Les transports
Pour aller quérir les légumes aux champs, les jardiniers d'avant la guerre de 1914 détenaient tous de braves, vaillants et rustiques ânes. Cet animal était largement utilisé, concurremment à la brouette : il permettait de passer aisément dans les nombreux et étroits sentiers et rapportait dans des paniers, sortes de cacolets, les légumes récoltés.
quand nous allions labourer, extirper, sans voiture, à l'aller comme au retour, nous ne montions pas en amazone sur notre cheval de gauche, même si nous parcourions 4, 5 kilomètres pour gagner notre lieu de travail dont nous foulions le sol meuble durant de longues heures. Pourtant, nous étions fatigués au retour, nos chevaux aussi, souvent couverts d'écume.Nous prenions grand soin des chevaux ; les dimanches ma- tins, surtout l'hiver par temps sec, nous les sortions et en avant l'étrille, le bouchon de chiendent, la brosse, le peigne, l'éponge, le curage des pieds, le tout à leur grand plaisir. Si les sabots se déformaient, si les fers s'étaient usés, une visite au maréchal-ferrant était prévue, chez Von Hatten, au pied des vieux remparts.
Pour conduire le fumier ou pour "ramasser le marché", le cheval était attelé au barou ; plusieurs chevaux étaient nécessaires pour tirer la charrette du faneret, de la moisson, ou qui ramenait les "pétates" et les oignons.
Inutile de dire qu'aucun jardinier n'avait "d'oto", longtemps considérée comme objet de luxe. La voiture à chevaux était encore reine. Je me rappelle une petite jument noire que mon grand-père Paulin attelait à sa voiture à deux roues. Lui et ma grand-mère Juliette s’asseyaient sur une planche transversale au milieu et à hauteur des grandes roues minces.Quand la petite jument prenait le trot, les passagers étaient secoués. "Et hic et hoc et houp et aïe", disait-on. Nos amis les chevaux n'étaient pas stupides comme le prétend Octave Mirbeau, bien au contraire. A chaque jardin ou terre bordant la route ou les chemins, ils s'arrêtaient d'eux-mêmes, se plaçant à l'ombre des marronniers, à moins qu'ils ne soient invités à poursuivre par un bref commandement : "hue pétit".
Nous utilisions beaucoup le vélo pour nous déplacer rapidement sur des chemins et des sentiers mal entretenus où sévissaient les trous, les bosses et la boue....Cette " récompense du Certif " nous menait au Major où nous cultivions 80 verges d'asperges. Pour en revenir, nous tenions à deux mains le panier sur l'épaule, pesant une douzaine de kilos, ayant forcément lâché le guidon. Nous poussions la coquetterie à prendre le virage pour entrer dans la grange dans la même position. pour nous amuser nous exécutions bien d'autres acrobaties. J'appris à ma mère à monter sur un beau vélo neuf, à pneus ballons et à filets multicolores sur la roue arrière. L'apprentissage se fit sur la piste, en ciment, ovale de l'ancien vélodrome du joli Bois d'Amour, aux grands arbres majestueux.
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