Résumé : le piège de Don Salluste se referme sur la Reine (et sur Ruy Blas). Don Salluste a fait rédiger un courrier à Ruy Blas, au début de la pièce, demandant à la Reine de se rendre dans un lieu secret. Il demande à Ruy Blas (qui apparaît à tous ceux de la Cour et y compris à la Reine, comme Don César, un grand d'Espagne) de se rendre la nuit dans cet endroit et fait envoyer le mot à la Reine. Ainsi Don Salluste pourra dire à tout Madrid que la Reine a non seulement un amant (ce qui permettra de rompre le mariage de la Reine avec le Roi et lui fera donc perdre le titre de Reine), mais comble de malheur pour elle, son amant lui a menti depuis le début, puisqu'en réalité, il n'est pas un Grand d'Espagne, mais un valet !
Don Salluste, s’avançant à pas lents vers la reine.
Je vous tiens. — Mais je vais parler, sans lui déplaire,
À votre majesté, car je suis sans colère.
Je vous trouve, — écoutez, ne faisons pas de bruit, —
Seule avec don César, dans sa chambre, à minuit.
Ce fait, — pour une reine, — étant public, — en somme
Suffit pour annuler le mariage à Rome. [...]
Tout peut rester secret.
Il tire de sa poche un parchemin qu’il déroule et qu’il présente à la reine.
Signez-moi cette lettre
Au seigneur notre roi. Je la ferai remettre
Par le grand écuyer au notaire mayor.
Ensuite, — une voiture, où j’ai mis beaucoup d’or,
Désignant le dehors.
Est là. — Partez tous deux sur-le-champ. Je vous aide. [...]
Nous fermerons les yeux. — Obéissez. Je jure
Que seul en ce moment je connais l’aventure ;
Mais, si vous refusez, Madrid sait tout demain.
Ne nous emportons pas. Vous êtes dans ma main. [...]
Ruy Blas, comme se réveillant tout à coup.
Je m’appelle Ruy Blas, et je suis un laquais !
Arrachant des mains de la reine la plume et le parchemin qu’il déchire.
Ne signez pas, madame ! — Enfin ! — Je suffoquais !
La Reine.
Que dit-il ? don César !
Ruy Blas,
laissant tomber sa robe et se montrant vêtu de la livrée ; sans épée.
Je dis que je me nomme
Ruy Blas, et que je suis le valet de cet homme !
Se retournant vers don Salluste.
Je dis que c’est assez de trahison ainsi,
Et que je ne veux pas de mon bonheur ! — Merci !
— Ah vous avez eu beau me parler à l’oreille ! —
Je dis qu’il est bien temps qu’enfin je me réveille,
Quoique tout garrotté dans vos complots hideux,
Et que je n’irai pas plus loin, et qu’à nous deux,
Monseigneur, nous faisons un assemblage infâme.
J’ai l’habit d’un laquais, et vous en avez l’âme !
Don Salluste, à la reine, froidement.
Cet homme est en effet mon valet [...]
La Reine,
laissant enfin échapper un cri de désespoir et se tordant les mains.
Juste ciel !
Don Salluste, poursuivant.
Seulement il a parlé trop tôt.
Il croise les bras et se redresse, avec une voix tonnante.
Eh bien oui ! maintenant disons tout. Il n’importe !
Ma vengeance est assez complète de la sorte.
À la reine.
Qu’en pensez-vous ? Madrid va rire, sur ma foi !
Ah ! vous m’avez cassé ! je vous détrône, moi.
Ah ! vous m’avez banni ! je vous chasse, et m’en vante !
Ah ! vous m’avez pour femme offert votre suivante !
Il éclate de rire.
Moi, je vous ai donné mon laquais pour amant.
Vous pourrez l’épouser aussi ! certainement.
Le roi s’en va ! — Son cœur sera votre richesse !
Il rit.
1. Comment as-tu compris l'accomplissement de la vengeance de Don Salluste ?
2. Quel marché Don Salluste propose-t-il à la Reine et à Ruy Blas pour sauver l'honneur de la Reine ?
3. Analyse la prise de parole en 2 temps de Ruy Blas : pourquoi ce moment marque-t-il la fin de la pièce ?
4. Dans la dernière prise de parole de Don Salluste, analyse la construction des vers destinés à la reine. Enquoi montre-t-il la jubilation de Don Salluste ?
5. Que se passe-t-il entre Ruy Blas et Don Salluste dans cet extrait de scène ?
6. Imagine la fin de la pièce, comment cela peut-il se terminer ?