Kisokaidô: Suhara - Etape 39

須原

Utagawa Hiroshige - Série des 69 étapes du Kisokaido: Etape Suhara (40ème estampe) (Suhara)

© Trustees of the British Museum

Une pluie torrentielle s’abat et plusieurs voyageurs trouvent refuge dans un abri, sans doute dans l’enceinte du grand temple Josho-ji, au sud de l’étape Suhara. De telles pluies sont fréquentes en été lorsque les masses d’air chaud de la côte remontent et rencontrent l’air frais des montagnes. Parmi les voyageurs, nous voyons deux moines itinérants, leurs visages cachés par leurs grands chapeaux en osier. L’un d’eux prie face au mur (1), l’autre est assis (2), les jambes croisées attendant que cesse la pluie. Un pèlerin (3), sans doute en route vers le Mt.Ontake, écrit un graffiti sur un des piliers et un porteur (4) avec un sac dans le dos est accroupi devant l’entrée. Deux hommes (5) courent vers l’abri, essayant de se protéger avec un bout de paille tressée. Au fond, un cavalier et un piéton, eux aussi protégés par de la paille, continuent sous la pluie. Les estampes de pluie avec les gens qui s’abritent permettaient de peindre des personnages de milieux différents qui ne se seraient pas adressés la parole ou même rencontrés. Hanabusa Itcho (1652-1724) fut le premier artiste à représenter les scènes de vie typiques avec les marchants et les petites gens dans un style proche de la caricature. Il était très en vogue à la fin 18ème et début 19ème et fut copié par Utamaro, puis Hokusai et Hiroshige. Son influence est très nette dans ce genre d’estampes. Ci-dessous, un paravent (au Musée Miho) montrant des personnages de tout milieux s’abritant sous l’avant toit d’un temple. D’après Sebastian Izzard, l’estampe de Hiroshige est directement inspirée par une illustration Amayadori (A l’abri de la pluie) d’un volume Itcho gafu (Les dessins de Itcho) publié par Suzuki Rinsho vers 1770 (voir ci-contre), elle-même une reprise d’un de ses paravents (ci-dessous). Les premières éditions de cette estampe furent imprimées dans des couleurs foncées pour renforcer le déchainement des éléments avec la pluie imprimée en blanc. Mais le pigment blanc utilisé était à base de plomb et noircit rapidement comme ci-dessus. Les éditions suivantes ont une palette de couleurs plus claires, mais avec la pluie imprimée en noir.

Amayadori dans Itcho Gafu, anthologie des dessins de Hanabusa Itcho, publié par Suzuki Rinsho en 1770

© Trustees of the British Museum

Hanabusa Itcho - Paravent Amayadori (Musée Miho)

Hanabusa Itcho - Détail du Paravent Amayadori (Musée Miho)

Kawase Hasui - Suhara (1925)

Le centre de Suhara en 1895

Suhara en 2010

La vallée de la rivière Kiso près de Suhara

Et maintenant ?

Suhara est un village assez bien conservé avec des bâtiments anciens, le waki-honjin, des brasseries de saké et de beaux temples. Il est tout en longueur, coincé entre la montagne et la rivière et a été inondé à de nombreuses reprises. La crue de 1715 a pratiquement détruit le village qui a ensuite été reconstruit un peu plus haut. Il y avait 24 auberges en 1843 et certaines sont toujours actives. Dans le village, le temple Josho-ji fut créé au 10ème siècle. Il fut emporté par une crue en 1561 et reconstruit plus haut sur le site de l'ancien manoir de Kiso Yoshinari. Son jardin suit le principe du "shakkei" ou "paysage emprunté" et utilise le paysage environnant comme élément. Le petit étang, les érables, le bâtiment blanc du temple sont encadrés par les montagnes qui les incorporent en un tout.

Une spécialité de Suhara est le "hanazuke", un thé preparé avec du sel et des fleurs de cerisiers et on le trouve dans plusieurs boutiques. Dans la rue principale, de nombreuses fontaines permettent aux voyageurs de se désaltérer. Nishijima Katsuyuki en montre une dans son estampe, si typique de son style. Kawase Hasui a fait un grand voyage dans les Alpes Japonaises en 1924 et son estampe de Suhara nous montre le village sous une pluie diluvienne.

Le massif du Mt. Komagatake surplombe le village. C’est un des grands sommets des Alpes Japonaises, favoris des alpinistes, du sommet duquel on aperçoit le Mt. Fuji, comme le montre cette estampe de Yoshida Hiroshi. Celui-ci passait souvent ses étés dans la région et adorait l’alpinisme. Il a fait beaucoup d’estampes de montagnes au Japon comme en Europe ou dans les Rocheuses.

Suhara - Waki-honjin

Suhara - Brasserie de saké

Vallée de la Kiso - Rizière et arbre en fleur

Suhara - Fontaines et abreuvoirs

Suhara - Fontaines et abreuvoirs

Suhara - Fontaines et abreuvoirs

Suhara - La porte du temple Josho-ji

Suhara - Le jardin du Temple Josho-ji

Suhara - Le temple Josho-ji

Suhara - Le jardin du Temple Josho-ji

Suhara - Le jardin du Temple Josho-ji

Suhara - Le jardin du Temple Josho-ji

Yoshida Hiroshi - Vue du sommet du Mt. Komagatake (1929)

Yoshida Hiroshi - Au dessus des nuages (Vue du sommet du Mt. Komagatake) (1929)

Nishijima Katsuyuki - Série du Kisokaido - Suhara

Yoshida Toshi (Fils de Yoshida Hiroshi) - Fin de journée sur le Mt. Komagatake (1951)