texte écrit par Maurice Coudert
Saint-Thibault-des-Vignes naquit des buissons vers 1081 lorsque l'Abbé de St Pierre de Lagny, Arnoul (1066-1106), déplaça sur la ''montagne'' de Gouvernes, au milieu de fayards désarticulés (les Faous, les hêtres) qui en recouvraient le sommet et les flancs, les RELIQUES de son frère Thibault (son bras et son cilice), lequel Thibault venait d'être canonisé en 1073 en Italie par Alexandre II. Arnoul était allé, dès 1075, chercher ces reliques en Italie, par monts et par vaux, à Badia Polesine, tout près de Venise, sur les bords de l'Adige, là où se trouvait le corps glorieux de son frère, mort en 1066 à Sossano, près de Vicence. L'opération des Faous, se fit sur l'injonction de Thibault lui-même, par l'intermédiaire d'un mendiant qui résidait là, près d'une source ! Thibault, par le moyen de songes, lui intima l'ordre d'aller à l'abbaye avertir Arnoul pour qu'il apportât les reliques ramenées d'Italie, là, aux Faous, où il voulait être, et qu'il y ferait des miracles... En outre Arnoul devait y élever une église et beaucoup de monde viendrait y chercher guérison, en se trempant dans l'eau de la source. Arnoul monta aux Faous avec son second Yves, les reliques et une jeune aveugle de Torcy qui retrouva instantanément la vue au contact de l'eau dans laquelle Arnoul avait plongé le bras de Thibault. L'abbé vit là le doigt de Dieu et intima l'ordre d'accéder aux injonctions de son frère.
Tout de suite un périmètre de forêt fut circonscrit et aménagé autour de la source (aujourd'hui puits situé dans une maison privée ), et la construction demandée (l'église actuelle, romane dirons-nous) s'éleva très vite, ''d'un seul jet'', qu'Arnoul flanqua d'un prieuré (aujourd'hui le ''château'' attenant à l'église) afin que quelques moines de St Pierre puissent s'occuper sur place de la chose et des visiteurs-curieux qui n'allaient pas tarder à monter vers le saint des Faous, car le miracle initial avait fait grand bruit... Arnoul, son second Yves, une foule importante et les moines de Lagny inaugurèrent les lieux, les reliques de Thibault étant déposées dans l'église flambant neuf, et dès lors les guérisons s'égrenèrent dans les Faous auxquels on accédait par un chemin qui se traçait peu à peu dans les bois, à partir de Lagny. Et désormais on ne monta plus aux Faous, mais '' à Saint -Thibault '' !
Les moines défrichèrent la colline y introduisant la culture de la vigne, comme ils le faisaient aux alentours. Ils firent appel d'offre et de nombreux nouveaux venus vinrent s'installer de ci de là, de préférence près du prieuré, moyennant dîmes. Il fallut attendre 1195 pour trouver dans les écritures officielles la première appellation ''ecclesia sancto theobaldo'' qui désignait le conglomé des Faous et, plus précisément, deux siècles plus tard, en 1351, émergea l'appellation ''Sanctus Theobaldus de Vineis ''. Un nom de lieu se précisait donc peu à peu, et ce n'est qu’en 1543 que l'évêque de Paris, Mgr Jean du Bellay, enfin, décida de créer la paroisse Saint-Thibault-des-Vignes pour autonomiser ces lieux disparates par des fonts baptismaux, un curé, un cimetière placé à l'entour de l'église et un autel dédié à St Jean-Baptiste, créé dans l'église (aujourd'hui la sacristie), le prieuré existant toujours, mais en fonctionnement ralenti. La commende (l'aumônier de la Reine-Mère Marie de Médicis) allait bientôt s'installer, en 1625, sur un fonctionnement de système seigneurial, et ainsi attendre la Révolution. A noter que, dès les débuts, le nouveau prieuré avait reçu du Comte de Champagne régnant (Thibault I de Champagne, ou III de Blois) les terres de St Germain des Noyers pour assurer ses bases, car non seulement le jeune saint Thibault de la colline était son filleul, en même temps que son neveu, avec Arnoul, mais le Comte voulait affirmer ainsi sa présence face à l'Ile de France Capétienne toute proche !