C'est dimanche aujourd'hui...

Paul Jean Toulet a écrit : "C'est dimanche aujourd'hui. L'air est couleur du miel"

Directives : inventer une suite à votre façon, en prose ou en vers, comme il vous plaira.

Texte placé sur les Impromptus littéraires

C'est dimanche aujourd'hui. L'air est couleur du miel et frôle de son haleine sucrée les impatientes, géraniums et bégonias qui habillent joliment le patio. Pieds nus, vêtue d'une ample robe bariolée qui lui caresse les chevilles, une tartine copieusement beurrée à la main, Marine savoure ce moment de grâce dominicale. Rien ne presse puisque les tâches professionnelles ont eu l'excellente idée de faire relâche. Au rythme trépidant qui lui imposent les jours de la semaine, à cette agitation humaine succède une solitude bienfaisante tant pour le corps que pour l'âme. Pas de projet précis pour tisser le fil des heures. Pas la plus petite obligation, sinon celle de profiter à fond de cette journée de repos bien mérité. Évidemment, vu qu'une tartine se doit d'être mariée à un bol de café, tout en sifflotant l'air de la chansonnette «le travail c'est la santé, ne rien faire c'est la conserver», Marine se rend d'un pas léger dans la cuisine. Un petit tour de robinet et voilà l'eau qui s'échappe en émettant un joyeux roucoulement quand soudainement une sonnerie vient rompre la magie de l'instant. Qui donc peut m'appeler à cette heure matinale ? Ce doit être Malya, pense-t-elle. Il est vrai que sa copine vit des moments particulièrement difficiles et ressent fréquemment le besoin d'en parler. Exposer ses problèmes de vive voix, cela permet de les apprivoiser et parfois même de les régler. Et, Malya sait, que peu importe le jour ou l'heure, Marine est toujours prête à l'écouter. Depuis près de 20 années que durent leur amitié, cela a toujours fonctionné ainsi. Bien sûr cela s'applique des deux côtés. C'est un échange de bons procédés. Une œillade à l'écran du précieux afficheur, Marine constate qu'elle ne s'est pas trompée. Alors, décrochant prestement le combiné, ne laissant pas le temps à Malya de placer le moindre mot, Marine lance sur un ton rempli de chaleureuse vivacité: «Allo ! Malyamia ça va ? Écoute-moi : que dirais-tu de venir jusqu'ici ? Tiens, on se fera une p'tite bouffe sympa ? Allez amène-toi, Quérida, je t'attends...».

C'est dimanche aujourd'hui. L'air est couleur du miel. L'air est couleur du miel d'une précieuse amitié.

Marybé - janvier 2010