Gigéri

Date de publication : 5 janv. 2015 09:02:57

Une céphalée têtue enserrait ses tempes et l'arrière de son crâne dans une poigne d'airain.L'esprit encore embrumé, les membres endoloris, il lui semblait ressentir les craquements de la coque du navire au plus intime de son ossature, encore que le balancement chaloupé sous la puissante ondulation du flôt le berçât agréablement.

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Louis-Alexandre a du mal à se laisser gagner par le sommeil. Des images de cette terrible dernière journée qui a précédé leur fuite se bousculent maintenant derrière ses yeux ouverts sur la voûte céleste. Il revoit les vagues d'assaut successives des Turcs et des tribus kabyles, le tonnerre des mines, les explosions des dépôts de munitions, la ligne blanche et rouge des cimeterres décapiteurs. Il entend les cris sauvages des janissaires ivres de chanvre. Il revoit le flôt où baignent par dizaines les corps mutilés ou désarticulés par la mitraille et plus rougi que celui d'une madrague aux thons éventrés à l'épieu. Revient à ses narines l'odeur de sang et de tripes, celle énorme de la poudre, celle des ventres béant sur les intestins bleuis.

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