Des personnages récurrents

Les personnages-types sont souvent les mêmes dans les teen movies.

Le héros

Il est souvent masculin, entre 13 et 19 ans, lycéen ou étudiant. Il est presque toujours WASP (white anglo saxon protestant). 

Mignon, mais pas Apollon non plus, malin mais pas complètement nerd (cas désespéré, du moins au début seulement) ou geek (fan d'informatique et de sciences). 

Tel un chevalier de la Table Ronde, il devra subir un parcours initiatique dont le point focal est la perte de la virginité ou à défaut une transgression quelconque. 

Il s'agit souvent d'un ado très ordinaire qui va, contre toute attente, réussir tous les défis, en particulier amour, popularité et scolarité (Lucas, Loser, Le nouveau, Pum up the volume, Kick Ass, Projet X...). Le héros plus ou moins loser, du moins au début du film, permet facilement au spectateur de s'identifier à lui.

Le cas de héros déjà cool est plutôt minoritaire et donne lieu à des films en général plus intéressants. Un de ces héros exemplaires : Ferris Bueller.

Rien qu'à sa tête, on devine que ça va être dur... 

(Le nouveau)

Tu ne devrais pas être en cours, Ferris ? 

(La folle journée de Ferris Bueller)

L'héroïne ? 

Les cas d'héroines dans les teen-movies sont plus rares (essentiellement Fast Times at Ridgemont High, voire 10 bonnes raisons de te larguer, The To Do List).  Mais elles ont tendance à être plus présentes dans les films récents (He's all that, Prom Pact).

Quand elles sont au premier plan, elles sont souvent beaucoup plus raisonnables que leurs équivalents masculins (Clueless, Rose bonbon, où l'héroïne encaisse toutes les humiliations avec une sagesse et une patience de moine tibétain, American Girls où une équipe de filles survoltées arrive à s'auto-gérer à la yougoslave, Easy A où une lycéenne essaie de gérer la rumeur qui court sur elle, Ghost World où les codes du monde adulte semblent inaccessibles, Just of one the guys où l'héroïne décide de se travestir en mec pour réussir). Moxie est un peu l'aboutissement logique d'un discours féministe de plus en plus présent depuis les années 1990, mais l'humour reprend vite ses droits (Bottoms).

Même dans Lolita malgré moi, leur côté petites pestes a un certain charme que n'ont pas les obsédés pathologiques des sex comedies (bien qu'un peu abordées dans Petites diablesses). Elles cherchent juste le grand amour... Mais est-ce bien raisonnable ?

Molly Ringwald garde le sourire malgré la tenue de son prétendant à droite... (Rose Bonbon)

Malgré sa bonne volonté, Jennifer Jason Leigh accumule les déconvenues amoureuses dans Fast Times at Ridgemont High

Le meilleur pote 

Il est physiquement et/ou intellectuellement moins bien doté que le héros. Il a donc un rôle traditionnel de faire-valoir. 

Mais il aussi l'incarnation de le Tentation en proposant au héros des plans douteux, qui vont rendre le parcours initiatique du héros particulièrement cinématographique (comme dans Sex drive ou de manière plus dangereuse dans Palo Alto).

Un meilleur pote exemplaire : Miles, bon copain de Tom Cruise dans Risky Business, à qui il conseille fortement de se déniaiser avec une professionnelle.

"Mais si, tu vas voir, c'est un super plan ! Et sans risque..." (Risky Business). L'acteur (Curtis Armstrong) s'est quasiment spécialisé dans ce rôle...

"Mais laisse-moi t'expliquer, enfin !" (Easy A)

Pour les filles, c'est souvent plus compliqué et il n'est pas rare que les meilleures copines (au début du film) se déchirent (au milieu), pour mieux se réconcilier (à la fin). La mise à l'épreuve de l'amitié féminine est un des ressorts principaux des teen movies où les filles sont les premiers rôles (Wild child, Jennifer's body, Pitch Perfect, Mes copines, Booksmart, John Tucker must die, the edge of seventeen, Moxie, Mean Girls).

Beaucoup plus rares sont les films de couples amicaux entre une fille et un garçon (Prom Pact).

Pas la peine de parier : on sait comment ça finit (Dirty Girl).  

La bande de potes 

Gravitant autour du héros, ils sont des clichés incarnés : le geek, l'intellectuel, le nerd (intellectuel désocialisé), l'artiste incompris (éventuellement musicien), le rebelle, le sportif ("jock"), le grand timide, la star du lycée ("populaire")... L'identification est à la fois visuelle (le physique, les vêtements) et comportementale (langage, tics, centres d'intérêts). 

La bande de potes est particulièrement soudée : cela peut aller jusqu'à prendre des risques physiques dangereux pour défendre l'un de ses membres (Porky's). La formule du trio est souvent reprise (La Folle journée de Ferris Bueller, Supergrave, College, Une créature de rêve, Girl Next Door, The last american virgin, Me and Earl and the dying girl...), plus que le duo (Eh mec !..., Highway). 

La bande de potes est souvent le seul moyen pour la production de faire dans le politiquement correct, avec au moins un membre représentant les différentes communautés (Noirs, Hispaniques, Asiatiques essentiellement), car le héros est presque toujours blanc. 

La bande est très souvent masculine et s'y exerce une sociabilité virile, non exempte de sous-entendus sur d'éventuelles tendances homosexuelles (Supergrave, American Campus, Eh mec !..., Hot tub time machine). Cette virilité est régulièrement mise à l'épreuve et doit être constamment réaffirmée par toute une série d'exploits menés en bande (et si l'exploit est individuel, la bande est forcément au courant). Les bandes de copines sont plus rares (Shag) et sont parfois juste unies par une détestation commune (John Tucker must die).

Une bande exemplaire : les copains d'American Pie avec Jim, héros malheureux et maladroit, Kévin le beau gosse et chef de bande, Chris le sportif musclé au cœur d'artichaut, Paul le dandy sophistiqué et l'incroyable Stifler, obsédé psychopathe, capable d'ingérer n'importe quoi, dont la maison est si accueillante (et la maman aussi).

Plus sérieusement, la bande de copains / copines renvoie à une réalité : elle constitue le principal vecteur de socialisation et de construction psychologique des ados.

Stifler, Jim, Paul, Kevin et Chris 

(American Pie)

Une autre bande mythique : les si raffinés "Deltas" de l'Université de Faber, aux activités sociales si conviviales (American College).

Avec les potes, on peut prendre un bain, boire de la bière et voyager dans le temps (Hot tub time machine)

Ne pas se fier à une bande de filles... (Spring Breakers)

A la fois inoffensifs et dangereux, surtout pour eux-mêmes (Les Boloss)

Le "diner", les lunettes de soleil, le col relevé : on reconnaît de bons chasseurs (The last american virgin)

Et c'est encore plus facile si on forme un groupe de pop ou de rock ou de punk, enfin on s'en fout tant qu'on joue (Sing Street)

Encore mieux que des copines : des copines sorcières ! (The craft)

Les autres bandes 

L'ado ayant l'instinct grégaire (hormis le héros, c'est pour cela qu'il est un héros d'ailleurs...), il se déplace et se nourrit en groupe. Les experts appellent ça de la socialisation horizontale (et n'y voyez aucune allusion déplacée). Les Etatzuniens appellent ça des "cliques". Chaque groupe est homogène, formant une "bande". Des ados différents ne peuvent former une bande a priori (c'est tout le propos de Breakfast Club et de Heathers). 

Citons parmi les plus caractéristiques le groupe des intellos, le clan des sportifs ou encore la bande de pétasses. Cette dernière fait souvent la loi en début de film. Soudées comme une grappe de raisin, se promenant en rang (et jamais en file indienne) avec une démarche de mannequin, le regard hautain, un look identifiable, les filles qui en sont les élues incarnent la quintessence des diktats comportementaux des ados (vestimentaire, relationnel). L'intelligence du héros leur en fera rabattre grave (ridiculisation, dissolution de la bande voire récupération d'une des membres). C'est quasiment le sujet unique du film Heathers ou de Lolita malgré moi et on les retrouve souvent (College Attitude). 

La bande de filles est beaucoup moins solidaire que celle des garçons : on n'est jamais à l'abri d'une trahison, d'un coup tordu ou d'une forme de rivalité sourde. Il faut dire que la figure de la chipie (si possible jolie, riche, cruelle et avide de pouvoir), voire de la garce intégrale, est quasiment un passage obligé dès qu'il y a plus d'un personnage féminin. La bande féminine peut être aussi carrément toxique (Five Fab), alors que la bande de mâles est au pire débile.

Une bande de filles en pleine action (Super Blonde)

La tyrannie du couloir à casiers : "et si on ne venait pas à ta fête ?" 

(30 ans sinon rien)

Notons que les ennemies du héros ou de l'héroïne sont souvent blondes, belles et riches (Rose Bonbon)

Elles ont les yeux revolver, elles ont le regard qui tue... (Heathers)

Le clan des sportifs, quant à lui, est souvent mené par un joueur de football (américain), toujours accompagné de ses copains (costauds et buveurs de bière), comme avec une garde prétorienne. Ce chef est en plus très beau (et blond). La plus belle fille du lycée sort avec lui, ce qui rend les choses encore plus compliquées pour le héros quand elle est aussi chef des pompom girls. Le sportif finit toujours par perdre devant l'intelligence du héros, souvent de manière ridicule (Les tronches est un cas d'école de cette situation).

Une bande ennemie exemplaire : la fraternité "Omega" de l'Université de Faber, cocktail de sportifs, de fayots sadiques et de militaristes violents : une allégorie des élites sociales réelles ? (American College).

Bande exemplaire inoffensive, voire uniquement décorative : les musiciens de la fanfare (American Pie)

La girl friend du (ou des) héros

Soit elle est physiquement un cran en-dessous la reine des pompom girls, mais elle compense par une sensibilité, une intelligence, un cœur (rayez les mentions inutiles) remarquables, mais que le héros mettra du temps à découvrir (environ 1h30 du vôtre) : c'est alors une héroïne de type "beauté cachée". 

Soit elle est très belle, donc inaccessible et le héros mettra en moyenne également 1h30 à la conquérir (héroïne type "reine de la promo" : Can't buy me love). 

Soit elle est amoureuse du héros dès le début (héroïne de type "groupie"), mais finit par se décourager (Grease) (option : le héros doit la reconquérir, ce qui est acquis en 1h30, à moins qu'il ne change de type d’héroïne en cours de route). Très souvent, la fille idéale est sous les yeux du gros béta de base mais il met le temps du film pour s'en rendre compte (Dangereuse séduction).

Une héroïne exemplaire de type "groupie" : Ali, admiratrice bonne poire du jeune karatéka de Karaté Kid, qui, lui, pense plus à son jeté de pied qu'à sa jolie petite amie. Mais elle sera là jusqu'au bout, le soutenant dans la victoire finale.

Une héroïne trop belle et trop cool, de type "reine de la promo", forcément inaccessible pour le loser de droite (Supergrave). Mais bon, vous avez deviné la fin... 

Michelle, joueuse de flûte traversière d'apparence coincée et nunuche, héroïne de type "beauté cachée" (American Pie).

L'option cheerleader  (de l'anglais to lead : susciter / cheer : encouragement), traduit en bon français académique par pom-pom girl (sic) : l'héroïne peut être la pom-pom girl en chef, rôle souvent cumulable avec celui de "reine de la promo". Sa bande est naturellement celle des autres filles de ce groupe, quasi militaire. Elle est quasiment toujours blonde et pas très futée. Le capitaine de l'équipe de foot sort souvent avec elle. Dans les slashers, elle est souvent celle qui meurt en premier.

Saviez-vous qu'au début (fin du 19e siècle et première moitié du 20e siècle) les cheerleaders n'étaient que des hommes, tendance gymnastes acrobatiques ? Que les présidents F.D. Roosevelt et D. Eisenhower en ont été ? C'est la Seconde Guerre mondiale qui, à défaut d'hommes partis au front, ont propulsé les jeunes femmes à ces postes. Puis la professionnalisation est arrivée dans les années 1970 (en particulier pour l'équipe de foot des Dallas Cowboys) avec recrutement de mannequins, chorégraphie spectaculaire et tenues très raccourcies (c'est bête, c'est le moment où les poitrines ont augmenté de taille...). Désormais, elles sont aussi populaires que les équipes elles-mêmes et ont donné lieu à des films spécifiques (la série des American Girls, Fired Up !, Fab Five, The pom-pom girls...)

Pas besoin de forcer le trait : les cheerleaders sont souvent des caricatures de l'Amérique blanche et réactionnaire (American College).

Les ennemis adultes

Une longue liste de super-vilains s'acharnent à compliquer la vie du héros : les profs (plus ennuyeux que méchants, sauf certains ennemis personnels du héros comme le principal du collège dans La Folle Journée de Ferris Bueller), les commerçants (qui n'ont aucun sens de l'humour quand on vole dans leur magasin), la police (toujours là au mauvais moment) (Porky's).

Les profs manquent complètement d'ouverture d'esprit. Si on ne peut plus commander une pizza en cours, alors... (Fast Times at Ridgemont High). Vous avez reconnu Sean Penn ?

Un grand classique : l'essai - souvent vain - de truander l'épicier local avec une fausse carte d'identité pour acheter de l'alcool. Mais que faire quand les policiers sont encore pire que vous ? (Supergrave). 

Les parents 

Ils sont très souvent absents, momentanément (Risky Business) ou même quand ils sont là, absorbés par leur vie quotidienne. 

Et quand ils veulent aider, ne serait-ce qu'en donnant des conseils, c'est encore pire (American Pie, Les Beaux Gosses, Heathers, Palo Alto, Get over it). On retrouve ainsi un certain prolongement du cliché de la parentalité démissionnaire des films de délinquance des années 50. 

Souvent, les parents sont eux-mêmes empêtrés dans de douloureuses histoires sentimentales et conjugales (Be Bad, Rose bonbon, Mrs Tingle, 10 bonnes raisons de te larguer, La Gifle, La Boum), à tel point que le seul but d'une mission dans le passé n'est pas d'empêcher l'assassinat du président Kennedy mais de sauver ses propres parents (Retour Vers le Futur). La figure du père est si défaillante dans 17 ans encore que le retour dans son corps d'ado n'a pas moins pour enjeu que de reconstruire un rôle paternel digne de ce nom. Fab Five réussit l'exploit de présenter une gamme quasi-complète d'adultes incompétents (profs démissionnaires, parents aux ordres de leurs enfants) : la seule qui s'en sort n'a pas d'enfants... Comme l'a bien résumé David Lebreton : "la culture des pairs supplante celle des pères, la transmission s'efface devant l'imitation". Une exception : License to drive avec des parents en couple, normaux, rationnels, présents et soucieux d'éduquer leur progéniture.

"Tu vas être bien sage pendant notre voyage, hein ?" 

(Risky Business)

Rien de pire que les conseils embarrassants d'un père trop bien attentionné (American Pie 1)

"Nos parents sont aussi désorientés et aussi perdus que nous. Ils ont peur de tout eux aussi" (Mauvaises fréquentations).

Beauté du hors-champ : tout est dans les regards, la déception envers le père absent, la compassion de la petite amie (The spectacular now)

Le message est clair : pour se construire, les jeunes ne peuvent compter que sur eux-mêmes.

Les adultes seront au mieux absents, au pire vaguement gênants et assez bien placés comme obstacles motivants dans le scénario du film.

Du coup l'entraîneur sportif joue souvent le rôle du père de substitution dans les nombreux teen movies sportifs...

Et même du grand-père de substitution (Karaté Kid 1). Les amateurs du même acteur avec le même rapport au papi le retrouveront dans Crossroads.

La môman

C'est simple : soit elle est castratrice si elle est la mère du héros (Risky Business, Les Beaux Gosses, voire Me, Earl and the dying girl), ou psychorigide si elle est la mère de l'héroïne (Freaky Friday, For keeps), avec parfois même des tendances affirmées à la folie (Wild in the Streets, Carrie); soit elle est attirante et source de fantasmes si elle est la mère d'un autre (la "maman de Stifler" dans American Pie, Supergrave). A noter quelques cas multi-classés, comme la mère du héros qui travaille dans le même lycée que le fiston (la tehon), comme infirmière (la tehon x 2) et qui fait une démonstration de pose de préservatif sur un pénis géant devant tous les élèves (la tehon²) dans Dangereuse séduction.

Un mère castratrice, sur un mode rigolard et inquisiteur (Les Beaux Gosses), harcelant son fils chéri sur sa vie sentimentale et sexuelle dans les moments et les lieux les plus incongrus.

Une mère tentatrice et initiatrice : la désormais mythique "maman de Stifler" (American Pie). Elle transforme un des ados (Paul) en homme. Quelques films abordent le fantasme de l'initiation par une femme mûre (Un été 42).

Dans Me Earl and the dying girl, on a même un doublé : une mère un peu pénible qui mène son fils par le bout du nez et un père toujours présent à la maison mais bizarrement complètement effacé.

Dans For Keeps, l'héroïne est clairement coincée entre les exigences contradictoires de son beau-père et de sa mère, à qui elle finit par balancer qu'elle n'a pas besoin d'une copine mais d'une vraie mère.

Le petit frère (ou la petite sœur)

Les héros rejettent souvent, de manière radicale voire violente, la tranche d'âge précédente. Elle s'incarne la plupart du temps dans le petit frère ou la petite sœur avec qui les rapports sont souvent conflictuels. 

Cette enfance, que l'ado vient de quitter, représente ce que le héros veut fuir (16 bougies pour Sam, Fired Up !, American Girls). Le petit frère (ou petite sœur) n'a souvent qu'une envie : tout faire comme son aîné(e), pour lequel (laquelle) il (elle) voue une admiration inavouable (Can't buy me love). 

Il ne faut pas moins qu'un voyage dans le temps pour oser envisager une réconciliation avec sa petite soeur (Peggy Sue s'est mariée) ou à défaut un échange de corps avec sa mère (Freaky Friday) ou une grosse crise (The edge of seventeen).

Exemple d'insupportable petit frère, qui prend un malin plaisir à tyranniser sa sœur dans "16 bougies pour Sam". Son accessoire auditif sent bon les années 80.

En revanche, la figure du grand frère ou de la grande sœur est presque aussi absente que celle des parents. 

Il est rare de voir un grand frère prodiguer des conseils bienveillants (American Pie, Book of love). 

Dans Scream, le grand frère d'une des héroïnes est carrément policier... tout pour plaire.

Un exemple rare de grand frère protecteur, initiateur et libérateur (Sing Street)