Débat : le rôle des catégories dans les mathématiques
17 décembre 2014
17 décembre 2014
Prise de vue, mise en page et en ligne : S. Dugowson
Proposée, introduite et présidée par Anatole Khélif, co-présidée par Jean-Pierre Laffineur, cette séance exceptionnelle du séminaire CLE consacrée à un débat sur le rôle des catégories en mathématiques s'est déroulée le 17 décembre 2014 en salle 2014 du bâtiment Sophie Germain (Paris Diderot).
Dans un premier temps, un débat (parfois un peu houleux) a opposé notre ami le grand catégoricien Jean Bénabou à un autre de nos amis, Saab Abou-Jaoudé qui, bien que participant actif et régulier du séminaire CLE, s'affirme volontiers sceptique sur les catégories. Assumant, comme il l'a dit, ne pas connaître la théorie des catégories "plus que cela", Abou a donc accepté de jouer dans ce débat le rôle du candide.
Dans un second temps, chacun a pu participer au débat, et l'on a ainsi pu entendre : Pierre Schapira, Pierre Cartier, Marc Lachièze-Rey, Anatole Khélif, Dimitri Scarpalezos, René Cori, Gerard Grimberg et Stéphane Dugowson.
Cette séance a fait l'objet de deux prises de vue, l'une par Laurence Honnorat, l'autre par votre serviteur. Le film réalisé par Laurence Honnorat peut être notamment visionné au bas de la présente page. Quant à celui que j'ai tourné, il est comme à mon habitude constitué d'un nombre important de séquences incorporées tout au long de la présente page avec une structure de titres et sous-titres vers lesquels pointe plusieurs tables des matières plus ou moins détaillées.
En l’occurrence, j'ai structuré la présente page web en distinguant d'abord comme première partie 1 le débat entre Bénabou et Abou, et en essayant pour les parties suivantes de mettre en évidence les thèmes les plus importants abordés au cours des diverses interventions, malgré la dispersion et les retours qui les caractérisent inévitablement. La table des matières, dont une version détaillée est donnée en bas de page, met ainsi en exergue notamment les points suivants : relations des catégories avec les ensembles, la physique, la logique, l'informatique, la linguistique, la place à accorder aux catégories dans l'enseignement, le rôle des catégories dans le progrès des sciences et l'organisation des connaissances, etc... Tout au long de ces discussions, certaines notions ou certaines théories particulières seront évoquées : adjonction, dualité, topos, analyse non standard, etc...
S. Dugowson
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Première partie
Ensembles ou catégories ? prospérité de tels "univers"
Un langage gigantesque
Les catégories ont-elles une incidence sur le reste des mathématiques ?
Après une présentation rapide des deux "univers" que constituent d'une part les ensembles, d'autre part les catégories, Abou exprime son ressenti à l'égard du langage catégorique, jugé complexe à intégrer, et précise qu'il ne demande qu'à être convaincu que les catégories auraient la moindre incidence sur le reste des mathématiques
[Sur la théorie des ensembles]
Ensembles naïfs versus théorie axiomatique des ensembles
Schéma d'axiomes
Produit de deux ensembles construit sur... l'ensemble des parties de l'ensemble des parties de l'union de deux ensembles !
[Sur la théorie des catégories]
Elles permettent de trouver des modèles qui seraient contradictoires dans le cadre des ensembles.
Exemple 1 : Théorie de la géométrie différentielle synthétique
Exemple 2 : avec l'analyse non standard, deux (voire trois) sortes d'ensembles
Topos comme généralisations de la catégorie des ensembles, permettant d'avoir plusieurs sortes d'ensembles
Exploitation des analogies. Exemples : les catégories abéliennes; langage interne d'un topos; topos comme généralisation des espaces topologiques.
Limitations et intérêts de la théorie des ensembles
Les ensembles permettent d'exprimer les mathématiques de façon unifiée.
Reformulation de la question initiale : quel est l'intérêt de la théorie des catégories pour les "mathématiques courantes" ?
Aujourd'hui, la théorie des catégories est une théorie finitaire du premier ordre, contrairement à la théorie des ensembles
Grâce à quoi on peut d'ailleurs considérer les catégories internes à un topos
Le fait que les objets dans un topos aient moins de propriétés que les ensembles peut être un avantage
On peut par exemple avoir dans un topos des groupes bizaroïdes qu'on ne peut pas avoir dans les ensembles.
Sur quoi portent donc les opérations qui définissent axiomatiquement les catégories ?
Les modèles d'une théorie ne sont pas nécessairement ensemblistes
Exemple : les axiomes de groupes
Abou trouve l'exemple donné (axiomes de groupes) plus compliqué que la définition ensembliste
Jean souligne que les mêmes axiomes vont se décliner ensuite en groupes topologiques, groupes différentiels, etc...
Deuxième partie
ouverture du débat à tous les participants
Les catégories, notion ensembliste
Les catégories sont un outil formidable de compréhension unifiée
Les catégories utilisent très peu les ensembles
Si la théorie des ensembles devait être prouvée contradictoire, les mathématiques ne s'effondreraient pas
Les ensembles constituent une théorie "prospère" : ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain
Exemple : catégories de foncteurs, catégorie des catégories, etc...
Référence : le cours d'Alain Prouté.
Degrés ludiques de Christophe Chalons
Degrés ludiques versus catégories ?
Récit de la recherche de bonnes topologies sur les espaces fonctionnels : il n'y a pas d'adjoint à droite du produit cartésien des espaces topologiques, puisqu'il ne préserve pas les limites inductives.
Un théorème de Samuel (dans la théorie des ensembles de Bourbaki) sur l'existence de solution de problèmes universels... dont on ne peut rien faire en l'absence de la notion d'adjoint
L'utilité avérée des catégories
La théorie des ensembles continue à fonctionner.
L'analyse non standard fonctionne très bien dans le cadre de la théorie des ensembles.
Difficulté avec le produit cartésien.
Jean Bénabou revient sur ces deux thèmes déjà évoqués précédemment
Pierre Schapira
Stéphane Dugowson
J. Benabou & B. Loiseau, Orbits and monoids in a topos, Journal of Pure and Applied Algebra - 01/1994; 92(1):29-54.
[Sur ce sujet, voir ici l'intervention de J. Bénabou au séminaire Mamhuphi du 4 avril 2015]
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