10 - L'Aéronautique dans le département de l'Aube (1936)

CONGRES

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L'ACTIVITE de l'Aéro-Club de l'Aube s'est manifestée par sa présence, sans exception, à tous les Congrès, d'abord, des Sociétés affiliées à l'Aéro-Club de France à Paris, ensuite, à ceux organisés par la Fédération Nationale Aéronautique dont les séances constitutives pour sa fondation, eurent lieu à Paris, les 6 et 7 décembre 1929 (1).

Chaque année, l'Aéro-Club de l'Aube délègue un ou plusieurs congressistes pour le représenter à ces Congrès qui étudient de nombreuses questions touchant les rouages si complexes de notre aéronautique. Par exemple : Activité des sociétés affiliées - Rapports des sociétés avec l'Aéronautique militaire - Signalisation des lignes de transports de force - Terrains d'atterrissage - Organisation, fonctionnement des écoles préliminaires de mécanicien - Assurances-Aviation - Aviation de tourisme - Aviation commerciale, etc...

Visite à ORAN

Léon Darsonval de passage à ORAN

La Médaille commémorative

du 1er Congrès de la Fédération Nationale Aéronautique, à Oran.

Le 5 mai 1930, eut lieu, à Oran, l'ouverture solennelle par le Ministre de l'Air, M. Laurent Eynac, du premier Congrès de la Fédération Nationale Aéronautique. C'est là une date historique pour notre aviation nationale (2).

Le 2e Congrès eut lieu à Paris (1er-3 juin 1931).

Le 3e Congrès eut lieu à Marseille (12-14 mai 1932).

Le 4e Congrès eut lieu à Clermont-Ferrand (1-3 septembre 1933).

Le 5e Congrès eut lieu à Paris (15-18 novembre 1934).

Le 6e Congrès eut lieu à Bordeaux (20-23 juin 1935).

Pour bien montrer l'importance des questions envisagées, de nos jours, par la Fédération aéronautique de France, je donnerai le programme des travaux accomplis à ce dernier Congrès qui fut solennellement ouvert, le 20 juin, par M. Paul Reynaud, ancien Ministre.

Première journée (20 juin) : Comptes rendus de l'activité de la F.A.F., de la Commission d'admission, du Groupement des Revues Aéronautiques de Province, Aviation privée. La Défense aérienne (Guet civil).

Deuxième journée (21 juin) : Entraînement des Réserves de l'Armée de l'Air. Instruction préliminaire aéronautique. Vol à voile et aviation à faible puissance. Propagande aéronautique parmi la jeunesse.

Troisième journée (22 juin) : Terrains. (Financement d'un vaste projet d'infrastructure. Assemblée générale ordinaire.

Signalons que ce Congrès se termina par l'inauguration de l'Aéroport de Bordeaux-Teynac.

La Fédération aéronautique de France est donc bien vivante. Souhaitons-lui une longue existence afin qu'elle puisse accomplir dans notre Pays l'œuvre immense pour laquelle on l'a créée. Je me résume en affirmant que nous attendons beaucoup d'elle.

CELEBRATION DU TRENTENAIRE

DE LA FONDATION DE L'AERO-CLUB DE L'AUBE

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AVIATEURS et aérostiers étaient en liesse au 16 mai 1931, car l'Aéro-Club de l'Aube commémorait le trentenaire de sa fondation. Si cette journée fut vraiment inoubliable pour ceux qui conduisirent, dans la bonne voie, les premiers pas de notre vaillante Association, elle procura également d'heureux instants aux jeunes tant désireux d'entretenir en eux cette flamme qui brûle si ardemment dans le cœur des anciens !

Tous, en ce jour, communièrent dans la même pensée, n'ayant qu'un même idéal, celui de voir nos ailes toujours plus glorieuses et notre Club encore plus florissant.

Dans l'après-midi, boulevard Victor-Hugo, deux ballons se balancent mollement sous une brise légère : Le Cécile, que pilotera Mme Paulette Weber, et l'Aube, notre vieux routier qui tout à l'heure, libéré de ses entraves emportera nos camarades Chandelliez, les frères Fleury et Hémard.

Le Sous-Secrétaire d'Etat à l'Aéronautique, M. Riché, a été convié à notre fête, aussi arrive-t-il de Paris, en gare de Troyes à 15 h. 52. Il est accompagné de M. le Colonel Néant, Directeur de l'Ecole des Elèves-Officiers d'aérostation à Versailles, de M. Chollat,Secrétaire général de la Fédération Nationale Aéronautique et de M. Courthéoux du Ministère de l'Air.

Le Ministre est reçu sur le quai par MM. le Sénateur Armbruster, Boisseau et Dollat, Députés de l'Aube, ainsi que par tous les Membres du Conseil d'Administration de l'Aéro-Club.

Puis le cortège, auquel se joignent toutes les personnalités présentes, se dirige vers le boulevard Gambetta pour assister au départ des deux sphériques alors que l'avion Hanriot 14, de l'Aéro-Club, piloté par Joly et le Nénette que conduit Camille Marot viennent évoluer au-dessus du clocher de Saint-Rémi et du Cirque, décrivant de larges spires autour des deux aérostats qui lentement s'acheminent en direction de Creney.

A 17 h. 30, dans la salle de réception du Grand Hôtel, en présence de nombreuses personnalités civiles et militaires, MM. le Général Gérard, commandant la brigade aérienne de Tours; Soreau, premier Président de la Fédération Nationale; Courthéoux, chef de bureau au Ministre de l'Air; le Commandant Brault, du centre de Romilly-sur-Seine; Connet, secrétaire général de la Préfecture; Privé, maire de Troyes; le Colonel Tonnet, commandant de la Place de Troyes; Villeger, chef de Cabinet du Préfet; Rivière, Huot, Blanchard, Régnier, conseillers généraux; le Commandant de gendarmerie Bucquoy; le Commandant Boyer; le Capitaine Raibaldi, chef de l'Instruction physique départementale; Chauchat-Clémencet, Demange, Philippe, Rozaire, Ployé, Riez, conseillers municipaux de Troyes; Baschet, président du Tribunal civil; Mauche, procureur de la République; Schwab, ancien juge au Tribunal de Commerce, et la plupart des membres de l'Aéro-Club de l'Aube, M. Joanneton souhaite la bienvenue à M. le Ministre et à tous les invités.

Il présente les excuses de MM. Israël et Lesaché, Sénateurs, du Député M. Maurice Robert, du Général Boucabeille et de M. Monsacré, pilote et Conseiller général, rapporteur des questions aéronautiques à l'Assemblée départementale.

Parlant au Ministre, notre Président le remercie chaleureusement d'avoir accepté l'invitation à présider cette intime fête de famille et avoue, en toute sincérité, que jamais plus grand honneur ne fut réservé au Club, depuis sa fondation, par les Pouvoirs publics. Et il ajoute : " Ce geste constitue pour nous une récompense précieuse pour tout ce que nous avons pu faire dans le passé et d'un autre côté, c'est un encouragement de haute valeur pour tout ce qui reste encore à accomplir, dans l'avenir ".

Puis s'adressant à M. le Général Gérard, notre compatriote, M. Joanneton l'assure de toute la reconnaissance de notre Club pour l'intérêt qu'il ne cesse de lui porter.

" Vous nous avez aidé, dit-il, à fonder notre Ecole de Mécaniciens d'Aviation alors que vous étiez encore Colonel à Dijon. Vous avez guidé efficacement nos pas, nous ne l'oublierons pas ! "

Le Ministre répond à M. Joanneton et le remercie de son inlassable dévouement à la cause aéronautique.

" Après l'aérostation, ajoute-t-il, vous vous êtes consacré corps et âme à l'aviation. Les débuts ne donnèrent pas des résultats immédiats, aussi, je ne vous fais pas grief, mon cher Président, d'avoir à un certain moment douté de la réussite du plus lourd que l'air; M. Painlevé lui-même en avait mathématiquement démontré l'impossible réussite. Un peu plus tard il revint sur son opinion. Et, s'appuyant encore sur les mathématiques, il prouva que le plus lourd que l'air serait vraiment, un jour, le grand triomphateur ! Cette fois il ne se trompait plus. "

Ceux qui ont vécu les temps si difficultueux de l'enfantement de l'aviation, ceux qui ont assisté à ses premiers pas, à ses vols au-dessus de terrains improvisés, à ses circuits de ville à ville, ont compris que quelque chose de nouveau était né.

Aujourd'hui, l'aviation est entrée dans les mœurs. On part en avion comme on le ferait en automobile. Le récent Tour de France l'a bien démontré. Sur 42 avions qui avaient pris le départ, 40 sont arrivés au but. Et le circuit s'est effectué sans accident.

Dans l'aviation on a réalisé la sécurité. Ce qui manque ce sont les terrains. L'Etat devra créer un réseau de routes aériennes, avec terrains équipés de hangars, de mécaniciens, de matériel.

On devra procéder comme il a été fait pour les chemins de fer, en 1840. Puis avec discrétion, M. Riché fait allusion à la création de l'Aérodrome de Troyes. Il nous assure d'apporter tout son pouvoir pour la réalisation de cette épineuse question.

" Les intérêts particuliers, précise-t-il, mais légitimes, devront être respectés, cependant il est essentiel que l'Etat prenne à sa charge l'infrastructure de l'Aviation. Vous pouvez donc compter sur l'appui total du Gouvernement car vous qui vous êtes aidés, c'est à mon tour de vous aider. "

Inutile de signaler que la péroraison de M. le Ministre fut saluée par d'unanimes approbations.

Ensuite, M. le Colonel Néant nous fit, dans une magnifique conférence, l'historique de la navigation aérienne. J'en donnerai un résumé succinet . Après avoir rappelé les débuts de l'aérostation, les montgolfières, la première ascension libre, la création des aérostiers militaires sous la Convention, leur suppression par Napoléons 1er, il en arrive aux dirigeables et donne une description intéressante du Général-Meusnier, du Giffard, du Tissandier, du Dupuy-de-Lôme et enfin de La France. - Ce dirigeable, dit-il, long d'une cinquantaine de mètres et d'un diamètre de 8 à 9 mètres, possédait une nacelle de trente mètres de longueur, et à l'arrière, un gouvernail de direction et un stabilisateur. Le moteur Krebs qui l'animait était électrique, alimenté par des piles. Ce dirigeable accomplit sept ascensions dont cinq en circuit fermé.

La première eut lieu le 9 août 1884 et marqua une époque historique dans l'ère de la navigation aérienne, car La France que pilotaient les capitaines Krebs et Renard réalisa un parcours d'environ sept kilomètres et revint atterrir à Chalais-Meudon son point de départ.

Ensuite, le docte conférencier nous entretient des dirigeables souples et semi-rigides (le système rigide étant l'apanage des Zeppelins allemands), ce qui l'amène à nous parler du Santos-Dumont, du Lebaudy et des ballons construits par les sociétés " Astra ", " Zodiac " et " Clément Bayard ".

Et voici l'aviation. - Le Colonel Néant mentionne ses premiers pas avec Ader, les frères Wright, les débuts de Santos Dumont, de Farman, de Blériot, d'Esnault Pelleterie, de Sommer, de Delagrange, de Latham. Puis, c'est la traversée de la Manche par Blériot, ensuite les vols de Paulhan en Angleterre, le circuit de l'Est, la remarquable traversée des Alpes par Chavez (3).

C'est aussi vers 1910 la période à laquelle le Ministère de la Guerre apporte la plus grande attention pour la création de l'aviation militaire.

Enfin c'est la naissance et le développement des grands raids aériens. Du 22 au 26 mai 1911. Védrines remporte celui de Paris-Madrid; les 28 mai et jours suivants, la course Paris-Rome est gagnée par Beaumont, qui va de même s'adjuger la première place dans le Tour d'Angleterre et d'Ecosse (1.600 km), du 22 au 26 juillet 1911.

En juin 1912, Garros triomphe dans le Grand Prix de l'Aéro-Club d'Angers.

En 1913, le 16 avril, Prévost gagne la coupe Schneider dur hydravion, Brindejonc des Moulinais, du 10 juin au 2 juillet 1913 boucle, en 23 jours, le Tour de l'Europe, soit un parcours d'environ 5.200 kilomètres et le 23 septembre c'est la traversée de la Méditerranée par Garros.

M. le Colonel Néant fait ensuite un impressionnant exposé de l'aérostation et de l'aviation de guerre, il souligne les progrès réalisés par l'avion depuis 1920 à nos jours, et terminant par les raids fameux de Lindberg, Costes et Bellonte il ajoute : " Rappellerai-je le voyage triomphal en Afrique du Ministre de l'Air M. Dumesnil, il vous indiquera que nous approchons de la période de vulgarisation de la navigation aérienne, aussi convient-il que les Aéro-Clubs continuent d'unir leurs efforts afin de développer l'aviation, avec plus d'intensité encore, car aider l'aviation c'est favoriser une œuvre sociale et nationale.

Cette mémorable journée s'acheva dans une atmosphère empreinte de la plus parfaite cordialité et dont nous conserverons longtemps encore le meilleur souvenir.

Souhaitons à notre Club une longue existence pour lui permettre de parachever l'œuvre si importante qu'il a entreprise. Continuons de vivre aussi dans la plus indissoluble union, animés de cette foi ardente, créatrice des plus grandes choses, puisqu'en servant, avec âme, l'aéronautique nous sommes assurés de travailler pour la plus grande gloire de notre pays, la France !

LE PRESIDENT DE L'AERO-CLUB DE L'AUBE

M. JOANNETON

RECOIT LA LEGION D'HONNEUR

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EN présence de tous ses amis et de nombreuses personnalités civiles et militaires de la ville, notre cher Président reçoit, le 13 avril 1932, des mains de M. le Sénateur Armbruster, la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur, juste récompense d'une vie si pleinement remplie pour la gloire des ailes auboises.

Photo Lienard

M. Henri JOANNETON

Avec empressement, je réponds à l'appel de l'Aéro-Club qui m'invite à retracer la vie de notre Président. Les mérites de l'homme sont bien supérieurs à ce que je puis dire, aussi est-ce avec une grande émotion que je prends la parole en présence d'une aussi sélecte assemblée pour glorifier l'ami de toujours dont, pas à pas, j'ai, jusqu'à ce jour, suivi le destin !

Puis M. le Docteur Armbruster, parrain du légionnaire se lève, prononce quelques paroles émues et bien senties, et épinglant la Croix sur la poitrine de notre vénéré Président, il lui donne la traditionnelle accolade.

Bien belle journée pour notre Association, car cette distinction tant méritée consacre définitivement les qualités éminentes de celui qui fut un pionnier de cette cause si prenante, l' " aéronautique ", que tous au Club défendent avec une noble ardeur.


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(1) Par ses deux délégués, MM. Roger Renard et Léon Darsonval, l'Aéro-Club de l'Aube participa à la fondation de la Fédération Nationale Aéronautique, dénommée depuis : Fédération Aéronautique de France.

(2) L'Aéro-Club de l'Aube était représenté à ce Congrès par un délégué : M. Léon Darsonval.

(3) Le 23 septembre 1910, Géo Chavez, âgé de 23 ans, prenait son vol de Brigue (Suisse), franchissait les Alpes Pennines et venait s'écraser à Domodussola, surpris par un violent remous au moment de l'atterrissage. Cet exploit peut-être comparé, pour cette époque, à la traversée de l'Atlantique par exemple.