Pymandre 5

Corpus Hermeticum: Pymandre.

Livre I d’Hermès Trismégiste, Pymandre, verset : 17 :

" Élève ton coeur vers la lumière, et connais-la."

Lors du précédent article sur le Corpus Hermeticum, nous avons étudié le lien qu'il y a entre la lumière et le Noùs, l'Être qui se suffit à Lui-même et qui existait avant la nature humide issue des ténèbres. À la suite de cette explication de Pymandre, Hermès pose la question de savoir ce que cela signifie... La réponse du verset 17, toujours dans une élégante simplicité, renferme néanmoins pour le lecteur, la quintessence d'une Connaissance ultime.

Il est très subtilement indiqué dans ce verset si puissant que : ce que Voit et entend Hermès, est la parole du Seigneur... Mystérieuse formulation pour définir la "parole", car s'il est aisé de comprendre qu'elle peut s'entendre, il l'est déjà beaucoup moins pour ce qui est de la voir... Ici nous atteignons les limites du langage conventionnel, qui ne permettra plus de pénétrer les richesses de l'enseignement que renferme le Corpus Hermeticum si bien nommé. Seul le langage analogique va nous permettre de poursuivre le cheminement auquel nous invite ce texte majeur de la Science Hermétique.

Mais reprenons le fil de l'histoire qui nous est contée. Pymandre dit à Hermès : ce qui en toi voit et entend; dans l'état de méditation profonde qui est celui d'Hermés (reprendre si besoin l'histoire à ses débuts), ce qui voit et entend en lui n'est plus ce qui fait appel aux sens organiques aux capacités si limitées, mais bien ce qu'il voit et entend par ses sens supérieurs que sont la clairvoyance et la clairaudience. Il voit d'abord la lumière de l'Intelligence universelle qui se manifeste à son entendement dans sa majestueuse et redoutable puissance du Feu, source d'énergie primordiale de toutes choses. De ce Feu, niveau vibratoire infini qui en est sa parole (voix), jaillit des feux subtils des puissances différenciées de l'universel. Ce que doit voir et entendre Hermès, n'est pas perceptible par les sens de la nature animale de l'être humain, mais uniquement par le sens de sa nature divine. Ce sont ces sens qui lui permettront de comprendre ce qu'il doit en réalité voir et entendre. Nous pouvons relever dans cette précieuse indication, que lors de sa méditation, Hermès qui a préalablement manifesté le désir de s'ouvrir aux lois de la Providence, reçoit de celle-ci à la mesure de ce qu'il mérite. Et compte tenu de la très haute élévation des enseignements qui lui sont transmis, dans leur pureté originelle et intemporelle, il est facile d'en déduire que notre Hermès est un initié de très haut rang. Même si cela peut paraître comme une évidence flagrante, il me semble bon de la souligner afin de situer Hermès à la place qui est celle qu'il doit occuper dans le récit du Corpus Hermeticum.

Accessoirement, il peut être tout aussi intéressant de déduire de ce précédent petit constat, que si Hermès, par son élévation spirituelle et le très haut niveau de ses Connaissances, peut recevoir les enseignements d'une si puissante intensité vibratoire, c'est qu'il est en mesure de les mériter et de pouvoir les supporter, et d'autre part, d'en apprécier la valeur par sa capacité à comprendre, ce qui implique attention, écoute attentive, effort, discernement et intense concentration. Ici, nous avons l'expression de l'Amour Absolu qui se manifeste par le don de la Lumière de Connaissance et d'Intelligence, de la part de celui qui se suffit à Lui-même, et l'acte d'Amour le plus élevé que peut atteindre une Conscience dans sa forme la plus glorieuse et est celui de savoir recevoir avec humilité et une dignité en rapport du prestige de ce qu'il reçoit, et de qui il reçoit. Aimer pour les Consciences différenciées de l'Universel, commence donc par savoir recevoir ; condition première sans laquelle il ne sera pas possible de donner. Si c'est vrai, pour ce grand Initié qu'est Hermès recevant le Corpus Hermeticum, combien cela doit l'être au moins autant, pour la lectrice et le lecteur de ce Corpus... Que ceux qui ont des oreilles pour entendre, entendent!

... c’est la parole du Seigneur... Ce que nous indique Pymandre, doit toujours se COMPRENDRE, comme il invite Hermès à le faire, dans le sens du langage le plus universel qui soit, je veux bien évidemment parler de l'analogie. Croire que le Seigneur ait une parole au sens vocal du terme, comme nous pourrions l'entendre dans le sens profane, serait un paradoxe rapidement ingérable. Cela supposerait un organe spécifique à cette parole, ce qui ne peut se faire que dans la sphère des manifestations nécessairement limitées et périssables, et remettrait en cause le statut de ce Divin Seigneur. Et quand bien même nous ferions l'impasse sur l'organe qui doit être à l'origine de toutes expressions vocales, nous serions quand même confrontés, dans le cas de cette parole dans le sens profane, à une obligatoire tessiture, registre sur lequel se situerait cette parole et qui la différencierait des autres... Le Tout dans sa forme d'expression, se retrouverait forcément limité et distingué, par sa parole, du reste de la Création dont il ne serait plus qu'une partie...

La seule façon de concevoir cette parole du Seigneur, sans que cela soit rapidement paradoxal, c'est sous la forme vibratoire d'une pensée dont le niveau infini parviendrait à contenir tous les autres dans leurs manifestations finies. L'exemple nous en est d'ailleurs donné dans les versets précédents par : l'appel inarticulé de la nature humide (notons l'adjectif inarticulé, qui nous dispense d'avoir à l'assimiler à une vocalise), qui est comparé à la voix du Feu... La parole, ou les paroles du Seigneur, les fameux Logos à l'origine de toutes créations, ne sont donc que des pensées qui varient et se distinguent les unes des autres par leur niveau vibratoire. Et comme j'ai eu à l'expliquer lors des derniers articles dans l'e Grand Œuvre d'Hermès Trismégiste, chaque pensée, qui est une âme, est aussi un ou des Nombres sacrés, et possède sa correspondance géométrique dans l'univers des formes. La parfaite cohérence de la Divine Création se retrouve dans le moindre détail, comme dans le TOUT. Rien de ce qui existe ne peut être étranger au Divin Créateur, le seul qui possède cette faculté de création. Lorsque l'intelligence, la clairvoyance, la clairaudience d'une Conscience s'ouvrent sur les lois de la Divine Providence, elles perçoivent des pensées de plus en plus puissantes, de plus en plus lumineuses, et de plus en plus proches du Verbe Divin. Ceci nous renvoie au début de l'Évangile le plus ésotérique du Nouveau Testament, celui de "selon Saint-Jean" :

1.1 Au commencement était la Parole, et la Parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu.

1.2 Elle était au commencement avec Dieu.

1.3 Toutes choses ont été faites par elle, et rien de ce qui a été fait n'a été fait sans elle.

1.4 En elle était la vie, et la vie était la lumière des hommes.

... et ton Noùs est Dieu le Père ; ils ne sont pas séparés l’un de l’autre, car leur unité est vie... Donc, si rien ne peut être étranger au Divin Créateur, alors tout ce qui existe a pour origine, essence, Genèse, une de ses paroles (pensée) qui est la source de toute vie et forcément indissociable de cette vie. Il découle de ce petit constat, simpliste en apparence, que ce qui vit n'est pas ce qui se manifeste dans une forme limitée et qui naît, croit et meurt, mais est cette parole/pensée (Logos) qui en est le feu énergétique et le coeur battant, ayant la propriété d'être protéiforme, selon son intensité vibratoire. Ce qui naît croît et meurt, n'est que la forme, mais jamais la parole/pensée animatrice pour la simple et bonne raison, que venant, comme l'indique le Corpus Hermeticum, du Seigneur, celui qui se suffit à Lui-même dans son ineffable perfection, il ne saurait produire des paroles/pensées mortelles qui seraient des imperfections parfaitement contraires à son statut. La Perfection même de "Dieu le Père", se transmet dans la moindre de ses paroles/pensées, et acquiert par là même une irréductible immortalité. La Conscience sera donc l'expression de la Parole/Pensée Divine sans laquelle elle ne pourrait exister, c'est pour cette incontournable raison que ce verset 17, précise que cette Parole du Seigneur est inséparable de ce à quoi elle donne vie, quelle que soit la forme de cette vie. Ce verset exprime l'infinie espérance que doit avoir cette vie lorsqu'elle prend Conscience de ce don d'Amour Absolu qu'elle a reçu de la Parole du Divin Créateur, et qui lui permet d'être ce qu'elle désire être, sans jamais perdre le privilège de sa filiation naturellement divine. Sublime cadeau que celui-ci non?...

Bon, je m'avance témérairement, lorsque je qualifie de Sublime cadeau, cette Parole de vie dont nous héritons tous, car, comme le précise Pymandre dans le verset 19, pour apprécier ce cadeau à sa juste et inestimable valeur, encore faut-il que la Conscience qui l'a reçu, élève son coeur vers la lumière, pour la connaître cette valeur...

Je terminerai cette petite étude par le constat que si la Parole Divine a toujours une inestimable valeur. Pour rendre cette parole prestigieuse, il faudra que le coeur de la Conscience qui la recevra, se tourne vers la lumière qui la fera briller de ses mille feux chatoyants.

La Noblesse de l'oeuvre, requiert la noblesse de l'oeuvrant.

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Commentaires ------>

Livre I d’Hermès Trismégiste, Pymandre, verset : 19 :

" Je te remercie," dis-je.

"Comprends-le. Ce qui en toi voit et entend, c’est la parole du Seigneur, et ton Noùs est Dieu le Père ; ils ne sont pas séparés l’un de l’autre, car leur unité est vie."

Livre I d’Hermès Trismégiste, Pymandre, verset : 18 :