3 - Le village d'Arsonval et son passé

MOULINS BANAUX :

On a déjà vu à la précédente page que les moulins appartenaient au seigneur d'Arsonval. Une déclaration de 1452 porte qu'il y avait jadis au pré de " l'Ozeroy un petit étang et un petit moulin qui moulait d'un ruisseau qui passe par devant le dit étang, qui depuis longtemps était en ruine et de nulle valeur " Un bail en 1534 indique trois moulins, tous sur la rivière d'Aube, près du village, savoir : un moulin à blé, un à écorce et un à fouler le chanvre. De même en 1544, les moulins sont dits " construits sous une même cage ". Enfin, vers 1770, un pouillé du diocèse de Langres mentionne deux moulins à eau à l'extrémité du village.

Le registre paroissial des baptêmes enregistre à la date du 2 juillet 1690, indique la naissance d'une fille de Georges Parigot, meunier d'Arlette.

BIENS COMMUNAUX :

En 1269, Erard Ier, sire de Jaucourt, rendit une sentence arbitrale entre les moines de Boulancourt et les habitants d'Arsonval, au sujet de la vaine pâture d'un pré situé au-dessous du chemin d'Arlette. D'après une déclaration de 1609, les habitants tenaient de leur seigneur 180 arpents de bois et broussailles dits Buisson Thierry, tenant d'une part au finage d'Eclance et d'autre part à ceux de Vernonvilliers et de Lévigny. Ces bois leur avaient été donnés par les prédécesseurs du dit seigneur à charge de 2 sols par feu et d'un sou par demi-feu. La déblave de chaque arpent pouvait valoir 15 s. t. Chaque année, il était distribué environ 15arpents aux habitants, dont la plupart donnaient gratuitement la déblave à couper, à cause de la grande quantité d'épines. En 1634, ils déclaraient en outre un arpent de maquis, plein de buissons d'épines, où ils menaient pâturer leurs bestiaux. Ils ajoutaient qu'Arsonval était un lieu habituel de logement des gens de guerre, " qui plusieurs fois ont entré en l'église du dit Arsonval et rompu le coffret où étaient les chartes et papiers de leur communauté ". Dans une autre déclaration de 1640, ils indiquent 200 arpents de bois, sous la juridiction de Monseigneur le duc de Vendôme, leur seigneur, " qui en est le premier usager ". Ils lui payaient 10 livres de taille et, au jour de Pâques, 2 sols et une poule par feu. Leur titres avaient été " brûlés par les Allemans ". D'après un plan du XVIIIème siècle, la contenance des bois d'usages était de 234 arpents en trois pièces dont deux très petites.

CARRIERES :

En 1392, une " perrière " venait d'être mise à jour "dessus la Vigne à l'Orme près d'Arconval..., appelée la Perrière au Fol ". A cette date, on allait y pratiquer une entrée pour en extraire de la pierre destinée aux travaux du château de Jaucourt. Elle était dite située à environ une demi-lieue du château dit "Le Val de la Perrière".

En effet, actuellement on pouvais voir encore, enfouis dans la broussaille, les sapins et les épines, le chemins d'accès à diverses entrées. L'une d'entre elles a demi-close par les éboulis conduit à des galeries profondes conduisant à des salles où un cheval tirant voiture pouvait circuler. On y extrayait des pierres calcaires qui parait-il servait de " pierre à évier " dans les maisons anciennes. Ces galeries conduisirent à de grandes salles. Il y eut à une certaine époques quelques effondrements provoquant des sortes d'avens disparus de nos jours. La famille Darsonval reste d'ailleurs toujours propriétaire des carrières sous et sur les parcelles quelle a reçues en héritage de leur Grand-père Léon Darsonval, et avant lui, Jean-Baptiste Martial Darsonval son père. Ils exploitaient les carrières au lieu dit " les Bénomonts (Benoît-Mont)". Il reste quelques pierres de l'ancien abrit, petite maisonnette de pierres assemblées les unes sur les autres, qu'ils partageaient avec d'autres pour prendre leur repas bien mérité ; car le labeur de carrier était un travail dur, harassant à l'extrême. A cette époque, Martial Darsonval et son épouse habitaient à la Maison-Neuve (hameau de la commune de Dolancourt), ils y possédaient une petite Auberge . Jean-Baptiste Martial, avait juste à montée la côte derrière l'auberge pour se rendre à son travail dans la carrière, avec un bon repas préparé par Angèle son épouse.

Aujourd'hui, la totalité des entrées de galeries sont fermées, certaines depuis la fin de guerre 1940-44, surtout pour la sécurité des personnes, car les éboulements sont imprévisibles. Les autres l'ont été suite à la demande de l'Association Natura 2000, pour la préservation des Chauves-Souris (espèce protégée), nombreuses dans ces galeries souterraines .

LE MAZET :

Il s'agit d'une vaste maison, précédée d'un large perron en pierre de taille, bordé d'une balustrade sculptée. On y accède par deux élégants escaliers. Le logis rappelle à la fois, certains édifices de l'époque Louis XIII et en même temps évoque l'Italie. Ce perron rappelait à la famille Vouillemont qui possédait jadis cette propriété, quelque souvenir des régions parcourues à la suite des arméees de la Révolution et de l'Empire où combattirent vaillamment le général Vouillemont et son neveu le colonel Vouillemont-Dascourt.

Dans sa séance du 9 mai 1865 le conseil municipal de la commune d'Arsonval avait pris la délibération suivante :

" Dans un testament mystique daté du 10 juin 1855, M. Mutinot Armand Jean-François Louis, propriétaire à Arsonval fit don à la fabrique de Saint-Pierre de Troyes d'une maison avec toutes ses dépendances. La volonté du testateur était que son domaine devint la propriété de M.S.S. les évêques de Troyes.

Ce legs, sanctionné par un décret impérial en date du 1er février 1862 reçut dès lors sa pleine exécution aussi est-il souvent donné aux habitants d'Arsonval de jouir de la présence de leur évêque venant se reposer au milieu d'eux des préocupations inséparables d'une haute dignité.

Voulant donc perpétuer le souvenir de la donation et de ses conséquences si honorables pour Arsonval, M. le maire émet le vœu que la commune soit autorisée à porter désormais le nom d'Arsonval-L'Evêque.

Le conseil municipale, considérant que chaque fois qu'une commune honorée par la présence d'un personnage illustre a manifesté le désir de voir le nom de ce personnage ajouté au sien, le gouvernement a bien voulu déférer à la demande.

Qu'un exemple frappant nous est fourni par une commune de ce département même : La Louptière, récemment autorisée à ajouter à son nom celui d'un des princes de la science, le baron Thénard. (En effet, dans le département de l'Aube, près de Nogent-sur-Seine, existe une commune, appelée encore aujourd'hui La Louptière-Thénard).

Que dans le cas même dont il s'agit, plusieurs communes de France, rendues fameuses, soit par la naissance, soit par la mort, soit même par le séjour momentané des princes de l'Eglise, ont obtenu d'ajouter à leur nom le titre dont ces prélats étaient vevêtus.

Le conseil municipal prie donc l'autorité supérieure de vouloir bien être son avocate près du gouvernement afin qu'Arsonval obtienne le droit de s'appeler désormais "Arsonval-L'Evêque"

Ce vœu ne fut jamais exaucé et Arsonval la seule commune de France portant ce nom ne fut jamais appelé Arsonval-L'Evêque.(il existe malgré tout un hameau nommé Arsonval, commune de Gournay-sur-Aronde dans le département de l'Oise)

LE GRENIER A SEL :

Face à la boulangerie d'Arsonval est une ancienne maison flanquée d'une tour. Les murs de l'habitation ont 80 cm d'épaisseur. Le toit était autrefois un chaperon conique. Vers 1920, le propriétaire de l'époque fut contraint de procéder à des réparations et des restaurations. Ce toit pittoresque fut sacrifié pour être remplacé par un toit de forme aplatie. Des cartes postales de l'époque (vers 1912 environ) montraient le bâtiment primitif. La tour possède une très belle cave voûtée. La légende dit que cette tour était un ancien grenier à sel du temps de la "Gabelle" (ancien impôt sur le sel). Il est difficile de fournir une certitude à ce sujet. D'abord, la dénomination Grenier à Sel consacrée par l'usage local se rapporte à un ancien magasin à sel, sans pour autant confondre la tour d'Arsonval avec l'office de juridiction de la Gabelle.

On désignait Grenier à Sel le lieu clos où l'on faisait sécher le sel avant de le vendre. Le même nom désignait une juridiction de 1342 au sujet des contestations concernant la Gabelle. Des archives locales font mention du bureau du sel et tabac à Arsonval, tenu en 1788 par Jean Astruc puis Mutinot. Sur la façade de la tour, on lisait autrefois la date de 1642. D'autre part, le propriétaire de l'époque (1920) se souvenait avoir trouvé des bulletins à demi-rongés par les rats. Ces bulletins étaient des feuilles de transport de sel, des genres de laisser-passer actuels. Maintenant, il paraissait peu vraisemblable que la cave de la tour ait servi à emmagasiner su sel, le risque d'humidité étant nuisible à la conservation de ce produit. Le grenier à sel d'Arsonval reste donc une énigme.

LES CROIX :

Comme dans de nombreuses paroisses de France, Arsonval possédait ses croix. Elevées généralement soit à l'extrémité d'un village, soit à la croisée de chemins, elles présentaient pour la plupart d'entre elles un socle de pierre du pays surmonté d'une croix de fer ou de fonte. Quelques inscription rongées par le temps et difficilement lisibles se distinguent parfois à leur base. C'est le cas de celle existant encore, le socle seulement, se trouvant près du pont enjambant la rivière du moulin (on peut lire sur le socle : " Lignum vitae " mots latins qui veulent dire " le bois de la vie " et ensuite " la croix est source de la vie pour ceux qui l'embrassent ". Cette croix est signalée par la carte d'état-major de 1889.. Les plus vétustes ont disparu ; d'autres ont été victimes d'accidents de la circulation ou de vandalisme. Autrefois, au cours de la semaine sainte, une main pieuse venait y déposer un rameau de buis bénit. Il n'existe plus à Arsonval qu'une seule croix rénovée, nommée la Croix Collot. Voici le rapport de la bénédiction de la croix : "L'an 1750, dimanche quatorze du mois de juin, par moi, Jean-François Jouet, curé d'Arsonval, a été bénie la croix plantée sur le grand chemin et sur celui qui va à Eclance, au-dessous du Vallon de Givaux, ladite croix appelée la Croix Collot parce que feu Pierre Collot, vigneron, demeurant à Arsonval, y a été étouffé sous les ruines du monceau de terre, laquelle bénédiction nous avons faite suivant la permission de Monseigneur l'Evêque de Langres".

Il faut ne pas oublier de signaler le socle de la croix d'Arlette à la limite d'un pâturage avec les terres labourées dans la vallée.

Ce socle porte : ' Adoramus, te, Christe et Benedicimus tibi " (ô Christ, nous vous adorons et vous bénissons).

Une croix se trouvait aussi à la sortie d'Arsonval en direction de Bar-sur-Aube, à gauche contre la borne hectométrique 1, des cent mètres se trouvait la croix de Molême aujourd'hui disparue " mea culpa "!.

LE BUREAU DE POSTE AU DEBUT DU SIECLE :

Bien avant 1908, année de la création du bureau de poste de la commune, le conseil municipal s'inquiétait de l'amélioration de la distribution du courrier. Dans sa réunion du 8 août 1847, celui-ci appuyé d'une pétition, demandait à ce que le bureau de distribution établi alors à Dolancourt, soit transféré à Arsonval. Il était dit "Le bureau est établi sur le territoire de la commune de Dolancourt placé dans un endroit isolé qui n'offre plus la garantie de sûreté nécessaire depuis 2 ans ladite commune n'est point située sur la grande route de Troyes à Bâle et le bureau est établi à la jonction de la route départementale de Vitry à Dijon avec la route royale n° 19 au pied d'une montagne, dans un complet isolement." Il s'agit ici du hameau de Maison-Neuve actuel.

Il est à croire que la demande du 8 août 1847 ne fut pas prise en considération par l'administration puisque dans sa réunion du 12 octobre 1865 la délibération du conseil municipal stipulait : " En vertu de l'autorisation de Monsieur le Sous-Préfet en date du 9 courant, il serait question de créer un établissement de poste aux lettres à Arsonval, d'y rattacher les communes de Dolancourt, Argançon, Spoy, Fravaux et Jaucourt qui seraient desservies par un même facteur et les communes de Montier-en-l'Isle, Lévigny, Vernonvilliers, Eclance.

L'assemblée communale considère que l'établissement d'un bureau de poste aux lettres ne peut-être qu'avantageux pour la commune d'Arsonval, surtout depuis la résidence fréquente de Mgr l'Evêque de Troyes à sa maison de campagne (Le Mazet). La correspondance épiscopale souffre parfois de regrettable délais "

Traitant encore des PTT, on retrouve également une délibération du 10 février 1887, qui dit : " Le maire de la commune sur interpellation, donne lecture d'une lettre de Monsieur le directeur des Postes et Télégraphes de l'Aube, fournissant les renseignements nécessaires en ce qui concerne l'établissement d'un bureau télégraphique dans la localité." D'après cette lettre, la dépense serait à la charge de la commune.

Et puis le 7 mai 1905, un projet d'établissement d'un "facteur boitier" desservant Montier-en-l'Isle et Jaucourt est envisagé car, à cette époque ces deux communes étaient desservies par deux facteurs de Bar-sur-Aube comme maintenant. La commune d'Arsonval fournissait gratuitement dans les bâtiments de la mairie les locaux nécessaires à l'exploitation du service et au logement du facteur.

Enfin le 28 mai 1907, un poste de facteur receveur était créé. Sur proposition du conseil municipal un local comprenant une grande pièce (ancienne salle de mairie) à transformer en bureau et salle d'attente et un logement au premier étage est proposé. Le bureau de poste ouvrait donc dans le second semestre de l'année 1908 le tout fut complété par diverses demandes : installation d'une cabine téléphonique publique intérieure en août 1908 avec rappel en mars 1910, installation du téléphone en novembre 1910.

Tout n'était pas encore parfait puisqu'une délibération du 4 avril 1912 stipule : "Depuis la création de postes téléphoniques nombreux, les communications sont actuellement très difficiles entre les postes du canton de Brienne - Bar-sur-Aube. Les demandeurs sont obligés d'attendre longuement, des heures même, une communication qu'ils pourraient obtenir en quelques minutes si les lignes étaient plus nombreuses. Dienville et Brienne sont reliées téléphoniquement à Troyes, par un réseau ouvert au public le 10 avril 1903.

De ce fait, les communications de ces localités et celles desservies par ces bureaux, y compris ceux de Vendeuvre, Jeassains, Bayel, Ville-sur-Terre, doivent emprunter la grande ligne, d'où de longues attentes. Il est demandé à ce que le réseau de Brienne soit relié directement à celui de Bar-sur-Aube de manière à améliorer le service téléphonique".

Depuis cette époque, il y eut bien des améliorations, la dernière date de 1978, la pose d'une cabine téléphonique extérieure. Le nombre des abonnés a sans cesse augmenté : s'ils étaient 77 en 1978, ils sont 123 aujourd'hui. Il est vrai que la population a augmenté. Aujourd'hui, bien des améliorations ont été réalisées..., le portable est venu détrôner le téléphone fixe.

Voici donc l'"histoire" d'Arsonval. Certes on pourrait peut-être encore écrire beaucoup sur son passé. Des gens y sont nés, ont vécu reposent aux cimetières de la commune.

Certains ont eu une vie de labeur, d'autres ont souffert physiquement ou moralement, d'autres ont eu une existence heureuse.

De vieilles bâtisses sont restées, d'autres sont disparues, certaines se sont construites, mais Arsonval le village de la vallée où il fait bon vivre " Ad vitam aeternam "