Présentation

Présentation Nakasendô/Kisokaidô

Nakasendô ou Kisokaidô ?

Le nom officiel de la route, et celui qui est utilisé par les japonais est Nakasendô (route entre les montagnes), mais le nom de Kisokaidô (route de la rivière Kiso) est aussi utilisé, car la partie centrale de l’itinéraire reprend une vieille route appelée Kisoji qui suit la rivière Kiso dont elle emprunte le tracé. C’est aussi ce nom de Kisokaidô qui a été choisi pour la première série d’estampes dépeignant la route sur la totalité de son tracé, série qui sert de fil d’Ariane à ce site.

Au cours de la période Edo, quand on a réuni plusieurs tronçons de routes anciennes, le nom est devenu Nakasendō. Il pouvait être écrit de deux manières, 中山道 et 中仙道, (même prononciation) mais le Shogunat Tokugawa finit par fixer 中山道 comme nom officiel en 1716.

Dans les cartes géographiques japonaises ou les panneaux routiers, seul le nom de Nakasendô apparait, mais en Occident, du fait de la popularité de ces estampes et de Hiroshige, c’est le nom de Kisokaidô qui est le plus connu.

Les routes japonaises sont mesurées en "ri" (里) qui équivaut à 3927m, lui-même divisé en 36 "Cho" (町) de 109.1m. La route Nakasendo fait 135 ri et 34 cho, soit 534km. Des bornes appelées ichiri tsuka (一里塚) étaient placées tous les "Ri" et certaines sont encore présentes, comme ici la borne près de Hosokute (étape 48).

Historique

Après sa victoire lors de la bataille de Sekigahara en octobre 1600 (voir étape 58 and page suivante), Tokugawa Ieyasu unifia le Japon et fut nommé Shogun (généralissime), détenteur du pouvoir exécutif. Le Japon était alors organisé en système féodal avec les seigneurs (daimyo), chefs de clan (Han) et maitres de leur domaine ou fief, prêtant allegiance au Shogun. Pour s’assurer de leur fidélité, le système de résidence alternée (sankin-kotai) fut instauré : Le seigneur devait passer plusieurs mois par an à la capitale (Edo, maintenant Tokyo) et ensuite dans leurs domaines, tout en laissant sa famille à Edo comme otages. Les dépenses nécessaires pour avoir une résidence digne de leur rang à Edo et dans leurs terres, l’entretien du domaine et les voyages incessants les empêchaient de pouvoir financer des rebellions. Mais ces processions incessantes rendirent nécessaires la construction de routes, d’auberges et de logements et favorisèrent l’activité économique.

Avec des centaines de seigneurs (il y avait environ 250 clans) se déplaçant chaque année en grand équipage, ces processions (daimyo goretsu) étaient quotidiennes à Edo et les routes étaient encombrées. Ces routes étaient étroites, de façon à rendre difficile le déplacement d’armées. Des étapes furent crées avec des relais. Le relais principal ou honjin (本陣) était réservés aux seigneurs et autres officiels, des relais annexes ou waki-honjin (脇本陣) étaient eux réservés aux officiers et personnages de moindre importance. Des auberges (hatago 旅籠), restaurants, tavernes, entrepôts de grossistes (Toiyaba 問屋) et maisons closes faisaient aussi partie de l’étape. Quatre barrières de contrôle ou seki (関) étaient stratégiquement placées le long du parcours: La barrière d'Usui (Usui-no-seki à l'étape Sakamoto No.17), la barrière de Fukushima (Fukushima-no-eki à l'étape Fukushima No.37), la barrière de Fuwa (Fuwa-no-seki à l'étape Sekigahara No.58) et la barrière d'Ausaka (Entre Otsu et Kyoto à l'étape Otsu No.69).

Gokaido ou les 5 routes principales

Tokaidô (東海道 route de la mer de l’Est) créée en 1624, longeait la cote et reliait Edo à Kyoto, lieu de résidence de l’empereur et siège du pouvoir spirituel. Elle est longue de 480 km et comprend 53 étapes. C’est encore aujourd’hui la route principale du Japon moderne.

Nikkokaidô (日光道 route vers Nikko), créée en 1636 reliait Edo à Nikko vers le nord, sanctuaire et lieu de sépulture de la famille Tokugawa. Elle comprend 21 étapes.

Oshukaidô (奥州道): Créée en 1646, reliait Edo à Shirakawa vers le nord-est et comprend 27 étapes, les 17 premières étapes étant communes avec la route Nikkokaidô.

Nakasendô (中山道 route entre les montagnes) (ou Kisokaido route le long de la (rivière) Kiso), créée en 1694, reliait aussi Edo à Kyoto, mais passait par les montagnes de l’intérieur. Difficile en hiver, son tracé était plus accidenté que celui du Tokaido, mais comprenait peu de gué, pas de traversée en mer et était plus agréable, notamment pendant les chaleurs estivales. Elle est longue de 540km et comprend 69 étapes.

Koshukaidô (甲州道), créée en 1772 reliait Edo à Kofu dans les montagnes de l’est et rejoignait le Naksasendo à Shimosuwa. Elle comprend 44 étapes.


Les routes du Tokaido et du Nakasendo, toutes deux reliant Edo à Kyoto étaient les routes les plus fréquentées. La route du Tokaidô est plate et parallèle à la cote du Pacifique. Mais elle comprend la traversée de douze rivières, du lac Hamana-ko et de la baie d’Ise. Malgré ces traversées et les longues attentes aux ferries, cette route était la préférée du fait de son climat doux. A l’inverse la route du Nakasendô et surtout la partie Kisoji qui passe par les montagnes avec ses vallées profondes et ses falaises était froide, même à la fin du printemps et dès le début de l’automne. C’était cependant la route prise plutôt par la noblesse et les seigneurs. Le voyage le plus célèbre est sans doute celui de la princesse Kazu-no-Miya qui alla à Tokyo se marier avec le quatorzième Shogun en 1862. Sa suite se composait de 25 000 hommes qui bloquèrent les cols et autres passages difficiles pendant plusieurs semaines.

Numérotation des étapes

Il y a 2 méthodes de numérotation des étapes: En comptant le point de départ comme une étape ou non. J'ai choisi de considérer Nihonbashi comme point de départ et ai attribué le No.1 à la station suivante de Itabashi.

Ce choix ne correspond pas à la numérotation des estampes de la série du Kisokaido, mais il m'a paru plus logique en se mettant dans l'esprit randonnée. Mais beaucoup de sources ont fait l'autre choix de numéroter Nihonbashi comme No.1, ce qui explique les différences que vous pourrez trouver.

Une page spéciale dédiée à la Bataille de Sekigahara a été rajoutée entre les étapes 58 et 59

Structure des étapes: Toiya, honjin, waki-honjin et hatago-ya

Les étapes étaient à l'origine fondées pour accueillir les seigneurs (daimyo) en route vers Edo, assurer les communications et faciliter les déplacement des fonctionnaires du shogunat. Toutes avaient un relais de poste-entrepôt s'occupant des chevaux, louant des palanquins et s'assurant que les bagages étaient acheminés à la prochaine étape. Les responsables du toiya étaient vêtus d'une veste trois-quarts, d'une sorte de pantalon et avaient le droit de porter l'épée. Ils devaient s'assurer que tous les besoins du seigneur étaient remplis et pouvaient appeler les paysans locaux en corvée.

Les honjin (本陣) ou relais officiels étaient initialement des lieux d'où les généraux dirigeaient les batailles qu'ils menaient ; il s'agissait donc par essence de structures temporaires. Ensuite ces honjin en vinrent à évoluer vers des lieux où les seigneurs ou daimyo et les autres représentants du shogun étaient autorisés à séjourner durant leurs voyages. Beaucoup de honjin étaient de fait les résidences personnelles de chefs de village ou de ville et avaient des portails imposants que l'on peut parfois voir encore aujourd'hui. En tant que tels, ils accueillaient les envoyés officiels du gouvernement, et développèrent leurs résidences en conséquence. En reconnaissance de leur coopération, les propriétaires de honjin bénéficièrent également de privilèges spéciaux. Les voyageurs ordinaires n'étaient pas autorisés à séjourner dans les honjin, et ceci, quelle que soit leur situation de fortune.

Les Waki-honjin (脇本陣) ou relais secondaires ou annexes étaient eux réservés à l'entourage du seigneur et aux officiers de leur escorte.

Honjin de Wada (étape 28)

Waki-honjin d'Okute (étape 47)

Hatago de Narai (étape 34)

Les voyageurs ordinaires descendaient dans des auberges ou hatago-ya (旅籠) qui avaient des chambres et servaient les repas. Il y en avait deux types: les meshimori hatago où les serveuses étaient aussi prostituées. A l'origine, seules deux auberges par étape pouvaient offrir ce service, mais cette limite n'a jamais été vraiment respectée. Il y avait d'autre part les hira-hatago qui recevaient les femmes, les couples et les prêtres. Les deux types d'auberges employaient souvent des "tome-onna", des femmes qui attiraient ou même parfois tiraient de force les voyageurs dans leurs établissements.

L'entrée des villages étapes avaient généralement une ou deux grandes lampes en pierre (voir à Fukaya, 9ème étape). Une structure en bois kosatsu (高札) était érigée comme panneau d'affichage officiel et quelques uns sont encore en place comme à Tsumago (étape 42)

Il y avait des barrières de contrôle en plusieurs points de la route. A ces barrières ou seki (関), les voyageurs devaient s’arrêter et montrer leurs papiers et autorisations de voyage. Elles devaient aussi protéger le shogunat et contrôlaient les armes à feu et surtout devaient empêcher que les femmes et filles des seigneurs retenues otage à Edo ne puissent revenir dans leur fief. Le passage de femmes étaient donc découragé et des contrôles physiques avaient lieu. Dans la région du Kiso, les barrières servaient aussi à contrôler le transport du bois, la principale richesse de la région et très surveillé par le clan Owari. La barrière la mieux conservée de la route Nakasendo est à Fukushima (étape 37)

Lanterne d'entrée d'étape à Fukaya (étape 9)

Panneau d'affichage à Tsumago (étape 42)

Barrière de Fukushima (étape 37)

Et aujourd’hui ?

En 1868, le shogunat fut aboli et l’empereur Meiji prit le pouvoir, modernisant le pays. L’arrivée du chemin de fer initia le déclin des routes qui furent ensuite remplacées par le système de routes nationales et autoroutes. La plus grande partie du tracé originale est donc toujours en activité, mais avec des routes modernes et peu de traces de la période Edo. Il reste cependant quelques tronçons qui ont été restaurés, des étapes qui ont gardé beaucoup de bâtiments anciens et des auberges encore en activité. D’autres étapes ont disparu victimes de catastrophes naturelles (éruptions, tremblements de terre), d’incendie ou tout simplement de la modernisation.

Le secteur le mieux préservé (et que je vous encourage à parcourir si vous avez quelques jours au Japon) est entre les étapes 42 Tsumago (Nagano) et 43 Magome (Gifu). D'autres villages ont encore le honjin et autres batiments des 18ème ou 19ème siècles, notamment les honjin de Okegawa, Wada, Shimosuwa et Ota ou les hatago (auberges) de Ashida, Narai, Yabuhara, Hosokute ou Tarui. Je m'efforcerai de les signaler dans les pages individuelles des étapes.

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