La Magie du Nom.

La Magie du Nom.

Lorsque l'on revient aux principes essentiels que constitue le trope énergie-pensée-forme, ce concept se décline sous des aspects infinis que ce soit dans le tangible ou l'intangible. Ce qui distinguera une énergie-pensée d'une autre avant qu'elle ne se manifeste dans la forme, sera le Nom, comme l'enseignent si lumineusement les Tables de la Loi du Sépher de Moïse, faisant d'Adam, celui qui donne un Nom à toutes les manifestations. Sur le plan de la forme dense, ce qui distinguera une forme d'une autre espèce sera bien évidemment son aspect, mais aussi, et surtout son Nom. Ce Nom sera encore plus important pour distinguer les formes d'une même espèce.

Sur le plan de la Conscience intellectuelle, le Nom, qui a perdu l'essentiel de ses propriétés occultes et spirituelles, reste néanmoins ce qui synthétise la pensée et la forme qu'il désigne.

Petite précision que me paraît ici nécessaire : lorsque je parle d'une pensée, j'évoque une unité ayant sa propre cohérence et se distinguant des autres bien qu'elle soit constituée d'un agglomérat de pensées secondaires et inférieures, mais qui se sont réunies par attraction magnétique vibratoire pour donner corps à cette pensée supérieure. Analogiquement, le phénomène se retrouve sur le plan physique avec l'agrégation des cellules du corps, dont chacune possède sa propre identité, pour constituer un organisme dont la totalité sera toujours supérieure à la somme des éléments qui le composent. Le processus se retrouvera lorsque les individus d'une même espèce constitueront un groupe (association, organisation, fraternité, fédération ; école de pensées, philosophiques ou religieuses) ; ce groupe se distinguera des autres par des caractéristiques variées et nombreuses se retrouvant synthétisées dans le Nom qui le désigne.

Lorsque le Nom est défini par la Conscience du corps intellectuel, il est le fruit d'une réflexion qui tentera de faire correspondre ce Nom, avec les spécificités de la "forme" intellectuelle qu'il ambitionne de désigner. Cette réflexion sera plus ou moins cohérente et/ou inspirée, selon le degré d'évolution de celui qui se charge de donner un Nom. Plus la cohérence sera grande, plus le Nom deviendra un standard du langage commun pour devenir pratiquement un mot usuel désignant une fonction (principe) plutôt qu'une forme spécifique. Le cas de "Frigidaire" est l'exemple type de ce phénomène. Lorsque le Nom n'est pas attribué à une "forme" de manifestation "nouvelle", la Nature qui a horreur du vide fera que mécaniquement cette "forme" portera le Nom de son inventeur ou de son concepteur par exemple : Poubelle ou Sandwich. Dans la sphère de l'intellect raisonneur, les lois de causalité sont souveraines, et les Noms se façonnent selon le mode déductif ou inductif permettant de remonter à la racine causale de leurs conceptions. Une chose, un machin, un truc seront les noms communs servant à désigner ce dont on ignore le Nom et qui nécessitera de longues explications laborieuses pour en définir le contour et les caractéristiques. La "magie" du Nom sur le plan des causalités sera justement de focaliser dans une pensée spécifique les caractéristiques de ce qu'elle est et de ce qu'elle concentre. Prononcer un Nom dans la sphère de causalité ne permettra pas d'en manifester automatiquement la forme, car il faut, pour que la chose soit possible, respecter de nombreuses conditions successives. Je veux une voiture supposera, pour que la forme de cette voiture se manifeste, que le Nom de cette voiture soit prononcé dans l'espace permettant sa manifestation et son transfert de propriété.

La règle des alchimistes qui consiste à toujours suivre la Nature, sera ici un précieux guide nous permettant de procéder du bas vers le haut, toujours selon le principe de l'analogie qui veut que similitude ne veut pas dire identité.

Lorsque le Nom est défini par la Conscience du corps spirituel, dans le cadre bien compris de l'alignement de ce dernier avec les deux autres (le corps physique et intellectuel), ce dernier désignera des "formes" de Puissances plus ou moins grandes dans la Hiérarchie du plan dans lequel elles se situent. Ces Noms seront, comme pour ce qui est en bas, une alchimie mystérieuse des différentes énergies qui composent la pensée que désigne un Nom. Ce Nom sera donné par la Conscience spirituelle soit en fonction de sa forte dépendance au corps intellectuel, il sera alors fortement teinté de raison et de logique ; soit en fonction du développement de sa faculté intuitive capable de lire dans les archives akashiques, et le Nom devient le résultat d'une transe mystique, comme nous pouvons le constater chez les plus éminents occultistes inspirés. Plus le Nom est le fruit de cette transe, plus il acquiert les pouvoirs de Haute Magie qui sont ceux de l'Éternel Moment Présent si différents des pouvoirs des lois de causalité mécaniques de la sphère intellectuelle. Lorsque le Nom est celui d'une transe intuitive, il renferme l'énergie-pensée sous l'aspect le plus épuré, et l'utilisation par la Conscience de ce Nom de pouvoir, revêt les mêmes particularités que celles de l'Adam dans sa forme glorieuse. Nommer dans de telles circonstances fait advenir, avec les conséquences que cela implique et qui peuvent être soit maléfiques, soit bénéfiques selon l'orientation de la Conscience vers l'involution ou l'évolution.

La puissance du Nom dans la Haute Magie est connue depuis la plus haute antiquité. Dans l'ancienne Égypte l'attribution d'un Nom pour un nouveau-né était réservé aux prêtres du Temple, et cela leur demandait une longue étude mystique, astrale et divine pour que le Nom soit celui qui désigne l'enfant, mais aussi les puissances (énergies-pensées) qui s'incarnaient dans cette forme, et seraient cristallisées (focalisées) dans ce Nom de pouvoir pendant toute la durée de la forme. Lorsque l'on prend la peine de comprendre ce processus mystique, il est clair que ces grands prêtres étaient des initiés de très haut rang, car il donnait vie à la forme sans permettre à la pensée qui s'incarnait dans cette forme de devoir subir sa mort. La forme peut ainsi suivre son cycle et disparaître, le Nom dans lequel est concentré l'essence vitale demeure, lui, immortel.

Pour les grands initiés, maître de la Science Hermétique, le Nom de pouvoir est un des paramètres fondamentaux de la Haute Magie, la courte légende du secret du Nom de Râ, me semble révéler toutes les richesses des Connaissances des occultistes de l'ancienne Égypte :

Chaque jour Râ embarquait le matin pour sa course habituelle autour du monde et rentrait douze heures plus tard. A chaque heure où il se trouvait, il réglait les problèmes des hommes; Il ne conservait pour lui-même qu’un seul de ces talismans, le nom que son père et sa mère lui avaient imposé à l’heure de sa naissance, mais il ne devait le révéler à personne.

La vieillesse eut prise sur lui, Isis qui était une simple servante du Pharaon, habile en paroles conçut le projet de lui dérober son secret.

Elle imagina le plus ingénieux des stratagèmes. Lorsqu’un homme ou un Dieu était malade, la seule chance de le guérir était de connaître son nom caché, son nom véritable et d’adjurer en ce nom l’être méchant qui le tourmentait et qui était la cause de sa maladie.

Elle ramassa de la boue imprégnée de la bave divine, la pétrit de ses mains habiles et lui donna la forme d’un serpent sacré, puis elle l’enfouit dans la poussière du chemin et l’anima en récitant sur lui la formule magique qui donne vie aux choses inanimées.

Un matin lors de sa tournée habituelle, Râ fut mordu au talon, il souffrait et eut des convulsions il dit :

- J’ai été piqué par quelque chose qui est entré en moi et que ma main n’a pas créé comme toutes les autres créatures, elle ne ressemble à rien de ce que j’ai fabriqué.

Un à un les dieux essayèrent de le guérir, en vain.

Isis lui dit :

- Je sais ce qui t’arrive, tu as été piqué par un serpent, je peux tuer ton ennemi par des incantations bienfaisantes et je le forcerai à battre en retraite à la vue de tes rayons.

Isis lui offrit ses soins et lui proposa de réciter l’incantation, mais qu’il fallait introduire dans la formule ce nom mystérieux qu’il ne voulait pas dire : « dis-moi ton nom, ô Père divin, car tu sais que les charmes n’opèrent que si j’invoque ton nom secret ».

Râ soupçonna vaguement un pièce, il énuméra complaisamment tous ses titres, tous les noms qu’on lui donne : Khepri le matin, Râ à midi, Toumou le soir ou encore Atoumi.

- J’ai beaucoup de noms, car je suis celui qui a créé le ciel et la terre. Je suis celui qui en ouvrant les yeux produit la lumière.

Isis continua à insister.

- Mon nom secret, mon père et ma mère me l’ont donné, il est caché dans mon corps depuis ma naissance afin que nul ne s’en serve contre moi.

Et pour continuer à tromper Isis il énuméra encore d’autres noms.

Isis ne fut pas dupe, elle essaya les noms que Râ lui avait donné, mais en vain, le venin de la base sacrée continuait à envahir Râ ; la souffrance augmentait sans cesse.

- Aucun nom que tu m’as donné ne te guérit, le charme ne peut agir que si on appelle le malade de son seul, de son vrai nom, dit-elle.

Râ vaincu par la douleur lui dit :

- Mon nom passera de mon corps dans son corps, je consens à ce que tu fouilles en moi, ô mère Isis, que mon nom passe de mon sein dans ton sein.

Elle lui ouvrit la poitrine et son cœur lui livra son secret. Isis connut son nom. Elle prononça la formule correctement en y introduisant le nom véritable de Râ et le venin fut conjuré.

Mais Isis maintenant connaissait le secret de son pouvoir et elle se fit déesse sans tarder.

Lorsque le Nom est le produit de la transe spirituelle la plus profonde, celle qui est capable de lire dans la pensée de Lui-les-Dieux, ou ce qu'il est convenu d'appeler les archives akashiques, il est porteur de puissantes vibrations fécondantes et d'une énergie considérable. Ce Nom devient alors un Nom (Mot) de pouvoir.

Dans de nombreuses traditions animistes, lorsque le sorcier s'empare du Nom d'un individu, cet individu est littéralement condamné à mort. Ici entre en jeu la capacité du sorcier à utiliser un verbe magique qui est celui du Verbe Vivant sans lequel la Haute Magie n'a aucune application pratique.

Connaître les Noms de pouvoir des puissances supérieures, c'est être capable d'entrer en relation avec elles, comme l'indique l'analogie de la légende d'Isis, à la condition que le niveau vibratoire du communicateur soit en phase avec son ou ses correspondants. Isis pouvait s'adresser à Râ car elle était déjà servante habile de Pharaon cette incarnation de la divinité sur terre. Et ce n'est qu'à partir du moment où elle découvrit le véritable Nom de Râ qu'elle devint déesse.

Depuis l'aube de l'humanité, la Connaissance de ces Noms sacrés a été la préoccupation des sages et des grands prêtres gardiens des secrets les plus occultes. Certains de ces Noms nous sont parvenus, pour l'essentiel, volontairement voilés pour ne pas tomber entre les mains des profanes ou des adeptes de la "magie noire" ces fameux frères des ténèbres des Tablettes de Thoth. Il est possible, pendant la méditation, de recevoir certains de ces précieux Noms, mais ils sont en général très peu nombreux, sauf pour des initiés en période terminale. C'est pour cette raison qu'il appartient à l'aspirant à la Haute Magie, d'entreprendre les études nécessaires qui lui permettront de recevoir les Noms sacrés venant des antiques écoles de sagesse, qu'il pourra utiliser lorsqu'il en aura découvert la vérité profonde et qu'il maîtrisera le Verbe Vivant.

Les Tables de la Loi du Sépher de Moïse, sont à cet égard un précieux recueil de Noms sacrés. Les premiers chapitres de la Genèse sont constitués d'une longue et fastidieuse suite de Noms, mais pour l'initié, chacun de ces Noms est un véritable Nom de pouvoir dont l'enseignement a été volontairement voilé pour en préserver la profanation. La Connaissance de la Science Hermétique, permet d'accéder aux véritables Noms sacrés et leurs puissants et redoutables mystères. La légende des Noms de Râ que je rapporte ci-dessus est riche d'informations considérables pour permettre le dévoilement de ces mystères, mais celle d'Adam qui dans sa forme glorieuse exerçant le pouvoir de nommer, et par là de donner vie à ce qu'il nomme, est une approche encore plus subtile et plus précise quant aux potentiels de nos facultés supérieures. En donnant Nom à tout ce qui vie, Adam se révèle être un puissant Mage et l'Initié du plus haut grade.

Comme je l'indique dans mes commentaires sur ce sujet dans la Véritable Histoire d'Adam et Eve enfin dévoilée, lorsqu'Adam exerce son pouvoir, il est nécessairement au plus haut niveau d'initiation et de Connaissance qu'il soit possible d'atteindre. Il est le grand Maître par excellence, le grand Hiérophante ayant la faculté d'émettre le verbe le plus juste qui soit, celui qui donne vie et qui est nécessairement celui d'une pensée juste en vertus. Cette pensée juste en Vertus permet de concentrer dans ce Verbe vivant les énergies créatrices qui se manifesteront par la simple expression du Nom, véritable exercice de Haute Magie et du pouvoir du Logos.

Nous retrouvons ces principes dans la tradition orientale et le culte du MOT sacré, qu'il convient d'apprendre à prononcer selon un rythme et une tonalité particulière pour lui permettre de retrouver les propriétés du Verbe Vivant. La psalmodie de mantras n'a pas d'autre but que d'entraîner l'impétrant à se mettre en état d'atteindre la puissance vibratoire que requiert la pratique du Verbe Vivant.