne devrait pas dévoiler sans le consentement de l’intéressée. Il a précisé aussi, modestement et par égard à la vérité, que cette relation occasionnelle n’a pas fait de lui un proche de Janis Joplin. Il est vrai que la biographie de Janis Joplin ne fait pas mystère de sa vie agitée et de son addiction…Néanmoins, cette chanson se veut d’abord un hommage, et c’est en des termes très élogieux qu’il parle de Janis Joplin, comme une très grande artiste, libre et indépendante… De son côté, Janis Joplin a évoqué cette rencontre (et celle de Jim Morrison) sans en donner de détails « anatomiques », mais en l’expliquant par le désir de savoir ce que des personnages connus avaient à dire, et en concluant que sa quête était restée vaine…

Dans ses prologues, Léonard Cohen fait preuve, une fois de plus, de son humour fondé sur l’autodérision, en expliquant que Janis Joplin cherchait à rencontrer Kris Kristofferson, plus célèbre et plus grand que lui, mais qu’elle s’est contentée de lui par défaut. Il décrit aussi la vie des artistes au « Chelsea Hotel », puis les conditions dans lesquelles il écrivit cette chanson, longtemps après le décès de Janis Joplin, dans un bar à Miami

« Chelsea Hotel #2 » est, comme le numéro l’indique, la deuxième version de cette chanson, la première n’étant pas actuellement disponible. Les différences – modestes – entre les deux versions sont aussi à l’origine d’une polémique sur les droits d’auteurs relatifs aux arrangements.

ALN

Chelsea Hôtel n°2

Bien sûr, je me rappelle

Toi, au Chelsea Hôtel

Si audacieuse et douce, tu parlais

Tu me suçais

Sur le lit défait

Dans la rue, les voitures attendaient

C’étaient les raisons et c’était New York

Nous courions après l’argent et la chair fraîche

Ça servait d’amour aux forçats d’la chanson

Sans doute encore à ceux d’entre eux qui restent

Ah, mais tu est partie,

N’est-ce-pas, chérie

En tournant le dos à la foule

Tu es partie

Je n’t’ai jamais entendue dire :

« Je te veux, je n’ te veux pas »

« Je te veux, je n’ te veux pas »

Et toutes ces balivernes

Bien sûr, je me rappelle

Toi, au Chelsea Hôtel

Tu étais célèbre, et ton cœur légendaire

Tu redis que tu préférais les beaux mecs

Mais tu ferais pour moi une exception

Et serrant le poing pour ceux comme nous

Qu’oppriment toujours les canons de la beauté

Tu as pris ta dose et dit « Ne t’en fais pas,

On est affreux mais on a la musique. »

Et tu es partie…

Je n’ prétends pas que j’ai

Eté l’amant parfait

Je n’ peux compter

Tous les moineaux tombés

Bien sûr, je me rappelle

Toi, au Chelsea Hôtel

C’est tout

Je n’pense même pas

A toi si souvent qu’ ça

(Traduction – Adaptation : Polyphrène)