Aire de battage de Bélair

[Etymologie occitane hypothétique du lieu : bel = beau et iera = aire]

Pendant longtemps, pour extraire le grain, les hommes ont utilisé le foulage consistant à faire piétiner les céréales par le bétail ou encore le battage avec un fléau. Cette technique s'est améliorée au XIX ème siècle avec l'apparition de nouveaux instruments.

L'aire de battage de Bélair est le témoignage de ce temps où les engins motorisés n'étaient pas encore de règle chez les agriculteurs. Elle se trouve à l'W de Correns, dans le massif forestier installé sur la grande dalle dolomitique entaillée par le Vallon Sourn. Une pierre gravée au centre de l'aire de battage nous en rappelle sa construction : 1856.

Au milieu de l'aire de battage, Jean-Pierre Gros, la mémoire de Correns, nous conte les méthodes anciennes qui s'y attachent.

Si beaucoup d'aires de battage étaient en terre battue, celle-ci est caladée, c'est-à-dire revêtue de pierres. L'aire est circulaire. Certaines pierres rectangulaires sont alignées selon des rayons. Parfois ces rangées sont orientées comme une rose des vents. A la périphérie, une autre rangée circulaire délimite la zone de travail. Entre ces rangées disposées géométriquement, les autres pierres sont posées en opus incertum.

On déposait les gerbes de céréales en cercles concentriques, en les recouvrant partiellement de manière à ce que les épis soient enfouis contre le sol.

Au centre de l'aire, un pieu en bois (pau) était fiché dans un trou de la pierre. Au sommet de celui-ci, on disposait le tourniquet, une sorte de bobine autour de laquelle s'enroulait une cordelette.

L'animal destiné au foulage était soit un boeuf, soit un cheval (ou un mulet). On attachait sa bride gauche à la cordelette. Un homme guidait la bête de manière à la faire tourner en rond, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Au fur et à mesure de la rotation, la cordelette s'enroulait sur le tourniquet, réduisant le rayon de giration et forçant l'animal à décrire une spirale. Lorsque ce dernier arrivait près du mât, on retournait le tourniquet, de manière cette fois à ce que la bobine se déroulât et que l'animal s'éloignât du centre. Dans ces conditions, toute la surface de l'aire est piétinée de la même manière.

Le grain libéré est ramené vers le centre, tandis que la paille est dirigée vers l'extérieur. Ce tri est favorisé par les hommes armés de fourches en bois.

Le foulage des gerbes a été amélioré avec l'introduction du barrulaire, un rouleau de pierre de forme tronconique de manière à ce que son déplacement soit circulaire et non linéaire. La surface au contact avec le sol est rainurée ou sculptée de pointes pour imiter le travail des sabots. Le barrulaire est attelé à l'animal par une limonière dont les brancards ont une courbure adaptée.

L'aire de battage est souvent disposée au soleil de manière à ce que les épis soient bien secs avant d'être foulés. Le travail des gerbes dégage une grande quantité de poussières ou de menus débris. Pour éviter que l'animal soit aveuglé, on lui bande les yeux. De temps à autre, on arrose la litière de paille pour atténuer le nuage de poussière. Une citerne ou une cuve jouxte l'aire de battage pour fournir l'eau nécessaire ou en recueuillir l'excès.

Une fois le grain libéré de la paille, il faut l'en séparer. Anciennement, on utilisait une sorte de panier (le van). On secouait le mélange et la paille plus légère s'envolait au vent. Ce travail était souvent accompli par les femmes. Un instrument mécanique, la ventarelle, a permis d'effectuer le vannage et le criblage plus facilement.