Une ville s'éveille

Livide, une ville sort à peine du sommeil,

Que déjà se devinent des vagues de rumeurs indociles.

Une pluie rigide chasse sur son passage les excès de la nuit,

Effleure de ses larmes froides le ventre rebondi des poubelles,

Offrant à la face du ciel leurs entrailles puantes.

La rue aux pavés inégaux foulés par tant de pas,

Luit sous l'emprise de cette haleine fétide.

Ensevelie sous la toile d'un parapluie difforme,

Une vieille égarée dans un habit sans âme,

Un bout de corde rêche encerclant son poignet

Guide les pas tremblants d'un chien au regard vitreux.

Elle hésite et cahote sur l'usure des trottoirs détrempés.

Dans un grincement rouillé, les rideaux de fer s'activent et se lèvent,

Dévoilent au grand jour, le corps impudique des vitrines

Offert sans honte à la convoitise curieuse des passants.

Sous l'ombre d'une porte aux battants vermoulus,

Un homme sort de sa nuit, s'étire et puis baille,

Rote haut et fort son dédain, urine son dépit

Ouvre un semblant de sac, y replace avec soin

Son drap de journaux sales, son lot d'infortune,

Et s'en va, à pas de funambule, rencontrer son destin.

Marybé