Le 1er numéro de Creatif Art Revue est paru en septembre 1983. Il a été diffusé comme supplément au n° 12 d'Info-MAM.
Les premiers numéros comportaient une page de format A4 recto-verso. Ensuite il y eu plus de pages, jusqu'à l'été 1985. Avant un retour sporadique, comme le numéro spécial du printemps 1989, au format A5.
The artistic proefkonijn
On peut considérer que Creatif Art Revue fait partie des revues "mail-art", très nombreuses à cette époque. Ce n'est pas pour rien que je l'ai qualifié de cobaye artistique (artistic proefkonijn). Vous trouverez les copies (en couleur) des matrices originales sur la page Facebook du groupe Creatif Art Revue :
http://www.facebook.com/groups/405733989470813/
Creatif Art Revue comprennait quelques textes, dont je suis l'auteur, et qui étaient intégrés à la mise en page.
Voici le texte de présentation :
Trouver un lieu, un endroit – un peu retreint par définition ou par la force des choses.
Employer la surface disponible au mieux.
Y présenter un maximum de choses ayant un rapport avec les formes d’art actuelles.
Recueillir les témoignages de l’activité artistique des créateurs à un niveau international et les réinjecter dans le circuit des correspondances artistiques.
Jouer la porte ouverte, accepter le hasard, les travaux originaux, sans limitation dans le choix du média. Rêver.
Et voici le texte inclu dans la page 1 du 1er numéro :
EN GUISE D’EDITORIAL
La dernière glaciation s’achevait, laissant sur la banquise quelques cadavres de Cadillacs rouillées. Un vieux frigo aussi. Le gentil animateur prévenant nous devançait depuis plusieurs heures sur le sentier poudreux, par essence. Il commentait le paysage d’un air enjoué, c’est forcé.
Après l’avenue Max Ernst et le monument aux oiseaux, c’était le skware R.Topor (celui sur lequel débouche toutes les rues à sens interdit !). Nous avons ensuite laissé la ville derrière nous pour nous aventurer dans des terres vierges et inconnues. Bientôt les campagnes verdwajentes firent place à des contrées plus désertiques et sauvages. Puis les neiges éternelles.
Ainsi donc nous explorons pour la première fois des contrées inviolées !
C’est abusivement qu’on avait attribué la mort de Trotsky au défunt Glutzenborg.
Et derrière la moustache de Mr. Duchmol se cache le cigare de ce célèbre animateur de radio. de la radio sort un bruit blanc et respectueux qui ne parvient même plus à nos oreilles. La Voix de Vittore nous parvient néhanmoins d’Italie. Voyages narcotiques. Bruxelles. Elle termine sa lune de miel dans une maison close. Le mystère de la femme sans tête éclairci. L’avocate avait été décapitée par son mari. Un don de voyance exceptionnel. Profitez de ce cadeau réservé aux lecteurs de Créatif Art Revue. Découpez et renvoyez cet article, votre date de naissance, trois enveloppes timbrées portant vos noms et adresse, et 100 F., à l’adresse de votre choix. N’oubliez pas le guide. Tyran domestique. Martigues. Délicate affaire. Couple étrange. Violente dispute. Etrange disparition. Refus de divorcer. Premier mariage. « A l’opinel … » Horrible forfait. La main sur le mur. Les petites annonces mariages. Docteur vous avez vu les blessures de Henri Pascal. Est-il absolument inimaginable qu’un homme pris de folie puisse ainsi se tuer à coup de marteau ? Je maintiens, répondit le légiste, qu’il est impossible de se donner avec une telle violence plusieurs coups de marteau sur le sommet de la tête. La blessure est énorme. Deux esquilles sont enfoncées dans la dure-mère. Dès le début, j’ai conclu au crime.
(A noter que la fin de ce texte, composé de titres et d'un extrait d'articles d'un magazine à sensation, était peu lisible, étant donné qu'il était partiellement masqué par une surface d'écoline rouge (apparaisant noire à l'impression)
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Parallèlement à la publication, à l’automne 1984, du troisième numéro de la revue Automne –reprenant des travaux d’artistes de Belgique- a eu lieu une exposition d’artistes appartenant au réseau « mail-art ». Cette exposition a eu lieu à la galerie Yucca, à Uccle (une des communes de Bruxelles), du 20 au 28 juillet 1984 et qui a donné lieu à la publication d’un petit catalogue.
Témoins d’une période où la Belgique s’interroge sur son avenir –et même sur l’avenir de son existence- la revue Automne porte comme thème « Belgique, pas Belgique » et l’expo mail-art propose aux artistes –majoritairement étrangers- de donner leur vision du pays : « Qu’évoque la Belgique pour vous ? What is Belgium for you ? ».
Voici le texte d’introduction du catalogue :
CREATIF ART EXPO
Si la Belgique n’inspire que fort peu les artistes belges – qui ne savent probablement pas où ils habitent : Flandre, Wallonie, Bruxelles, Europe … - elle ne représente bien souvent pour les mail-artistes qu’une petite surface sur la carte du monde, ou un certain nombre de contacts (Guy Bleus, Thierry Tillier, Jean-Pierre Benon, …). Pour d’autres, notre pays évoque le souvenir d’un passage (vacances artistiques et autres), quelques images découpées dans des magazines, des cartes postales.
« Creatif Art Expo » est la première expo de mail-art – pardon, le premier mail-art show – organisée par Creatif Art Revue. Après moins d’un an d’existence, Creatif Art Revue (C.A.R. pour les intimes) est devenu un fanzine de mail-art tout à fait connu dans le network. Il fait partie des choses qu’évoque la Belgique pour pas mal d’artistes étrangers participants au circuit mail-art.
Au-delà de toute contrainte physique (l’éloignement) ou idéologique, au-delà de tout critère commercial, le mail-art contribue à rapprocher les artistes, et à travers eux les peuples auxquels ils appartiennent. Le récent Festival Cavellini a montré que la polyphonie linguistique du réseau n’était pas un obstacle non plus. Par la nomination de Cavellini comme premier président des Etats-Unis d’Europe, Bruxelles est devenu bien plus que la capitale du mail-art européen, de l’esprit mail-art … et puis, citez-moi une ville au monde qui puisse revendiquer le titre de capitale mondiale du mail-art !
La présente brochure ne pourra rendre la couleur, le relief, des travaux reçus pour l’expo ; elle ne demande d’ailleurs qu’à être un témoin, un souvenir de ce projet.
L’avenir nous dira ce qu’il convient de faire de ces travaux : autres expositions (par exemple à l’étranger), muséification dans une Fondation ou autre chose encore. Ils resteront en tous cas disponibles pour qui voudra les employer, sporadiquement et spontanément, dans le respect de l’idée qui les a réunis.
Guy Stuckens
Bruxelles, 16 juillet 1984