Extrait 1, Du Tabac, Molière, in Dom Juan
SGANARELLE tenant une tabatière.
Quoi que puisse dire Aristote, et toute la Philosophie,
il n'est rien d'égal au Tabac, c'est la passion des honnêtes
gens ; et qui vit sans Tabac, n'est pas digne de vivre ; non
seulement il réjouit, et purge les cerveaux humains ; mais
encore il instruit les âmes à la vertu, et l'on apprend avec
lui à devenir honnête homme. Ne voyez-vous pas bien
dès qu'on en prend, de quelle manière obligeante on en use
avec tout le monde, et comme on est ravi d'en donner, à
droit et à gauche, par tout où l'on se trouve ? On n'attend
pas même qu'on en demande, et l'on court au devant du
soûhait des gens : tant il est vrai, que le Tabac inspire des
sentimens d'honneur, et de vertu, à tous ceux qui en prennent.
Mais c'est assez de cette matière, reprenons un peu nostre discours.
Molière, Dom Juan, Acte I, scène 1, 1665