Indochine
1945-1968
1945-1968
Souvenirs :
"Je suis arrivé en février 1946 à Saigon en JU 52, il y en avait six qui sont arrivées en formation au-dessus de la ville. On a mis six jours pour faire Paris - Saigon, à 170-180 km/h. C'était fatigant, surtout à cause du moteur central du JU 52, des vibrations et de l'absence complète de capitonnage. C'était un avion qui datait tout de même des années 1928-1929. On était six passagers et trois pour l'équipage.
Les JU 52 étaient affectés au groupe Béarn, qui se trouvait sur l'aérodrome de Biên Hoà."
Jean FRAYSSE, de Paris à Saigon, février 1946.
"Ma première mission a été d'installer à Haiphong un radiophare arrivé en mauvais état : des émetteurs de 1400 watts dont il fallait redresser la structure avant de l'installer. Il fallait ensuite monter les pylônes et les antennes avec très peu d'outillage. La main d’œuvre locale avait pour seul outil de longues perches de bambou. Ce radiophare était stratégique pour les missions aéronautiques, notamment militaires vers le Nord.
J'ai réussi à faire fonctionner ce radiophare, le premier de ma vie de technicien. Il m'a fallu fabriquer une télécommande afin de l'actionner depuis de la tour de contrôle car il était installé à 10 km de l'aérodrome, dans une zone dangereuse. Il était gardé par des militaires d'origine sénégalaise. L'opération a duré presque un an.
Nommé chef de station à Saigon, j'ai du installer de nouveaux émetteurs HF Sadir d'un kW pour les liaisons air-sol et les liaisons point à point.
Il existait un émetteur LMT de 1500 W à 10 fréquences, des émetteurs américains Collins à 10 fréquences pour les liaisons avec PARIS ainsi que de petits émetteurs HF/type BC 610 de 200 et 400 W qu'il a fallu monter en 'push-pull' afin qu'ils soient performants pour assurer les liaisons air-sol nuit et jour.
J'ai rencontré des difficultés de mise au point de ce matériel Sadir qui avait quelques défauts, à savoir :
problème de stabilité de la fréquence (rayonnement d'une harmonique non désirable);
alimentation difficile à faire fonctionner à 2500 V. Le montage de 6 diodes était tel (montage en exaphasé) qu'un seul tube en court-circuit entraînait la destruction des cinq autres. Il a fallu faire un montage de sauvegarde par insertion d'un fusible sur le circuit de chaque valve pour éliminer cet inconvénient et remplacer les diodes d'origine à vapeur de mercure par d'autres diodes d'origine américaine;
difficulté pour évacuer les calories. Dans la salle où se trouvait les émetteurs on atteignait des températures élevées malgré la présence de ventilateurs. Certains éléments des circuits supports isolants supportaient mal ces températures excessives. Il fallait donc faire une maintenance systématique sur ces émetteurs qui n'étaient pas spécifiquement étudiés pour fonctionner dans les pays chauds et humides.
J'ai formé des techniciens vietnamiens recrutés localement. Les liaisons point à point se faisaient toujours en télégraphie. Les antenne delta ont été installées car on ne pouvait installer les antenne losange type Rhombic faute de surfaces disponibles.
J'ai quitté l'Indochine début 1954 pour continuer ma carrière en Afrique, successivement à Brazzaville, Libreville, Fort-Lamy et en RCA jusqu'en 1965 où j'ai poursuivi ma mission d'installateur avec le SNA puis avec l'ASECNA : un VOR type Wilcox à Brazzaville en 1955, un VOR Thomson à Bangui au centre de réception de Maya-Maya, puis un radiophare à Fort-Lamy, etc.
J'ai gardé un bon souvenir de cette période, difficile mais au cours de laquelle j'ai beaucoup appris car il fallait à tout prix assurer la sécurité du transport aérien ainsi que celle des autres liaisons, en particulier militaires."
Jacques VEDEL, né en 1928, technicien recruté en 1949 après concours à l'ENAC, Ecole Nationale de l'Aviation Civile à Orly, électricien de formation, a été affecté en Indochine en septembre 1950.