Les Lilas

Le café des Lilas

1- Madame Odile Blaise, alors fillette, à côté de sa grand-mère accoudée à la voiture, cantinière au 91ème RI. 2 et 3 - Le café des Lilas, ou café-buvette "Schatz" en 1950 et en 1993 avant sa destruction.

Modeste construction à la croisée du chemin de la Haillette et de la promenade de la Warenne, le café des Lilas a connu ses heures de gloire entre les deux guerres. Aujourd’hui, la fille de l’ancienne propriétaire, ce que l'on appelait aussi l’épicerie-buvette Schatz, termine paisiblement sa vie dans la maison familiale totalement enclavée dans l’hôpital Manchester.

En 1892, Madame Psaume vend le café des Lilas à madame veuve Parizel. Celle-ci se remarie bientôt avec monsieur Maignier, musicien au 91e RI, régiment d’infanterie alors en garnison à Mézières. En 1900, au décès de ce dernier, madame Maignier obtient la charge de cantinière du régiment. Très occupée par ce nouvel emploi, elle abandonne le café des Lilas au garde-champêtre qui l’occupera au titre de locataire sans licence de 1900 à 1910 et assurera l’entretien de l’ensemble des biens.

A la première guerre mondiale, une partie du 91e RI se replie au Couët puis à Nantes en août 1914. Toute la famille Maignier suit donc la cantinière en exode. Sa fille Alphonsine, mariée à monsieur Albert Schatz, ancien militaire, rachète le domaine en 1920, reprend la licence du café et y ajoute une épicerie. L’épicerie-buvette Schatz, ainsi baptisée par les clients, connaît une période faste puisque son ouverture coïncide avec le début de la réalisation du quartier de Manchester.

Le bain des carottes

Cette épicerie-buvette est fréquentée par les ouvriers œuvrant aux différentes constructions et par les travailleurs de la Fonderie Ardennaise et de la Macérienne qui logent à proximité. Les maraîchers qui viennent laver leurs légumes au gué « le bain des carottes » apprécient également de s’y rafraîchir. C’est aussi l’occasion en été, de voir les militaires du 91e RI prendre des bains, encadrés par des maîtres-nageurs vigilants.

En 1936, quelques grévistes, jaloux de la condition sociale des propriétaires, exercent une pression morale qui aura pour résultat la fermeture de la buvette. Madame Schatz gardera néanmoins l’épicerie jusqu’en 1962. Sa fille Odile, mariée à monsieur André Blaise, directeur des Etablissements Deville à Charleville, achètera le bâtiment et ses dépendances pour loger sa famille. C’est la fin des rencontres sous les lilas propices aux promesses pleines d’avenir et aux débats animés à la terrasse du café où l’on refait le monde.

L’hôpital de Manchester, en quête d’agrandissement, grignote peu à peu la propriété, les vergers et les jardins la jouxtant. En 1985, viennent le tour de la propriété « la Courtille » qui sera rasée et la rue de la Haillette, dans sa partie sud conduisant à la Meuse, sera comblée pour en faire un parking. Madame Odile Blaise verra alors se construire dans son jardin un imposant bâtiment destiné aux services administratifs de l’hôpital. Seuls, deux sapins plantés par ses petits-enfants en 1954 défient l’intrusion et témoignent fièrement de l’existence passée.

L’ancien café des Lilas est racheté par l’hôpital qui maintiendra madame Blaise comme locataire. Aujourd’hui, (1994), âgée de 91 ans, elle est armée d’un courage à toute épreuve devant cette infortune. L’essentiel pour elle, c’est d’être encore dans ses murs d’où jaillissent tant de souvenirs.

Retour à : Les cafés