Les meuniers de Conches (D’après les archives d’état civil de la commune)
Les archives municipales d’état civil mentionnent au moins trois moulins à eau terriers sur le cours de la Gondoire : les moulins Bourcier, du Laurençon et Vinet. Vu le faible débit de la Gondoire l'énorme roue à aubes de ces moulins tournait grâce à l'eau du réservoir rempli durant la nuit (l'eau étant amenée par le bief : petit canal de dérivation à très faible pente qui conduit les eaux de la Gondoire vers le réservoir). Les moulins à eau ressemblaient aux autres constructions rurales, n'en différant que par la roue dont ils étaient dotés. L’activité des moulins nécessitait de nombreux bâtiments annexes, certains d'entre eux se voyaient adjoint une ferme.
Les meuniers étaient des auxiliaires indispensables des paysans et villageois : pas de meunier pas de farine et de pain ! Le pain était alors la base de l'alimentation des paysans.
Mais les meuniers avaient fort mauvaise réputation, on les considérait comme des êtres mystérieux. Ils étaient accusés de voler ceux qui leur apportaient le grain, de stocker le grain pour leur plus grand profit. Les moulins à eau étaient édifiés près de l'eau, lieu de séjour des divinités des sources et des fées ... de là à dire qu'ils étaient un peu sorciers et avaient liés un pacte avec le diable il n'y avait qu'un pas vite franchi par les briards qui croyaient à la magie, aux sortilèges, aux revenants...
Au moyen-âge tout le monde devait utiliser le moulin banal pour moudre son grain, le seigneur propriétaire du moulin gardait une part de la farine pour lui. Certains seigneurs donnaient en fief le moulin qui leur appartenait à un tiers ; celui-ci versait une redevance au seigneur et exploitait le moulin pour son propre compte. Pour compliquer les choses un fief pouvait être partagé entre plusieurs personnes !
Le moulin à eau est doté de nombreux bâtiments annexes : écurie, remises, magasin de stockage, poulailler, clapier…qui après l’arrêt du moulin ont souvent continué à fonctionner comme ferme ou ont été transformés en habitation.
Le moulin Bourcier :
Le premier meunier connu du moulin Bourcier est Abraham Pointar qui eut neuf enfants avec Jacqueline Tibaule. C'est leur deuxième fille Jeanne, née le 1er juillet 1635, qui épousa le second meunier connu du moulin Boursier Antoine Adam (ils eurent trois fils ; l'aîné, né le 26 septembre 1655, se prénommait Antoine comme son père)
Le troisième meunier est Pierre Follet il eut un fils, Hilaire, avec Jeanne Maupile (celui-ci décéda à l'âge d'un an).
En 1687, 17 ans plus tard, c'est un Pierre Follet qui est encore meunier au moulin Bourcier marié à Marguerite Fairas avec laquelle il eut 4 enfants ; est-ce le même ? Décédé le 20 janvier 1728 il aurait eu 90 ans.
Le quatrième meunier (ou le cinquième !) contemporain du précédent est Jean Loiseau ; il est dit meunier du moulin de Conches, il aura 5 enfants avec Catherine Saingy. Lors de la naissance du cinquième enfant en février 1703 il est dit laboureur et non plus meunier.
C'est en 1703 qu'un autre meunier, nommé André Follet, du moulin Bourcier apparaît dans les registres paroissiaux. Il épousa Geneviève Meriand avec laquelle ils eurent 4 enfants ; André décéda le 23 décembre 1770 à environ 85 ans.
A noter à propos des précédents les variations d'orthographe des noms propres d'un acte à l'autre ; Folet ou Follet, Moriand ou Meriand (nous avons retenu l'orthographe la plus fréquente). Les registres des paroisses n'étaient pas toujours tenus avec autant de rigueur que de nos jours : on y trouve des lignes laissées en blanc, l'orthographe des noms y est très approximative ; c'est avec le meunier suivant que les variations sont les plus fréquentes : Longat se lit Lorigat en 1705 (déformation de récriture ?) Lougat en 1707 et Longatte en 1722 ...
Claude Longat épousa Marie-Anne Bouchet en première noce, celle-ci décéda le 20 mars 1710 (ils avaient eu 4 enfants) ; en octobre 1711 naissait le premier enfant de son second mariage avec Marguerite Thibault (sur les 7 enfants qui sont nés de cette union, 4 décédèrent avant l'âge de 1 an, et Marguerite décéda des suites de couche).
De part les naissances dans les familles de meuniers, on peut penser qu'il y avait plusieurs meuniers en même temps au moulin Bourcier : le maître et ses aides probablement. En 1707 Jean Thomas est meunier au moulin Bourcier; puis de 1723 à 1756 les noms de Jean-Baptiste Berthe, Etienne Peron, Charles Grenand, Louis Boivin et François Durocher apparaissent dans les registres avec la simple mention : meunier, sans précision de lieu.
En 1786 Jean Lefevre est meunier au moulin Bourcier.
De1786 à 1876 se succédèrent au moulin Bourcier :
Louis Claude Enguerrand décédé en 1820
François Augustin Enguerrand décédé en 1849
Et Alexandre Enguerrand.
Dans les registres de cette époque apparaissent Sulpice Grognet et Auguste Antoine Bourgenaux comme meunier sans précision.
En 1922 le moulin Bourcier est détruit par un incendie, il appartenait alors à Monsieur Enguerrand.
C'était la résidence de Monsieur et Madame Quéré, directeur de la Banque de France, dans les années 1970, puis de leur fille Madame De La Tullay.
Actuellement on peut voir rue du moulin Bourcier le réservoir alimenté par le bief, avec un petit bâtiment sur le bord de la Gondoire.
Le moulin Vinet :
Ce moulin est cité en 1242 lorsque Jean de Chanteloup, curé de Saint-Laurent de Paris le reçoit en héritage de son père.
En 1247 Pierre 1er, vingt-septième abbé de Lagny, devint propriétaire du moulin Relief et du moulin Vinay sur la paroisse de Gouvernes ; ce moulin Vinay est-il le même que le moulin Vinet ?
En 1661 le moulin Vinet avait comme meunier Jean Monsiau, celui-ci est alors parrain de Catherine Josselin fille du vigneron Denis Josselin.
Durant près de 100 ans on ne trouve pas mention du moulin Vinet dans les registres de Conches; il faut attendre 1777 où Nicolas Enguerrand est noté ancien meunier du moulin Vinet. C'est en 1814 que l'on trouve la première naissance dans ce moulin, Jean-François Lefevre y est alors meunier.
En 1818 Antoine Robin y est meunier, en 1834 c'est Louis Depussay.
Comment expliquer qu'il n'y ait pas eu de naissances au moulin Vinet avant la Révolution alors que le moulin existait ?
Que devient le moulin Vinet après 1834 ? En 1839 Monsieur Théodore Chatenet y demeure mais il n'est pas mentionné qu'il y soit meunier. Au début du vingtième siècle c'est un atelier de petite mécanique qui utilise la force hydraulique du moulin. Quand l’activité du moulin cesse c'est un élevage de chiens danois qui occupe le site, le bâtiment du moulin étant transformé en habitation.
Madame Fischel Virginie née Botte en est propriétaire jusqu'en 1939 où elle le vend à Monsieur Richard.
Actuellement on peut suivre le bief du moulin entre le rû Gondoire et la rue du Châtelet, depuis le pont de rue du fort du bois jusqu'au réservoir. Le bâtiment est la résidence de Monsieur Richard Louis (37 rue du Châtelet).
Le moulin du Laurençon :
On ne trouve mention de ce moulin que deux (ou trois) fois dans les registres : en 1757 Nicolas Leloup est meunier au Laurençon , en 1771 Pierre Gendret et en 1797 Pierre Nicolas Gendret (est-ce le même ou un membre de sa famille ? Les documents d’état civil nous permettent de constater que bien souvent on donnait au fils ainé le prénom du père ; ce qui ne facilite pas les recherches). Le fief du Laurençon existait bien avant, mais peut-être n'y avait-il pas de moulin auparavant.
On voit encore en contrebas du champ communal qui borde l'avenue de la Jonchère, les vestiges du réservoir entre les arbres fruitiers.
Les autres moulins ?... :
Dans la tradition orale on retrouve un moulin « Angueran » dont la retenue serait près du pont de la rue du fort du bois, c'est là le départ du bief du moulin Vinet ! Plusieurs meuniers se nommaient Enguerrand aussi n'est il pas impossible que l'on ait nommé le moulin où ils travaillaient par leur nom, un peu déformé...
En 1646 il est fart mention du moulin Guillon, c'est la seule mention qui en est faite avec Jean Dilustre qui y demeure.
Plusieurs fois nous trouvons le moulin de Conches ; duquel s'agit-il ?
En 1797 Louis Enguerrand est noté comme demeurant « rue du moulin Bourcier dit Laurençon » voilà matière à mettre le doute dans les esprits ! Combien y avait-il de moulins à Conches ? Deux, trois, ou plus ? Et ces moulins existaient-ils tous à la même époque ? Ils ont pu être au cours des siècles démolis, reconstruits au même endroit ou sur un autre site ?
En 1817 François Félix Voland (Volland) meunier demeurant à Conches fait donation de l'universalité de ses biens meubles et immeubles à sa femme Angélique Marié au cas où elle lui survivrait. Voir la transcription de l'acte de donation devant maitre Louis Simon Richard notaire royal à la résidence de Lagny sur Marne. Il n'y est pas mentionné de quel moulin il est le meunier.