Minet ou chat...

Se pavanant dans le jardin

Comme chaque jour, dès le matin,

Un gros merle plein de dédain

Inspectait nos lieux avec soin.

Il habitait là, à son aise,

Dans un feuillage des plus secrets,

Se sucrant nos meilleures fraises

Devant nos regards indiscrets.

Il réservait aux oisillons

Notre cerisier Reverchon

De sorte qu’en un seul été

Ceux-ci furent si multipliés

Qu’il nous devint improbable

De gouter nos fruits à table.

Cet oiseau, en son langage,

Se moquait du voisinage

Jusqu’au moment providentiel

Où nous entendîmes un « miaou » ;

Un chat rôdeur, tombé du ciel,

Avait pris le merle filou.

Nous ayant sauvé la mise

Il régente la maisonnée

Tout-à-fait comme s’il y fut né.

Mais nous dégustons nos cerises.

Appelez-le minet ou chat…

Il reste toujours un pacha.

Gouvernes. 1985, au temps des cerises.