Deux poèmes avec Eros en personnage central

Eros (I)

Ô toi, centre du jeu

où l'on perd quand on gagne ;

célèbre comme Charlemagne,

roi, empereur et Dieu, -

tu es aussi le mendiant

en pitoyable posture,

et c'est ta multiple figure

qui te rend puissant. -

Tout ceci serait pour le mieux ;

mais tu es, en nous (c'est pire)

comme le noir milieu

d'un châle brodé de cachemire.

Éros et Psyché

Plutôt que de tirer ses flèches dans les cœurs

Afin que la passion prestement s’y propage,

Éros court chez Psyché sur l’injonction sauvage

D’Aphrodite qu’effraie sa notoire splendeur.

En secret de sa mère aux desseins batailleurs,

Il conduit la beauté vers un soyeux rivage

Où se dresse un palais dont le faste présage

Un avenir gorgé de plaisirs enchanteurs.

Ivres de jalousie, ses sœurs aînées engagent

L’amante à démasquer le curieux personnage

Qui fuit dès que l’aurore essaime ses lueurs.

Aussitôt qu’une lampe éclaire son visage,

Le dieu quitte les lieux de leur ardent bonheur,

Tandis que l’ingénue déplore son erreur.