Les réalisateurs

Même les grands...

De grands réalisateurs se sont essayés au teen movie et pour certains, ce fut un coup de maître : George Lucas (American Graffiti), Francis Ford Coppola (Outsiders, Rusty James, Peggy Sue s'est mariée), Brian de Palma (Carrie), John Landis (American College), John Carpenter (Halloween), Wes Anderson (Rushmore), Elia Kazan (La fièvre dans le sang).

Certes, certains d'entre eux ne s'en vanteront sans doute pas outre mesure : Alan Parker (Fame), Joe Dante (Explorers), Jerry Zucker (Rock 'n Roll High School) et son frère David (Scary Movie 3 et 4) pourtant tous deux génies de la comédie...

Le jeune George Lucas sur le tournage d'American Graffiti. Il dut faire preuve d'une ténacité sans faille pour mener son projet à bien et reçut le parrainage de Francis Ford Coppola, un ami, qui lui servit de caution auprès d'Universal (qui avait signé un chèque presque les yeux fermés, pour retrouver un petit jeune pouvant assurer un nouveau succès tel qu'Easy Rider, à condition qu'il y en ait pour moins d'1 million de $). Si le responsable du studio et la critique accueillirent mal le film, il connut d'emblée un gros succès public, ce qui permis à Georges Lucas de devenir millionnaire et de se lancer dans un projet intitulé ... "la guerre des étoiles". Merci qui ? Merci le teen movie !

Le cas John Hughes

Le cas de ce réalisateur est particulier : il est considéré comme le plus grand réalisateur de teen movies (dans la famille du teen angst), alors qu'il n'a réalisé que quatre films en deux ans, au milieu des années 80 : Seize bougies pour Sam (1984), Breakfast Club (1985), Une créature de Rêve (1985), La Folle journée de Ferris Bueller (1986), La vie en plus (1988). Il est aux manettes derrière Howard Deutch dans Rose bonbon (1986) et Some kind of wonderful (1987)

Son activité totale de réalisateur n'est guère étendue (huit films). Celles de scénariste et de production le sont beaucoup plus. Il semblerait qu'il ait délibérément choisi de ne plus faire de teen movies pour ne pas être cantonné à ce genre (Maman, j'ai raté l'avion, c'est lui). Il a accordé très peu d'interviews et a fini sa vie comme agriculteur dans l'Illinois.

Alors pourquoi une telle renommée ? Elle tient surtout au regard attentionné que le réalisateur porte sur "ses" ados, traités comme des êtres à part entière, en plein devenir mais confrontés à des obstacles qui leur semblent insurmontables. Ses personnages sont crédibles et les acteurs ne surjouent pas. Le réalisateur traite leurs angoisses avec respect, sympathie et un humour bienveillant. A l'époque, ce ton était en décalage complet avec le succès phénoménal de sex comedies comme Porky's.

Sa renommée est-elle usurpée ? A mon sens, elle est un peu excessive. Certes, Breakfast Club est un très bon film, qui sonne juste; certes, La Folle journée de Ferris Bueller n'est pas qu'une comédie (les rapports difficiles du copain du héros avec son père sont douloureux) et La vie en plus reste une comédie romantique délicate et attachante sur la sortie de l'adolescence. Mais Une créature de Rêve a très mal vieilli et Rose Bonbon manque un peu de rythme. 16 bougies pour Sam est presque drôle (genre qu'il évitera ensuite pour sa série de teen movies) et Some kind of wonderful est un peu désuet. Globalement, ça sent quand même beaucoup les années 80.

Il est quand même suffisamment devenu culte pour que les teen movies récents lui rendent explicitement hommage (en particulier Easy A).

Son œuvre semble illustrer un phénomène commun à tous ces réalisateurs : le teen movie est un one-shot, au mieux une courte période dans la carrière d'un réalisateur. Et à notre connaissance, aucun d'entre eux ne s'est cantonné qu'à ce genre.

John Hughes est mort jeune (59 ans).

Il a reçu un Oscar posthume pour son oeuvre.

Beaucoup d'appelés, peu d'élus...

Pour la plupart, les teen movies ont été réalisés par des réalisateurs obscurs.

Qui se souvient de Paul Brickman, Randal Kleiser, Bob Clarck, des frères Weitz, Brian Robbins, de Keenen Ivory Wayans ou de Amy Heckerling ? Ce sont pourtant les réalisateurs respectifs de films qui ont eu du succès comme Risky Business, Grease, Porky's, American Pie, American Boys, Scary Movie, Fast Times at Ridgemont High et Clueless.

On pourra donc conclure par l'équation sous genre = réalisateurs de seconde zone ou réalisateurs majeurs qui ne font que passer.

Mais dans les interviews, un point commun revient souvent : ces réalisateurs, devenus célèbres ou pas du tout, étaient tous considérés comme des nerds et des geeks dans leur lycée, ce qui aurait contribué à développer de la dérision et leur sens de l'humour. Beaucoup d'entre eux ont écrit des scénarios basés sur leurs propres souvenirs.

Alors si c'était le teen movie, la vraie revanche des nerds ?

Même un ancien membre du Brat Pat comme Emilio Estevez, ne tourne pas de teen movie une fois devenu réalisateur. Ci-dessus dans Breakfast Club; à droite : avec son pôpa (Martin Sheen)