5. Différents systèmes

Voyons l’évolution dans les systèmes d’appréciation, à travers les formulaires utilisés à la Générale de Banque, puis Fortis Banque et BNP Paribas Fortis.

Années 70

L’attribution des « tranches de mérite » se faisait sur base d’un document tenant compte de la quantité et de la qualité du travail et de l’apport au travail du groupe. Pour chacun de ces éléments, cinq niveaux : en-dessous du niveau exigé, généralement au niveau exigé, au niveau exigé/parfois au-dessus, au-dessus du niveau exigé/parfois exceptionnel, prestations habituellement exceptionnelles. Une deuxième page évalue les perspectives de carrières : situation par rapport à la fonction exercée, perspectives de promotion, mesure concrètes (contenu de la fonction, formation, réorientation/mutation). Dans la deuxième moitié des années 1970, l’évaluation est confiée à un « collège d’évaluation » composé du chef de section, du chef de service et d’une personne du service du Personnel (en charge des dossiers du personnel de l’entité concernée).

Années 80

L’apparition d’un système d’appréciation, au milieu des années 1980, entraine la création d’un nouveau document qui servira (comme les suivants) à la fois à fixer, ou au moins à énumérer, les objectifs de l’année, et à apprécier leur réalisation en début d’année suivante.

La première page énumère les « tâches par ordre d’importance », la suivante, les « mesures concrètes » (autrement dit : les objectifs). Ces deux pages comprennent des colonnes pour indiquer, pour chaque point, le degré de satisfaction (IS, S, LS, TB, E). La page suivante concerne les efforts que le collaborateur a « fourni en vue de l’amélioration de ses propres résultats ou des résultats du groupe (et de) sa propre formation ou de la formation de collègues » ; aussi les relations que le collaborateur entretient avec le chef, les collègues, les clients et les autres services ; et encore les « qualités professionnelles du collaborateur se manifestant dans l’exercice de la fonction actuelle » ; avant d’arriver à l’appréciation globale (cotation). La dernière page permet d’exprimer les souhaits et les commentaires par rapport à la fonction exercée, les besoins de formation, l’orientation vers une autre fonction.

Années 80/90

À partir de 1989, apparait un document plus sophistiqué, comprenant plus de pages, mais toujours complété à la main :

1 page : Tâches-clés « Énumération et description des tâches-clés par ordre d’importance »

1 page : Objectifs individuels, précisant que ceux-ci doivent être SMAC[1] :

Spécifiques : précis et individualisés

Mesurables : au moyen d’indicateurs clairs

Accessibles : tiennent compte des capacités de l’apprécié(e)

Compatibles : avec la fonction, l’équipe, la banque

1 page : Qualités professionnelles de l’apprécié(e), développées en 5 points : satisfaction du client et de l’actionnaire et intégration dans la société (« contribue à l’image de la banque », « représente positivement la banque », …), recherche permanente de l’amélioration de la qualité et des résultats (« utilise sa créativité pour améliorer la qualité du service », …), faculté de travailler en équipe, qualités individuelles (« tire le meilleur parti des nouveautés proposées », …), autres qualités requises par la fonction exercée.

1 page : Qualités managériales de l’apprécié(e) pour ceux exerçant une fonction hiérarchique

1 page pour les commentaires (formation, développement, autres points que l’apprécié(e) souhaite aborder, …)

À noter que les 2 premières pages comprennent une colonne « Commentaire soutenant l’appréciation », les 2 suivantes « Commentaires éventuels » avec la précision « Obligatoires en cas d’appréciation ‘insuffisant’ ».

En 1992, on en revient à des documents plus élémentaires, reprenant : tâches-clés, objectifs, efficacité dans l’exercice de la fonction (quantité et qualité du travail, apport au travail du groupe, etc.), développement personnel, actions proposées (connaissances et compétences à acquérir, …).

Nouveau document à partir de 1996/1997 : 10 pages (+ la page de titre) dont 2 pages d’explications. Le volet 1 (6 pages) concerne l’appréciation de l’année écoulée : exercice de la fonction (taches-clé et buts à atteindre), professionnalisme (compétences, qualité et organisation du travail), attitude personnelle (envers les clients « internes et/ou externes », ses collègues et l’entreprise + esprit d’équipe), comportement managérial (pour les responsables d’équipe) et une place pour les commentaires de l’appréciateur et de l’apprécié.

Le volet 2 (1 page), intitulé « démarche de concertation avec son chef », invite les deux interlocuteurs « à parler de leur façon de fonctionner » et à noter les « décisions concrètes prises par les deux parties pour améliorer la façon de fonctionner ».

Quant au volet 3 (1 page), « Décisions concrètes pour l’année prochaine », il invite à fixer les buts à atteindre dans les différents domaines du volet 1.

L’année suivante, le volet 2 devient « Buts à atteindre » et comporte deux parties : « buts à atteindre pour l’année prochaine » et « plan de développement individuel ». Il est précisé que « ce volet doit être remis complété et signé au service du personnel » ce qui implique donc l’engagement écrit de l’apprécié. Le volet 3 reprend, en gros, le contenu du volet 2 de l’année précédente.

Notons qu’à partir de 1997, le formulaire d’évaluation est complété de façon informatique.

Années 2000

Nouveau système d’appréciation et nouveau formulaire (complété en ligne). La partie « évaluation » (de l’année précédente) comprend 4 volets : tâches-clé, réalisation des objectifs, aptitudes (orientation client, connaissances, esprit d’équipe, …) et synthèse. À ceci s’ajoute le 5ème volet, consacré aux objectifs pour l’année suivante : on prévoit la place pour 4 objectifs.

À partir de 2007, le volet « tâches-clé » devient « accomplissement général de la fonction » (avec de la place prévue pour indiquer trois tâches) ; au niveau aptitudes et comportement, les objectifs sont fixés en fonction de 4 « Fortiomas » (« Drive performance », « Focus on client », « Act as one » et « Encourage diversity ») et il faut donc tenter de trouver des objectifs qui correspondent plus ou moins[2] à ces valeurs d’entreprise, à partir d’un descriptif inscrit par HR dans le formulaire vierge. Au niveau des objectifs de résultats individuels, il y a l’introduction d’une colonne « poids » qui permet d’indiquer l’importance (en %) de chaque objectif – le total des objectifs devant atteindre 100%. Lorsqu’on lui donne ses objectifs, on demande également au travailleur de signer, pour accord, son « Plan de Développement Personnel ». Par contre, on ne lui demande plus s’il est d’accord avec son évaluation : il signe « pour prise de connaissance »[3].

Suite à la reprise de Fortis Banque par BNP Paribas, à partir de 2010, les « Fortiomas » sont remplacés par les « valeurs » de cette dernière : réactivité, créativité, engagement, ambition. Ces valeurs sont explicitées ; évaluateurs et évalués sont invités à décrire un ou plusieurs objectifs précis en regard de celles-ci. Nous avons vu beaucoup de formulaires où cette colonne n’était pas remplie et où on se contentait donc de la description générale des « valeurs » (comme « s’impliquer au service des clients et de la réussite collective »). Dans les commentaires généraux sur l’appréciation, il est demandé au manager de « donner 2 points forts et 2 points d’efforts » (à mieux faire l’année suivante).

Pour les objectifs 2012, les « valeurs » deviennent « Customer satisfaction » et « Compliance & Risk », les objectifs individuels se déclinent en « versatility » ( ?), production, qualité, social (travail en équipe) et « sustainability » (écologie)[4].

En 2013, « Customer satisfaction » devient « Focus client », avec des choses assez étonnantes dans le descriptif, comme : « j’intègre l’ADN Customer Focus », pour lequel il faut « être accessible et activement engagé », sans vraiment de possibilité de comprendre ce que ça veut dire ou pourrait vouloir dire. Au niveau « Compliance & Risk » sont reprises des choses prévues au Règlement de travail, comme « observer les codes de conduite, directives et législation » ! Pour les responsables hiérarchiques est aussi prévu de « valoriser les personnes » sous leurs ordres, et l’« exemplarité ».

[1] Plus tard, on parlera de plans d’actions « SMART » : spécifique, mesurable, acceptable, réaliste et temporel (BNP Paribas Fortis, brochure « Évaluation des prestations », 2010).

[2] P.ex. la diversité peut très bien être comprise comme l’augmentation de la polyvalence …

[3] C’est probablement la conséquence d’un nombre significatif de travailleurs refusant de signer « pour accord » (refus de principe).

[4] P.ex. : « éteindre PC et écran avant de partir » (le soir) …