Avalanche

Well I stepped into an avalanche,

It covered up my soul

When I am not this hunchback that you see

I sleep beneath the golden hill.

You who wish to conquer pain,

You must learn, learn to serve me well.

You strike my side by accident

As you go down for your gold.

The cripple here that you clothe and feed

Is neither starved nor cold

He does not ask for your company,

Not at the centre, the centre of the world.

[…]

You who wish to conquer pain,

You must learn what makes me kind

The crumbs of love that you offer me,

They're the crumbs I've left behind.

Your pain is no credential here,

It's just the shadow, shadow of my wound.

[…]

Les heurs et malheurs de la vie,

La richesse inutile, la misère infinie,

Les surprises, les contrariétés,

La douleur, l’infirmité,

L’émotion partagée,

Le regard détourné,

L’échec, l’espoir déçu,

Les plaisirs, les malentendus,

La main tendue,

La beauté entrevue,

La laideur subie,

Le froid, la faim, l’ennui,

Les coups et les blessures,

La solitude du désespoir :

Une avalanche de sentiments

Recouvre notre âme

Sous les sédiments

De l’âge

Et le chercheur d’or en quête d’un minéral prétendument précieux néglige le trésor ainsi enfoui.

Léonard Cohen est remarquablement loquace dans sa description de cet ensevelissement de l’âme, et dans son évocation du sens de la souffrance :

« Your pain is no credential here »

Ces mots me ramènent trois ans en arrière, et je pense à ce qu’elle écrivait, dans les derniers mois de sa vie, à une amie :

« La maladie ne nous donne aucun droit, surtout pas celui de culpabiliser l'entourage ; bien au contraire, nous avons le devoir de ne pas l’empêcher de vivre et d'alléger son inévitable souffrance ».

Cette idée m’aurait profondément choqué si elle n’avait été émise par une personne qui, depuis tant d’années, vivait sa maladie dans la discrétion et la dignité, s’isolant lorsque la souffrance ne lui permettait plus de sourire aux autres, et revenant aussitôt vers eux pour les encourager et les soutenir. J’ai donc pu comprendre comment, au delà du courage et de la grandeur d’âme, il s’agissait là de la plus sublime intelligence de la vie.

La souffrance n’est pas une monnaie convertible. Elle ne permet d’acheter ni le salut, ni la compassion. Elle n’est ni un emblème, ni un laisser-passer. Elle ne confère ni beauté ni grandeur.

La souffrance nous expose, tout simplement, dans le plus parfait état de notre humanité, pour faire de chacun de nos actes et de chacune de nos paroles une parcelle du plus pur amour.

Voilà le trésor qu’elle a découvert et partagé jusqu’à ses derniers instants.

Avalanche

Je suis tombé dans une avalanche

Mon âme fut enterrée

Quand je ne suis pas ce bossu que tu vois

Je dors sous le tertre doré

Toi qui veut vaincre la douleur

Tu dois apprendre à m’honorer

Tu me heurtes par hasard ici

Tout en creusant pour ton or

L’infirme que tu habilles et nourris

De froid ni faim n’a souffert

Il ne réclame pas ta compagnie

Non, pas au centre, au centre de la terre

Quand je suis sur un piédestal

Tu ne m’as pas mis dessus

Tes lois ne me mettent pas

A genoux, grotesque et nu

Je suis moi-même le piédestal

De l’horrible bosse que tu as vue

Toi qui veut vaincre la douleur

Tu dois apprendre ce qui me plait

Les miettes d’amour que tu m’offres sont celles

Que j’ai laissé dégringoler

Ta douleur ne t’accrédite pas

Ce n’est que l’ombre, l’ombre de ma plaie

J’en viens à te désirer, moi

Qui ne suis pas cupide

J’en viens à te réclamer, moi

Qui ne suis pas avide

Tu dis t’être éloignée de moi

Mais je sens ton haleine chaude

Renonce aux haillons que tu mets

Je sais que tu n’es pas pauvre

Tu ne m’aimes plus si fort désormais

Que tu sais que tu n’es pas sure

C’est ton tour, bien-aimée

C’est ta chair que j’arbore

(Traduction – Adaptation : Polyphrène)