Nous n'irons plus au bois

Nous n'irons plus au bois, mon amour,

Plus jamais;

Le bois, que nous aimions, a succombé vaincu.

Trituré, avalé par des lèvres goulues gonflées de sang d'acier;

Glaciales et grimaçantes bouches aux dents aiguisées

Déchiquetant les peaux vertes et tendres,

Les bruns chauds et dorés d'une sève frémissante.

Leur appétit vorace a la saveur de mort.

La gluante noirceur de cette plaie béante

Colle aux ailes des oiseaux qui pleurent en silence

L'arrogant saccage,

La violation de ce bois jusqu'alors leur pays,

Pour faire pousser le fer, le béton et le verre.

Face aux écrans complices

Des abeilles s'activent, cupides destructrices

Et érigent avec science des ruches paradis:

Gigantesques tours à l'ambiance contrôlée.

S'échappant de tuyaux métalliques

Des jets de vent pulsé se répandront

Sur des arbres musicaux au feuillage de plastique

Atmosphère aux parfums de pureté synthétique.

Pour une qualité de vie assurée, disent les publicités

Structures de mascarade au slogan mensonger

Chefs-d'œuvre artificiels, orgueil de ces abeilles!

Marybé 1998