Ballade dans le jardin de Catherine Comment observer la nature quand la tête est emmurée dans le corps. Par bribes à travers des barreaux ou en creusant un tunnel qui mènera à la liberté au bout de longs labeurs? De profondes bouffées d’air agissent comme leviers et la liberté d’esprit, par moment semble à porté da main. Nous sommes de passage, un instant ou l’éternité, au choix. C’est dans cet état d’esprit que je me promène dans ce jardin du Perche tôt le matin. C’est le début de l’automne, le village de Saint Victor dans la vallée de la Commeauche est entouré de verdure. Il fait doux, le soleil caresse ma peau, un roucoulement de tourterelle apaise mes nerfs. L’air est pur, frais, il pénètre par mes pores et vient en aide à mes poumons. Corps réceptacle de lymphe. Savoir observer n’est pas donné à tout le monde. Les bruits apaisants de la nature tout d’abord, quelle différence avec la cacophonie insupportable des villes. L’herbe est d’un vert tendre, je respire à pleins poumons Marcher lentement parmi les carrés regorgeant de fleurs, des plantes qui s’alanguissent en ces derniers jours de chaleur. Des asters bleus attirent la lumière et leur couleur éclate sur le fond sombre d’un mur. Ombre humifère, terre riche, odorante.
Le vieux tronc tordu d’un wistéria escalade le mur de la maison enlacé à la vigne vierge éclatante de rouge.
Tout est vie dans ce jardin et je voudrais me fondre en lui.
Deux majestueux buddleia encadrent l’entrée du jardin ‘formel’. Formel jusque dans la structure des carrés bordés de buis car explosion de liberté dans la profusion de plantes qui poussent à l’intérieur et à l’extérieur.
Des mains de femme transpirent de cet agencement savant et léger, une intervention humaine respectueuse, aimante.
Une merveilleuse abelia chinensis attire mon attention par sa fleuraison abondante et gaie. Je demande le nom d’un petit arbre épineux aux fruits jaune et brillants, c’est un ponsirus trifoliatum, une sorte de citronnier.
Des variétés rares ainsi que d’humbles plantes poussent de façon spontanée.
On laisse vivre, on laisse le devenir…
Comment regarder quand on essaye de faire le silence en soi, ce silence qui permet d’observer… soleil sur la peau, objectif bien être
Des brindilles empilées forment un fagot entre deux troncs, préparatifs pour l’hiver qui approche.
Des présences discrètes comme la propriétaire des lieux, mes surprennent : un lapin à la queue érigée regarde d’un coin de porte le chemin qui monte vers la colline.
Pêle-mêle je reçois des images glanées sans méthode, le vent qui fait onduler les modestes géraniums sauvages, le choisia en fleur baigné de lumière, arbres jeunes et vieux, jardin en mouvement toujours renouvelé, interprété, observé, aimé.
Sur une petite terrasse, à l’abri derrière le salon je trouve mon bonheur, la grâce fugace de la beauté, une table ronde entourée de pots, d’hydrangeas, balsamine, crassula porte bonheur, des buis ronds et vigoureux, des vieux gants oubliés par terre et en lente décomposition, des mouches bourdonnantes…
Penchée sur la table ma main trace rapidement les lettres qui goulument cherchent à rendre tant de…tout
Le soleil illumine une grosse pierre encadrée par des gouras en fleurs, sentinelles silencieuses. Une chèvre en pierre et un singe en bois gardent les lieux. Accrochée au mur, en régule patiné, la sculpture d’un couple avec enfant auréolé - le tout emprunt d’une grande douceur - donne au lieu un charme désuet.
Des escaliers mènent au jardin et au milieu du chemin est posé un tabouret, il attend et semble dire : laissez vivre, n’intervenez pas, observez les graminées bouger dans la brise légère.
Nous sommes le 26 octobre, l’automne commence en douceur.
Corinne Olga Bunzl