08 - Mardi 5 août 2008 - D'Ivrea à Vercelli

Le chemin de Roberto et Pino

Après une excellente nuit, nous prenons très tôt le petit déjeuner afin d’attraper le bus de 7h30. Roberto et Pino sont ponctuels au rendez-vous. Roberto, dont on apprend qu’il a 72 ans, démarre aussitôt. On verra qu’il marche bien et vite et ne boit jamais. Pino, quant à lui, est un jeune retraité qui, manifestement, à moins l’habitude de marcher. Ils nous guident jusqu’à Viverone. Impossible de trouver le chemin sans eux : il n’y a rien. Nous faisons une très belle promenade même si, très rapidement, la sueur nous coule dans les yeux. Ils nous donnent l’occasion d’admirer l’église de St Pierre et Saint Paul à Bollengo et une très ancienne église dont il ne reste plus grand-chose avant Piverone. L’intérêt de ce parcours, c’est la possibilité de dialoguer avec nos accompagnants. Roberto connaît quelques mots de français. Il travaillait chez Olivetti et fait désormais des choses et d’autres, le jardin, la vigne, la garde des petits enfants. Cette randonnée est l’occasion pour lui de faire un nouveau repérage, car il espère bien avoir à faire le balisage très prochainement. Pino était photographe. Il est très fier de me dire que sa fille est travailleur social. Voilà de bien charmants compagnons.

A Piverone, nous buvons un bon coup bien mérité et, très bientôt, nous découvrons le lac de Viverone. Enfin, de Viverone ou de Azeglio : il y a, semble-t-il, un débat là-dessus.

A midi précise, nous entrons dans Viverone. Il n’y a plus un chat dehors tellement il fait chaud. Pino s’arrête à hauteur de sa voiture, il n’en peut plus, peu habitué à ce genre d’exercice (et pourtant il ne portait rien). Roberto nous accompagne jusqu’au bar qui vend des tickets de bus. Il nous conseille très vivement de poursuivre en bus directement jusqu’à Vercelli et de prendre le temps de visiter cette ville qu’il dit magnifique. Et nous nous séparons. Ces moments sont toujours émouvants : un moment partagé puis la séparation. Nous traversons la route (la SS 228 celle-là – SS veut dire State Stradale – nos routes nationales) pour nous mettre à l’ombre…des poubelles et pique-niquer de saucisson de patate en attendant le car. Un car climatisé, presque rien que pour nous, nous emmène à la gare routière de Vercelli. Là, il faut se mettre en quête d’un plan de ville, car le Couvent de Billieme qui va nous accueillir semble très éloigné du centre ville, et de tickets de bus pour circuler aujourd’hui et demain. C’est décidé, nous ne partirons qu’après demain. Les ampoules au talon droit d’Elisabeth ont atteint une taille impressionnante. Le contact téléphonique au couvent nous a dit que pour une nuit, c’était oui, mais que pour deux, le Padre déciderait. Eh bien, en plein mois d’août, dans une ville qui possède de nombreuses curiosités, l’Office de Tourisme est fermé,….pour les vacances. Après avoir arpenté le Corso Garibaldi dans les deux sens, avoir posé plusieurs fois la question, nous trouvons les fameux tickets dans le kiosque près de la gare. Et direction « il convento ». Le chauffeur de bus à qui nous avions demandé de nous faire signe nous emmène jusqu’au terminus, bien après le couvent, puis repart en sens inverse, ce qui nous fait descendre au premier arrêt venu.


Comme tout couvent qui se respecte, il est fermé et il faut sonner. Quelqu’un nous ouvre, un fantôme sans doute car nous voilà plantés dans le hall intérieur et personne ne vient. Montons donc les escaliers. Là haut, il y a en effet du monde. Comment décrire ce capharnaüm ! Un vieux monsieur, dont on apprendra qu’il s’agit d’un bénévole, nous montre notre chambre (6 lits mais personne d’autre que nous), nous dit que le Père Alberto est d’accord pour deux nuits, et souhaite voir de suite nos crédentielles. Le Père Albero, nous le rencontrons par hasard dans le couloir comme beaucoup d’autres sans savoir que c’est un père. La seule différence, c’est que son tee-shirt porte l’inscription Alberto dans le dos.

Comment décrire ce lieu et ceux qui l’habitent ? Après un moment d’interrogation et deux petites journées passées là, on se sent admis, intégrés et pleins d’admiration pour Alberto. Il est désormais seul ici. « Il est souvent plus facile de faire communauté seul qu’avec des frères » me dira-t-il. Il Convento, c’est l’Arche de Noé, sauf que les habitants sont des êtres humains blessés, rejetés, orphelins de la vie. C’est admirable. Après la rencontre à Saint Oyen, voici la deuxième interpellation ! Et justement, le carnet dit : « Un ami pour choisir, pour bâtir et fleurir, une clé pour ouvrir l’avenir.. »

Lors du premier repas pris en commun, chacun se présente. Ils préparent tous ensemble les plats. Chacun va et vient ; nous les observons, essayons de comprendre. Plusieurs origines géographiques, tous les âges, les deux sexes, des blessés physiques, des blessés mentaux. Et le tout dans la bonne humeur. Un aperçu du monde parfait ? Après le repas et la vaisselle, le Père nous emmène voir la chapelle dont le plafond est entièrement peint. On y découvre une peinture curieuse, paraît-il fréquente en Crète (mais nous ne l’avons pas vue lorsque nous y sommes allés) : Jésus tenant dans ses bras un bébé censé représenter l’âme de la Vierge Marie. C’est aussi l’occasion d’évoquer sa mission. Qui sont ses compagnons ? En fait, ces gens lui sont confiés parce qu’ils n’ont pas où aller ailleurs. Il y a des mineurs confiés par la justice, des anciens SDF remis sur pied et qu’il réinsère dans le monde du travail et la société, des handicapés mentaux sans famille. Et lui parle à tout le monde, écoute, conseille, donne des ordres, rayonne.

Vers 21h, Paulo, un jeune brésilien vient frapper à notre porte pour nous souhaiter bonne nuit et nous dire au revoir car il ne sera pas là demain. Nous en restons bouche bée. Vercelli dont nous reparlerons demain, c’est aussi la capitale du riz. Le Père Alberto me confie une plaquette car c’est le début de notre apprentissage de la vie avec les moustiques !

Hébergement au Couvent de Billieme

Accueil : surprenant

Conditions de logement : acceptables

Prix : ce que l'on veut


A Vercelli