Hôpital de Manchester
Hôpital-hospice de Mézières
extrait du "Petit Ardennais" de juillet 1933
Appelé plus anciennement « Hôtel-Dieu » dont la création remonte à la moitié du 13ème siècle, à cette époque fut fondée la Table des pauvres, sorte de fourneau économique. En 1696, les maladrerie de Mézières, de Maubert-Fontaine et de Monthermé furent réunies à l’Hôtel-Dieu, qui était situé à la place de l’Hôtel de ville actuel. Le personnel qui était laïque, en 1734, on fit venir trois sœurs de la congrégation de St Charles de Nancy, pour diriger le service et soigner les malades, c’est ce même ordre qui dessert aujourd’hui l’hôpital (1933). En 1809, l’Hôtel-Dieu trop restreint fut transféré dans le faubourg de Pierre, c’est à cette place qu’il fut partiellement détruit en 1870.
Le 10 novembre 1918, le bombardement allemand par obus incendiaires détruisit complètement le bâtiment qui abritait les vieillards et les malades. Le bâtiment militaire échappa seul au désastre, c’est dans celui-ci que l’administration installa , à l’étage les services de chirurgie et de médecine, et dans les combles, les vieillards ; les autres services furent répartis dans des locaux de fortune. La plupart des bâtiments étant totalement détruits à l’entrée des Français, il fallut assurer promptement tous les services, et ce ne fut qu ‘après qu’on songea à la reconstruction. Le terrain occupé par l’hôpital était trop restreint, situé en pleine ville, on ne pouvait songer à l’augmenter.
Narration pathétique
« Il est 4 heures du soir et nous sommes à la veille de l’armistice. Un grondement inattendu - dans ce pays où cependant depuis quatre ans ces grondements étaient connus - alerte soudain la ville. On peut certes encore tout appréhender, bien que les circonstances soient apparues plus favorables. Mais l’hôpital, que pourrait-il avoir à craindre ? Et malgré soi, on se rassure. Car c’est sacré un hôpital ! Quoi ! des malades qui déjà souffrent de tous les maux que la nature peut produire, des impotents qu’il faut porter et des vieillards hommes et femmes ! On a l’espoir – dans cet asile – quand toute la ville est en émoi, que ce domaine de la pitié, que cet oasis est hors de cercle menacé.
Illusion ! Un sifflement, et puis le choc, l’éclatement, l’écroulement des toitures et des vieux murs qu’une croix pourtant marquait de son signe de protection. Les pavillons sont tout en flammes, de pauvres vieux et des malades, des infirmes sont écrasés, d’autres brûlés, d’autres blessés, parmi les cris de la souffrance et les appels. Deux cents personnes, réfugiées dans les sous-sols d’extrême urgence sont évacuées vers les baraquements édifiés hier par les Allemands. Ainsi fini le vieil hospice de Mézières »
Le nouvel Hôpital
Monsieur Roussel, maire de Mézières, donne lecture du rapport ci-après de Monsieur l'Ingénieur-Voyer:
La reconstruction de l'hôpital d'après les dispositions adoptées par la commission administrative de l'hospice portera sur une surface d'environ 5 hectares, 70 ; Ces terrains ont été acquis par la ville au prix moyen de 2,75 francs le mètre carré, compte tenu des frais d'acquisition des intérêts et des indemnités de toute nature (éviction de loyer, perte de récoltes et de fumure ) qui sont venus s'ajouter au principal. Mais la ville ayant aménagé ces terrains en y créant des rues, des canalisations d'eau, de gaz et d'électricité et des égouts, il y a lieu d'en tenir compte dans le prix de revente des terrains.
L'aménagement des rues ressort à 260 francs du mètre linéaire de chaussée, la longueur des nouvelles rues contournant à l'Est, au Sud et à l'Ouest l'emplacement du nouvel Hôpital est de 830 mètres linéaires, correspondant à une dépense d'établissement de 215.800 francs dont la moitié, soit 108.000 francs, doit être récupérée sur les terrains de l'Hôpital.
La rectification et l'aménagement de la rue longeant la Meuse sur 450 mètres (Promenade de la Warenne) donnera encore lieu à une dépense évaluée à 125.000 francs. Enfin quelques travaux de nivellement ont été effectués le long de l' avenue de Manchester et aussi à l'Ouest du terrain réservé à l'hôpital évalués à 15.000 francs.
En somme l'ensemble des travaux donnant lieu à une plus-value des terrains en question se chiffre à 108.000 francs + 125.000+ 17.000 soit 250.000 francs, ce qui correspond à environ 4,35 francs du mètre carré. En fait les terrains coûtent à la ville : 2,75 + 4,35 = 7,10 du mètre carré, non compris l'intérêt du capital engagé pour réaliser les acquisitions et les travaux susvisés; en tenant compte de cet intérêt, nous estimons que le prix de cession des terrains à l'hospice peut être fixé à 8 francs du mètre carré.
Le docteur Bridoux (conseiller municipal) demande pourquoi l'hospice paierait un prix inférieur à celui admis pour les ventes aux particuliers et monsieur Cornélise (lui-même conseiller) rappelle que le prix de 11 francs le mètre a été consenti à l'Office Départemental des Habitations à Bon Marché. Monsieur le Maire répond qu'aujourd'hui il s'agit d'un établissement hospitalier et d'une surface de terrain extrêmement importante mais il ajoute qu'un prix intermédiaire pourrait être fixé et sur sa proposition la décision est ajournée à une prochaine séance. 1
La construction de l’hôpital destiné à remplacer, à Manchester l’hôpital détruit par l’incendie de 1918, occupera un espace de 5 hectares sur des terrains acquis par la ville. La ville les cédera à l’hôpital au prix de 10 francs le mètre carré en raison de la plus-value considérable atteinte par ce quartier depuis la création des nouveaux quartiers. La cession dans ces conditions est adoptée. (Conseil municipal du 23 avril 1923)
La commission administrative de l'hospice a approuvé les plans et devis de construction du nouvel hôpital, lesquels n'ont plus à subir que quelques modifications et certains agencements de détail réclamés par monsieur le Docteur Roux, président du Comité Technique du Ministère de l'Hygiène.
Le montant du devis s'élève, en nombre rond, à 8.350.000 francs, somme à laquelle il faut ajouter le prix des terrains (570.000 francs, d'où une prévision de dépense de 8.920.000 francs, dans laquelle l'intervention financière de l'hospice ne pourra se manifester que sous forme de remploi des dommages de guerre immobiliers de l'établissement, de la valeur des terrains désaffectés et des quelques bâtiments annexes préservés. 2
Monsieur le Maire communique au Conseil une lettre par laquelle monsieur le Ministre de l'Hygiène, de l'Assistance et de la Prévoyance Sociales, fait connaître que la commission de répartition a accordé une subvention de 300.000 francs sur les fonds du Pari mutuel pour la reconstruction de l'hôpital-hospice de Mézières. 3
Le Conseil municipal approuve sans réserve la décision de la commission administrative de l'hospice, mais exprime le regret de ne pouvoir envisager une participation financière quelconque de la ville, celle-ci ayant besoin de toutes ses disponibilités pour assurer l'exécution des grands travaux en cours d'exécution ou en instance tels que : Construction d'un groupe scolaire dans le quartier de Manchester, hôtel des Postes, construction d'égouts, adduction d'eau de Franlieu Mérale, et travaux divers entrepris en vue de faire face à la crise du chômage.3
1 Journal de délibérations de décembre 1922.
2 Journal de délibérations de juin 1923.
3 Journal de délibérations de juillet 1923.
Le 16 mars 1932, la Commission a décidé la construction, au sein même du nouvel hôpital, d'un pavillon pour tuberculeux des deux sexes. Ce nouvel organisme est appelé à rendre des services très appréciés. Le corps médical hospitalier a donné son adhésion pleine et entière au projet et a remis un avis favorable à sa réalisation.
Le projet dressé par monsieur Portevoix prévoit la construction d'un pavillon dont l'importance est limitée à 22 lits environ. Il comporte une dépense approximative de 1.000.000 de francs. Cette dépense serait couverte par une subvention sur les fonds du Pari mutuel qui serait du minimum de 50%, par des fonds provenant de l'outillage national et par une subvention éventuelle de la ville, le surplus de la dépense ferait l'objet d'un emprunt.
Inauguration le 16 juillet 1933
Un cortège automobile se reforme à l’issue de l’inauguration de l’hôtel de ville et emprunte les rues Monge, de St Julien, l’avenue de Manchester et le Bd Henry Bronnert pour se rendre à l’hôpital.
L’hôpital, aux majestueuses proportions, avec sa vaste cour d’honneur, au milieu de laquelle se détache un massif de verdure et de fleurs, a grand air.
La réception a lieu devant l’entrée principale, le Président de la République, Albert Lebrun, le maire, docteur Bridoux est accompagné du Lord-maire de Manchester, en robe rouge ornée de tous les insignes du grade et de col de fourrure, à ses côtés son épouse, madame Lady Mayoress. Toutes les officiels sont présents ainsi que la Commission administrative et les dames patronesses de la maternité, mmes Georges Corneau, Lambert, Rosoy, Nonot, Collet ; les docteurs traitants de l’hôpital : médecin-capitaine Rone, directeur de l’hôpital militaire, les docteurs Lhoste, Migabri, Hecheman, Rozoy, Rossignol, Georgi, Lemoine.
Monsieur Martin, président de la Commission administrative, prononcera le discours dont il associera les sœurs de St Charles et tout le personnel soignant et administratif. Après un rappel historique de l’Hôtel – Dieu il évoquera ensuite les réalisations du nouvel hôpital dont les travaux commencèrent en 1925 , et sont terminés aujourd’ hui pour quatre pavillons et les services généraux. Le pavillon de la maternité, celui de la communauté et la chapelle sont en construction. Ces derniers achevés viendra le tour du pavillon des vieillards. Il souligne que la ville de Manchester offrit à la ville de Mézières, sa filleule, une somme importante pour construire, en dehors de l’agglomération, des petites maisons familiales avec jardin, à la condition qu’une partie de leurs revenus seraient versés à l’hôpital ; c’est ainsi que naquit le quartier de Manchester et que l’hôpital jouit d’une rente annuelle de 30.000 francs. Devant l’inachèvement de l’hôpital et de la rareté des fonds, monsieur Martin profita de la présence du ministre de la Santé Publique, monsieur Daniélou, de s’intéresser particulièrement à son œuvre.
Dans son discours, le Lord-Maire de Manchester monsieur Walker, rappellera l’œuvre admirable de l’internationale solidarité qui a fait adopter la ville martyre de Mézières par la grande cité industrielle britannique de Manchester.
16 novembre 1949 : trois poumons d'acier placent les Ardennes au premier rang de la lutte contre la poliomyélite. Deux poumons (pour 1 adulte et 1 enfant) sont affectés à l'hôpital de Manchester et le troisième à l'hôpital de Charleville. Une démonstration officielle du fonctionnement des appareils, a eu lieu à Manchester en présence du docteur Grévy, directeur des Services d'hygiène, messieurs Fraison, président du Comité des achat de poumons artificiels, Hanus, maire de Mézières, Clément, directeur de l'hôpital. Monsieur Vincent, l'ingénieur-constructeur, a fait ses démonstrations. En bref, le poumon artificiel sert à faire respirer un malade qui n'est plus capable de le faire par lui-même.
Le personnel soignant pose devant le poumon d'acier (Photo G. Foury 1952)
19 octobre 1960 : Le nouvel hospice remplacera celui actuellement installé dans un pavillon de l’hôpital. Les locaux de ce dernier, rendus disponibles, seront affectés à un service médical de la médecine. Les travaux avaient débuté le 2 mai 1958 par l’entreprise Vallogia de Braux. Les 20 employés sous la direction d’une surveillante veilleront à ce que les vieillards ne manquent de rien. Son administration reste du ressort de l’hôpital de Manchester.
Dans le même temps l’hôpital se dote d’une nouvelle chaufferie moderne.
Le 22 juillet 1961 : Un chariot roulant portant les publications les plus diverses, permet aux malades de faire un large choix. Cette initiative est due à la maison de la presse dont monsieur Mouchard assure la direction.
L’école régionale d’infirmières
La première délibération de février 1960 a fait l’objet d’une demande de prise en considération auprès des services de la Santé en mars de la même année et dont les plans de financement, d’avant-projet et d ‘aménagement ont été rapidement ficelé dès juin 1960 La Commission administrative adoptait le projet de règlement intérieur fin août.
Le 10 juin 1961, le projet définitif avait l’agrément ministériel, l’adjudication fut préparée rondement. Les architectes Dupré et Hamel sont les responsables de l’édification en liaison avec l’entreprise Rouche.
Le quotidien « L’Ardennais » du 14 novembre 1962 informe que l’école fonctionne déjà dans des locaux un peu dispersés mis bénévolement à la disposition de madame Richert, directrice, par la Commission administrative et monsieur le directeur Legay. Plusieurs élèves infirmières suivent des cours. Elles vont commencer leur 2 ° année à l’issue, en septembre 1963, elles seront diplômées. Inauguration par monsieur Miquel, Maire, s’est faite le mercredi 14 novembre 1962.
Enfin, depuis le 1 er janvier 1964 l’école est installée dans les nouveaux locaux scolaires admirablement aménagés. Des salles de cours sont en outre en construction. Quant à l’internat, qui pourra recevoir 30 élèves, il sera ouvert en octobre. Il existe 18 internes actuellement, celles-ci logent où elles peuvent et cette future création ne pourra que favoriser l’extension de l’école et apporter de meilleures conditions de travail et de vie aux pensionnaires. Trente jeunes filles divisées en deux classes (1 ère et 2 ème années) sont actuellement présentes. Deux infirmières, mesdemoiselles Bariety et Valette d’Osia forment les élèves sur le plan pratique alors que les cours théoriques sont prodigués par tous les médecins du centre hospitalier. Le cycle d’études terminé, les épreuves pratiques et orales ont lieu à Reims.
Av Pasteur en 1994, ce qui reste du mur d'enceinte d'origine.
Allez à: Cité moderne pour vieillards ou allez à : Création du Centre de Réadaptation
ou encore à : Nécropole mérovingienne