Après la lectures de plusieurs extraits du "manifeste vagabond" de Blanche de Richemont, un matin dans le soleil du jardin, chaque participante face à son propre voyage... Sybille de B.
Il est vrai, le véritable voyage est l'inverse d'une fuite abandonnant une vie que l'on ne peut plus affronter dans sa réalité, mais surtout un chemin nous menant vers une rencontre, un instant de magie unique et révélateur de quelque recoin inconnu ou si proche et familier passé innaperçu , si proche en fait que sa proximité trouble notre perception parfois. Des êtres merveilleux, enrichissants, solaires, stellaires, la vie les déverse à nos pieds et souvent nous les piétinons, les enjambons pour nous précipiteŕ au delà comme pressés par le temps, pauvres pantins dont on a actionné le mécanisme trop énergiquement et qui se déroule telle une manivelle folle et dans ma vie un peu trop souvent, cette vie désordonnée et désespérée, dans une accélération sans but.
La mer a toujours été ma mère et où que me porte mon voyage si les vagues étaient présentes, ma force me suivait pendant que j'avançais. Mais si la mer nous parle et partage avec nous ses merveilles, qu'avais-je à lui donner, à partager avec elle autre que l'éblouissement de ses reflets, autre que la chanson répétitive du cinéma intime et restreint qui constitue ma vie ?
J'ai eu mal, j'ai eu froid au coeur, me suis congelée pour arrêter de saigner et ai pris la route, celle de l'Ouest une fois de plus.
En l'occurence la route avait la forme d'un grand oiseau rutilant qui m'accueillit dans ses flancs métalliques pour me déposer au bord d'un océan inconnu, sculpteur de côtes sauvages chefs d'oeuvres de Titans artistes omni-puissants.
La Californie entrebaillait le passage afin de donner à mes yeux la conscience de leur pouvoir de stockage, le sentiment devant un paysage si infini de ne pouvoir emmagasiner autant de beauté, lumière et émotions inconnues. Le brouillard gris dans lequel je m'étais enroulée m'accompagnait partout en dépit de la radiance du ciel, du soleil tout puissant, de l'immense puissance de la couleur. Je demeurais dans la grisaille confuse et poisseuse, je stagnais telle une eau malsaine et devenais cet après midi là, cloaque.
Ces moments incrustés dans mon être je ne les oublie pas.
En suivant les indications "sanctuaire animalier" j'ai échoué sur une petite plage royaume minuscule de phoques nous ayant choisis comme spectateurs de leurs jeux, de leurs habiles cabrioles et impressionnantes plongées. Mon regard fixe et vide n'arrivait pas à suivre leurs acrobaties et dériva vers les vagues sur lesquelles ils surfaient, vagues ascendantes glissantes, déferlantes soudain explosées, prêtes à recommencer à l'infini comme la vie elle même.
Combien dura cette fascination aquatique je ne sais, mais soudain je ne fut plus ce corps abandonné de son fluide echoué sur le sable, j'étais la vague, j'étais cette masse houleuse puissante, très puissante forte au point de s'anéantir pour mieux se re constituer assez forte pour détruire et re créer assez légère pour amuser les phoques en les faisant surfer sur son dos.
Je sais maintenant ce qu'est l'appartenance à un tout.
Cet univers qui pour un instant m'a permis de mettre les battements de ma vie à l'unisson des siens, cet univers consolateur, implacable et berceau si doux à la fois.
Cette rencontre océanique n'aurais-je pu la faire dans des lattitudes plus familières ?
Les mêmes vagues, la même immensité liquide et salée entourant la terre tel un obi gigantesque ?
J'ai traversé longuement le monde pour enfin reconnaître les battements de mon coeur.
Dep