Pymandre 4

Corpus Hermeticum: Pymandre.

Livre I d’Hermès Trismégiste, Pymandre, verset : 15 :

Alors il me dit : « Cette lumière, c’est moi, Noùs, ton Dieu, celui qui existait avant la nature humide issue des ténèbres. La Parole lumineuse qui émane du Noùs, c’est le Fils de Dieu. »Nous retrouvons dans ce verset 15, le ternaire Divin : le « Père » le Noùs, l’Être qui se suffit à Lui-même ; la « Mère », la matrice universelle, la nature humide, les ténèbres, et le « Fils » La Parole Lumineuse, le Logos, le Verbe fécondant.Cette Lumière originelle correspond à celle de Lui-les-Dieux dans les Tables de la Loi du Sépher de Moïse, celle de l’Intelligence Absolue qui contient Tout en contingence d’être, sans pour autant être la moindre partie de ce Tout. Ce Noùs est ce qui précède à toute existence c’est de Lui que provient la Lumière de l’intelligence qui est un des aspects de la Force du Feu qui se manifeste lorsque cette Intelligence s’incarne dans la sagesse ; sagesse qui est l’intelligence en action (mouvement), génératrice d’énergie cinétique (chaleur), ceci nous renvoie à l'étude dans le Grand Œuvre d’Hermès Trismégiste sur les deux éternités.

Le Noùs (prononcer No-us) est la puissance que Fabre d’Olivet qualifie de Divine Providence, celle qui ne s’impose pas et qui se reçoit par adhésion volontaire, comme le manifeste Hermès dans les premiers versets de ce Pymandre du Corpus Hermeticum. Précieuse indication que nous donne cet extrait, Noùs, la Providence, n’est pas la Nature, c’est ce qui existe avant la Nature, avant toute manifestation, avant que les cycles de la sphère temporelle s’enclenchent. Cette Lumière de l’Intelligence de laquelle tout provient, est aussi celle qui contient tout dans un Éternel Moment Présent d’une immuable Vérité Absolue. Ce que nous retrouvons dans le principe du Mentalisme du Kybalion, sujet traité dans le Grand Œuvre d’Hermès Trismégiste.

Le Noùs est ici subtilement qualifié : d’Être qui se suffit à Lui-même. Cette indication si simplement énoncée renferme pourtant un enseignement d’une extraordinaire importance, et d’un occultisme extrême. Celui qui se suffit à Lui-même n’attend donc rien, jamais, de personne, et encore moins de ses créations et de ses créatures. Comme Il se suffit à Lui-même, tout ce qu’Il donne est donc un acte d’Amour Absolu, celui d’une générosité totale qui n’attend rien en retour. Cette information subtile sur l’essence du Noùs, est aussi la réponse à la question que beaucoup se sont posés, et se posent encore à savoir : pourquoi Dieu crée quelque chose plutôt que de se complaire dans cette immuable Vérité Absolue qui est la sienne?... La Réponse nous est donnée par l’indication : qu’il se suffit à Lui-même, la Raison des raisons de cette création est la manifestation de son Amour Absolu, rien d'autre ! Ce rappel d'une réalité précédemment énoncée se justifie tant elle implique de conséquences dans l'élaboration d'une pensée juste en vertus.

En outre, cette précieuse indication nous éclaire très fortement, peut être même trop pour certains esprits ténébreux qui s'en trouveront aveuglés, sur le fait que si le Noùs n’attend rien, jamais de qui ou quoi que ce soit, alors toutes les doctrines, philosophies ou dogmes religieux qui prétendent, parlant au nom d’un « Dieu » de bien médiocre condition, qu’Il attendrait ou exigerait de nous un service, une astreinte, des obligations, ou des servitudes, démontrent par ce genre d’affirmations qu’ils servent un « dieu » despote, qui ne se suffisant pas à Lui-même, attend tant de choses de ses supposées créatures... L’idée que se font ces prosélytes d’un tel « dieu », est tout sauf la plus haute idée qu’il soit possible d’avoir du Divin Créateur. La pensée des zélateurs d’un « dieu » tributaire de ses créatures, est forcément une pensée injuste et qui plus est, peu vertueuse. Ce manque de vertu finit d’ailleurs toujours par des dévoiements de cette chimère qui leur sert de divinité, au point qu’elle manifeste invariablement les vices des créatures qui lui donnent vie au travers d’un monstrueux eggrégore, qui deviendra rapidement ingouvernable par ceux qui lui ont donné naissance, au point de dévorer ses propres enfants.

Ce petit enseignement, d’apparence si banale et si insignifiante, qu’est : il se suffit à Lui-même, nous dit encore une chose d’une très grande importance. Si le Divin Créateur qui par essence est parfait, donne quoi que ce soit à une créature, Il ne lui donne pas au compte-gouttes, en attendant qu’il vienne chercher le reste de ce qui doit le faire devenir la plus haute idée que ce Divin Créateur se fait de lui, en échange de je ne sais trop quoi de pacotille qui ne lui serait d'ailleurs d’aucune utilité... Ce petit commerce médiocre, si contraire au principe de l’Amour Absolu, est celui de quelqu’un qui donne, mais qui attend un retour pour ce don. Ce principe étant rédhibitoire avec l’attribut divin : qu’il se suffit à Lui-même, qu’il en devient antinomique. Alors, il va falloir que nous nous fassions à cette idée nouvelle et révolutionnaire, nous n’avons plus rien à attendre du Noùs, le Divin Créateur, ce qu’il devait nous donner, nous l’avons intégralement reçu, à nous de chercher tous les colis qui renferment l'intégralité de notre dotation, et surtout à nous d’ouvrir tous ses paquets-cadeaux.

Essayons, pour illustrer concrètement ce propos, de prendre un peu de recul sur la situation et imaginons que nous soyons capables (j’ai dit, imaginons, on peut toujours rêver) d’un acte d’Amour Absolu, c’est-à-dire de donner intégralement quelque chose de complet à quelqu’un comme une voiture, et que nous constations, passés quelques jours, qu’il vient sonner à notre porte pour nous dire qu’il faudrait que nous lui donnions des roues ; puis quelques jours encore, et le voilà qu'il vient nous demander un moteur ; puis quelque temps après, la clé de contact... Autant de choses qu’il a déjà reçu, mais que par ignorance, paresse et aveuglement il n’a pas su ou fait l'effort de trouver, nous ferions une drôle de tête et serions en droit de nous interroger, sur les capacités du bénéficiaire à se servir utilement de notre don... C’est ici, analogiquement, la même chose qui doit se produire en haut, lorsque nous formulons en bas des prières ou des invocations, pour réclamer quoi que ce soit à ce Divin Créateur qui se suffit à Lui-même, et qui ne peut pas donner plus que tout... Alors, pour ceux qui ont l’impression qu’il leur manque ce quelque chose qu’ils aimeraient tant avoir, je leur conseille de chercher dans leur dotation de base, ils finiront par trouver par eux-mêmes, ce que le manque de vigilance a dissimulé à leur attention.

La « Mère », la matrice universelle, la nature humide, les ténèbres... Si la Lumière du Noùs est l’expression du Feu de l’intelligence, ce Feu produit invariablement une Nature humide en se manifestant... Par déclinaison simpliste, mais qui permettra de concrétiser cette abstraction, je ferai l'analogie avec ce principe élémentaire de chimie : lorsque l’on mélange un atome d’hydrogène avec deux atomes d’oxygène, c’est le feu qui transforme ces atomes en molécules d’eau... Ceci nous renvoie au verset 9 de ce Corpus Hermeticum et à l’étude de ce dernier dans l’article lui correspondant. La Mère, la Nature est aussi la puissance de cristallisation de la Lumière Divine, que nous avons identifié sous l’appellation du Destin, sa sphère de manifestations organiques et temporelles.

Le « Fils » La Parole Lumineuse, le Logos, le Verbe fécondant... Magnifique de précision ce verset pourtant d’apparence un peu simpliste... La parole lumineuse, si je m’en tiens à la loi de Maât, ne peut venir que d’une pensée parfaitement juste en Vertus, et cette parole devient alors le Verbe Vivant, celui d’un Verbe fécondant, comme nous le retrouvons dans les Tables de la Loi du Sépher de Moïse, par le pouvoir du sceptre reçu par Adam dans sa forme glorieuse, et qui lui permet, par la Magie de son verbe, de donner des Noms aux créatures, et par ces Noms il leur permet de se manifester. Redoutable pouvoir du Mage ayant accédé à la maîtrise de la Haute Magie, dont il est ici beaucoup trop tôt pour en parler davantage.

Ce Fils qu’est cette Parole lumineuse, représente la Conscience et sa faculté volitive. Car pour parvenir à cette Parole Lumineuse, il y faut la pleine Conscience de pratiquer une pensée juste en Vertus, ce qui passe obligatoirement par le parcours du jardin du Bien et du Mal et de ses cycles de perfectibilité, et l’accession à la Connaissance. Tant que celui qui a tout reçu en héritage n’est pas capable d’en maîtriser les mécanismes (facultés), il ne pourra devenir l’expression de la Parole lumineuse, ni celui du Verbe Vivant, mais sera uniquement celui du verbe mort produisant d'une façon frénétique un verbiage creux. Les propos d’une chef d’État ont de plus lourdes conséquences, que ceux d’un simple consommateur du café du commerce, même s'il leur arrive de dire rigoureusement la même chose au même moment...

Nous ne faisons qu’entrer dans le Corpus Hermeticum, et déjà il contient des richesses si luxuriantes pour qui en fait une lecture et une méditation sérieuse, qu’il serait dommage, pour ceux qui ont eu la chance de l’avoir, ne serait-ce qu’une seule fois entre les mains, d'être passé à côté du prodigieux Enseignement qu’il contient.

Celui qui ne prend pas la peine d'ouvrir le paquet-cadeau, ne saura jamais ce qu'il contient réellement... À chacun selon ses mérites !

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