Etoile Flamboyante 7

Livre de l’Étoile Flamboyante, question : 10

— D .10. Quelles qualités doivent avoir les scrutateurs de la nature ?

Livre de l’Étoile Flamboyante, réponse : 10

Ils doivent être tels que la nature elle-même, c’est à dire, vrais, simples, patients et constants ; ce sont les caractères essentiels, qui distinguent les bons Maçons, et lorsque l’on inspire déjà ces sentiments aux candidats dans les premières initiations, on les prépare d’avance à l’acquis des qualités nécessaires pour la classe philosophique.

La question que pose l'impétrant, se résume en réalité à savoir quelles sont les qualités intellectuelles et spirituelles que doit avoir la Conscience qui s'éveille à la Nature, que ce soit sur le plan tangible ou intangible. Cette question est aussi vaste que celle du jeune enfant qui demanderait à un ingénieur, spécialiste de la chose, comment fonctionne une centrale nucléaire?...

Ceci nous renvoie inévitablement au précédent article sur ce sujet dans le Grand-Oeuvre d'Hermès Trismégiste. De la qualité de la question découlera la qualité de la réponse ; la précision de la question produira une réponse de même nature.

Remarquons ici l'habilité de l'instructeur et sa maîtrise, lorsqu'au lieu de s'engager dans des explications riches, complexes, dépassant considérablement les facultés d'entendement de son interlocuteur, - comme il est aisé de le déduire de la rusticité de ses questions - , choisit de délivrer sa réponse sous une forme certes lapidaire, mais contenant des graines que pourra faire germer par sa réflexion et sa méditation le demandeur, pour peu qu'il en fasse l'effort, et qui produiront les ramifications et arborescences menant à de nombreuses révélations. Commençons la germination de ces graines, qu'il appartiendra aux lecteurs du présent article de poursuivre plus avant :

Ils doivent être tels que la nature elle-même... Ce principe ne fait que reprendre cet axiome du Corpus Herméticum qui veut, que : seul le semblable connaît le semblable. La Nature manifeste dans ses formes infinies ; par formes, nous devons entendre celles épaisses accessibles aux cinq sens organiques comme le sont, la couleur, le goût, l'odeur et la structure géométrique dense que révèle le toucher. Mais aussi les formes subtiles perceptibles par les sens supérieurs, comme les vibrations et le magnétisme de toute chose, les formes des groupes constitués, leur appétence à être ce qu'ils sont et pas autre chose, les effluves qui émaneront de leurs manifestations, et les formes intellectuelles ou spirituelles que ces groupes constitueront. Ce principe implique en outre que la Conscience qui veut scruter cette Nature soit capable d'en pénétrer les mystères en allant à la source de cette énergie protéiforme qui n'est pas autre chose que l'Esprit. Pour résumer schématiquement ce concept abstrait, une pierre comprendra la pierre, un végétal un autre végétal, un animal son ou ses semblables, un être humain les membres de sa famille, ses proches, ses compatriotes (déjà avec beaucoup moins de rigueur et de précision), ceux qui partagent ses convictions politiques, sociales, culturelles ou religieuses ; d'une façon nettement plus diffuse, sa race ou l'espèce à laquelle il appartient. Mais pour véritablement scruter et comprendre la Nature dans son ensemble de formes, de matériaux, d'espèces de genres et de manifestations, seul ce qui est commun à toutes les productions de cette Nature permettra à l'observateur de l'appréhender dans son intégralité, et ce dénominateur commun est la Conscience. Nous retrouvons dans le verset 28, de la Genèse des Tables de la Loi du Sépher de Moïse, ce principe intemporel qui fait régner la Conscience, cet Adam androgyne du 6ème jour :

28 °) Et-il-bénit l’existence-universelle-à-eux, Lui-les-Dieux, et-il-dit-à-eux: engendrez et-multipliez et-remplissez la-terre et-captivez-la, et-tenez-le-gouvernail (régnez) dans-le-poisson des-mers, et-dans-l’oiseau des-cieux, et-dans-toute-chose mouvante-d’un-mouvement-vital sur-la-terre.

La Conscience ne reçoit pas le pouvoir de régner sur les créatures, ce qui impliquerait que ces créatures soit d'essence différente et incompatible de celle qui constitue cette Conscience, mais bien de régner DANS chacune de ces créatures et créations, dont elles ne deviennent dans leurs formes manifestées que l'expression d'un état sa propre évolution. Le début de la réponse de l'instructeur de cette Étoile Flamboyante nous révèle son extrême rigueur et la parfaite maîtrise de son sujet, qui n’est ici rien d'autre que l'enseignement le plus universel qui soit. La Nature n'est pas différente dans son essence que celle qui constitue le scrutateur, et ce n'est que lorsque ce scrutateur parviendra à en prendre Conscience qu'il pourra espérer en découvrir les mystères qui resteront insondables pour les Consciences en état d'hétérogénéité. Car, et c'est encore une des subtilités qu'il est possible d'extraire de ce qu'enseigne notre instructeur, à l'image du Corpus Herméticum, pour que le semblable connaisse le semblable il faut qu'il soit homogène. Cette homogénéité ne pouvant s'obtenir par la diversité des formes manifestées, elle ne s'obtient que par alignement vibratoire sur le dénominateur commun qui ne peut pas être autre chose que la Conscience. Lorsque je dis alignement vibratoire je souligne qu'il ne suffit pas d'avoir une Conscience pour automatiquement être en capacité de scrutateur éclairé, mais qu'il faut avoir un état d'évolution de cette Conscience capable de s'aligner sur celui grandiose et lumineux de cette Nature... Il y a loin de la coupe aux lèvres comme le précisent les indications suivantes.

... c’est à dire, vrais, simples, patients et constants... Voilà ici énoncées dans une grande simplicité, comme il sied au sommet de la perfection, les qualités requises pour que cette Conscience observatrice puisse découvrir les mystères de la Nature. Il faut être vrais. Difficile, voire très difficile que cette quête de la vérité la plus juste. Car il ne s'agit pas ici de prétendre à la Vérité Absolue, celle qui est l'attribut unique du Divin Créateur, mais de cette vérité relative qui se hiérarchise selon les échelons qui vont du moins universel au plus universel. Ce que j'ai traduit dans une de mes petites Clavicules de la Sapience par : la vérité des fourmis n'est pas celle des éléphants et inversement. Il y a des vérités pour chaque forme manifestée, chaque nature, chaque espèce, et chaque individu à l'intérieur de ces groupes d'espèces. Voilà qui complique singulièrement la tâche. Être vrai c'est être vrai dans sa forme physique, la grenouille ne peut pas devenir un boeuf, même en pratiquant une boulimie névrotique. Être vrai dans sa forme intellectuelle, connaître ses limites, mais aussi ses capacités et les exercer pleinement sans succomber aux pièges des apparences, des faux semblants, des aberrations d'une raison stérile. Être vrai dans sa forme spirituelle, qui implique un très haut niveau de Connaissance, ce savoir longuement éprouvé dans une pratique volontaire et exigeante. Cette quête de la vérité la plus harmonieuse, cohérente et universelle à laquelle le scrutateur doit parvenir, autant qu'il lui soit possible, est la condition lui permettant d'espérer la plus large amplitude de compréhension de cette Nature.

Il doit être simple... Redoutable cette caractéristique pour ceux qui reçoivent les mots comme des coffres fermés et qui ne font pas l'effort d'ouvrir ces coffres. Qu'est-ce que cette simplicité, qu'il convient de ne pas confondre avec le simplisme. Ce que la première est à la sophistication la plus haute, le deuxième l'est à l'indigence la plus médiocre. En science physique il est d'usage de dire qu'une formule pour qu'elle soit efficace doit être simple et belle. Nous retrouvons dans tous les grands enseignements occultes, des expressions de cette simplicité, dans des axiomes devenus pratiquement universels comme ceux de la Table d'Émeraude : ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas. Ou encore comme ceux des Tablettes de Thoth : celui qui veut que : connaître les lois c'est être libre. Ceux du Corpus Herméticum comme celui précédemment cité. Mais les plus puissants dans leur simplicité reste, de mon humble avis, ceux des Tables de la Loi du Sépher de Moïse dont le célèbre : et-vous-serez tels-que Lui-les-Dieux, connaissant-le-Bien-et-le Mal... La simplicité est inséparable de la Connaissance (ce qui est le plus vrai) et de cette autre éminente qualité et vertu qu'est l'humilité. Dans la graine que donne notre instructeur, il y a les ramifications et les arborescences les plus luxuriantes de la sagesse. Pour se hisser au niveau vibratoire de la Nature il faut parvenir à une certaine grandeur de Conscience et d'âme, et il n'y a jamais de grandeur en dehors de l'humilité, cette vertu qui ramène toujours à l'essence des choses dans leur plus grande vérité et simplicité.

Il faut aussi, et concomitamment, être patient et constant... Voilà qui invite l'aspirant scrutateur à l'ouvrage et pas n'importe quel ouvrage. Celui dont il est ici question n'est rien d'autre que ce qui est à la base du Grand-Oeuvre de nos alchimistes. Croire que cela soit possible par l'inconstance, la frivolité, la paresse, la futilité, l'inconsistance ou la vacuité, c'est manifestement suivre la voie la moins vraie. Croire que tout est accessible, surtout en matière de Connaissance des choses essentielles, c'est n'avoir qu'une Conscience faiblement en éveil et surtout en état profond d'ignorance. Je pense qu'après mes précédents articles sur les différents sujets, il n'est pas nécessaire d'en rajouter concernant ces deux caractéristiques.

... ce sont les caractères essentiels, qui distinguent les bons Maçons... Notre guide après avoir résumé simplement et de façon très efficace les caractéristiques qu'il convient d'avoir pour espérer être ce scrutateur de la Nature, distingue par là le bon du mauvais Maçon (l'oeuvrant du grand œuvre). Cette distinction ne repose que sur ce qui permet à la Conscience de produire des pensées justes en vertus, ceci implique nécessairement l'exercice volontaire patient et constant de ces vertus. La suite de l'extrait en exergue de cet article confirme et précise cette ardente obligation.

... et lorsque l’on inspire déjà ces sentiments aux candidats dans les premières initiations, on les prépare d’avance à l’acquis des qualités nécessaires pour la classe philosophique... La réponse que délivre l'instructeur à l'impétrant est probablement, compte tenu du manque de qualité et de précision de sa question, l'une des plus simples, équilibrée, précise et juste qu'il puisse délivrer. Elle nécessite pour être pleinement comprise, les mêmes qualités qu'il faudra au scrutateur de la Nature : Connaissance, simplicité, humilité, travail, courage, constance, volonté, mais aussi absence de frivolité en effectuant l'effort de réflexion et de méditation qu'il doit faire en recevant la réponse pour que celle-ci vienne enrichir ses connaissances après qu'il ait pris le soin de l'éprouver sérieusement. C'est ainsi que l'oeuvre et l'oeuvrant (l'élève et le maître) s'enrichissent mutuellement.

Pour terminer provisoirement cet article, je reprendrai un extrait des notes du carnet du Rémora, qui par analogie, complète la réponse de cette question N°10 :

L’enseignement de la Haute Magie repose sur le fondement essentiel que l’étudiant saura distinguer des différentes mesures de la vérité. Plus une vérité est universelle, plus elle revêt une forme ésotérique et hermétique, et inversement. La perception et la profonde compréhension d’un enseignement occulte sont concomitantes avec l’accroissement de la responsabilité sur le plan exotérique. S’engager dans cette étude, requiert donc une continuelle interaction entre l’enseignement et l’application que sera capable de pratiquer l’étudiant dans les moindres aspects de sa vie quotidienne, en insérant cette part de vérité perçue par lui, dans la résolution des problèmes de la vie ordinaire.