Géométrie

Étymologie de géométrie

Du mot Grec "Géometria" ("γεωμετρία " [1]) signifiant "arpenteur", celui
qui relève et détermine les terrains et limites des lopins de terre.

Mot composé de "Geo-me-tron" de "ge", la terre "me", la mesure, et "tron", l'intrument.
Le "géométrès" ("
γεωμέτρης [2]") étant le géomètre ou celui qui est arpenteur.

Au moyen âge celui qui définit, est le "géométrien" [3] terme désigent alors le "géomètre" [4] et, moins théorique, le verbe "arpenter" [5] est le propre de celui qui "marche en travers", "avançant à grand pas", sachant que "l'arpentage" est celui qui est en charge de "la mesure faite d'un terroir, d'un héritage".

Géométrie : "Géo-met-retos", reporter la mesure de la terre

Ce mot, initialement "Géo-met-retos" désigne la façon de reporter et faire savoir la mesure de la terre.

En effet, en grec le mot Gé ("γη"[6]) désigne la terre, le pays, la contrée qui est la contraction de "géa" ("γεα") racine de "ga" ("γα") qui signifie engendrer.

Si "Gé" (Γῆ ), la terre, désigne notre planète bleue ce même mot désigne surtout cette terre qui génère.

Le mot "a-geo-métrètos" outre le préfixe "a" privatif, est d'abord "géo-métretos" ou plus exactement "geo-met-retos".

En langage Indi "gyaa-miti" signifie "mesurer la terre" et "trikon-miti" signifie mesurer les formes triangulaires.

Le Sanskrit, langue qui produit les traités de mathématiques comme le Shunya (-4e siècle) et le Chand Sutra (2e siècle de notre ère), utilise le radical "mimıte", (signifiant, mesurer, mettre en ordre) et "mati" [7]et ses paradigmes dont "miyate" qui donnera le grec "met-ron" (et plus tard le latin "mensura", "metor", mesurer).

Le dictionnaire Sanskrit de Gerard Huet indique deux sens pour le radical "ma" [8] :
-1 : "mesurer" "délimiter", qui donnera le grec "metron" et le latin
"mensura","metor" ;
-2 : "troquer", "échanger".

Le dictionnaire Sanskrit Anglais ([9]) donne le radical "ma", comme signifiant "mesurer", "assigner" et "mimite"[10], "mesurer en comparant", "estimer".

Le "metron" grec et latin

Le mot "metron" grec est composé de "me" qui signifie "le savoir reporter", et du suffixe grec "tron([11])" qui désigne un dispositif, un instrument, un appareillage [12])

La racine indo Européenne "ma", "man" signifie mesurer, construire, mettre en forme).

De cette sacine "ma" découle "tomhas" (mesurer) et "measarra" (ce qui est fait avec mesure).

La racine Sanskrit "ma", donne matram (mesurer) et le Zend "mâ" signifie, mesurer, construire, et donnera le Grec "me" ("με-") que l'on retrouve dans "metron" ("μετρον" [13]) qui désigne l'instrument pour mesurer, puis le latin "metare".

Cette même origine donne le mot latin "mensa" (la table, ce qui est sur la table, la nourriture).

Le suffixe "tron" grec :

En latin le Grec "metron" devient ainsi "metrum"[14]

Ce suffixe "tron" est cité dans la grammaire Herbert Weir Smyth ([15]) avec l'exemple de "philtron", "ce qui donne l'amour"

Cependant la construction de ce mot, composé de "philia" et du suffixe "tron" est clairement donnée quand à la définition de la racine "phila", mais est hélas juste abordée pour ce qui est du préfixe "tron" que l'on retrouve dans le mot grec "théatron" (le théâtre).

Pour Christopher Faraone, ce même mot "philtron" [16] est composé de "philein" aimer, et signifie une potion d'amour, et fait référence à la grammaire Grecque de Smyth laquelle décrit la composion de mots avec le suffixe "tron", signifiant une instrumentisation, ou action. Un autre mot comme "helektron" ("ηλεκτρον" signifiant "ambre" [17]) donnera notre "électron" puis notre "électricité".

Le nom des instruments égyptiens porte le suffixe "tron" ([18]) comme "listron" la bêche, un "eisotron", un "sistre" (instrument de musique), et "eisoptron"[19] ou "enoptron" [20] ou "katoptron", un miroir (cf. supra
"μετρον").

Le préfixe "meta" a le sens de "au milieu de", ou "transposer" comme dans métaphore[21], transfert du sens d'un mot dans un autre, mais aussi le transport physique[22]

La géométrie. Le "Géo" et le "métrie"

Et différemment de "meta" dont il est issu, le préfixe Grec "met" ("μετ"[23]), signifie "reporter", "suivre de près" ou "transporter", voire "changer".

En cette idée le verbe grec "meteimi" possède deux sens :

-1 "être dans l'intervalle", sans interruption, poursuivre,
passer d'un endroit à un autre,

-2 "aller à la suite" [24], poursuivre, rechercher, au sens figuré de
"technén" ("τεχνεν"), étudier un art (en imitant à l'aide d'un outil ou
d'un ustensile[25])

Et le grec "rétos" (ρητος ([26])) est "ce qui est dit", "ce que l'on peut divulger", "ce que l'on exprime".

Ainsi en grec le mot Grec "géometrès" (γεωμέτρης [27]) désigne le géomètre et "Geometria" (γεωμετρία [28]) désigne celui qui est habile en géométrie et en cet art que Théodore de Cyrène enseigna au jeune Platon.

Platon lui même, aura comme élève un certain Aistote, le fils de Nicomaque, et, pour Aristote, il apparaît que la raison est vide avant que les sens n'entrent en action. Aristote sera ainsi de ceux qui tenteront, d'abord avec succès de définir, classifier et organiser les éléments de la vie, mais hélas les pensées d'Aristote, ne nous parviendront que difficilement [29].

Nul n’entre ici s’il n’est géomètre

Platon écrira, dit-on, ce : "Nul n’entre ici s’il n’est géomètre"

"Μηδείς αγεωμέτρητος εισίτω μου την στέγην "
(Medéis ageométrètos eisitos mou ten stegèn) ([30]).

(Notons que selon Sopatros d'Apamée [31], la formule aurait été "anisos kai adikos" ("ανισος[32] και αδικος [33] : partial et injuste) au lieu et place de "ageômetrètos"[34] relativement à cette inscription qui pourrait être apocryphe)

Mais Euripide écrira (Dans sa pièce Iphigénie, rédigée vers -472):

"Vous les grecs, homme libres ou esclaves, êtes sous l'égide des
mêmes lois concernant les homicides ?".

Ainsi l'un, comme Euripide rassemble les hommes alors que Platon lui, semble vouloir écarter ceux qui ne possèdent pas la connaissance de cette géométrie naissante en Grèce.

Socrate et Platon "auraient fait graver" au fronton de leur école, l'académie, cette fameuse devise : "Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre",

(Formule reprise par Michel Serres, augmentée de "s'il est difforme de figure ou mal proportionné des membres" [35]).

En les faits il s'agirait, à Sparte, plus encore qu'à Athènes de désigner celui qui est bien portant et qui porte les armes pour défendre la cité : le citoyen.

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(15 Décembre 2011, maj 11 janvier 2012 ; 09 sept. 2022)
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Notes et références :

[1] Dictionnaire Anatale Bailly, page 400 colonne I : géômetria ("γεωμετρια"), cité par
Hérodote comme "géométrin" et cité par Manethon d'Egypte comme géométrès
(γεωμετρης") ainsi que par Plutarque.
Au sens que le mot "Géométria" est l'arpentage ou la géométrie. Géometrès"
("γεωμετρης") étant le géomètre, l'arpenteur, donné par Platon comme "gé metréô"
("γη μετρεω").

[2] Dictionnaire Français Grec, par Alexandre, Planche et Defauconpret.
Paris Hachette 1885.
Page 508 colonne II.

[3] Dictionnaire Godefroy, volume IV, page 264, colonne II.

[4] Complément du Dictionnaire de l'Académie Française. Firmin Didot, 1842.
Page 518 colonne II.

[5] Dictionnaire historique de la langue Françoise. Curne de Saint palaye, tome II.
Page 168 colonne 1.

[6] Dictionnaire Alexandre, Planche et Defauconpret 1885 Hachette (page 922),
le globe terrestre en grec est "γη" (Gé), et "γεωδης" (Géodès) est ce qui est
semblable à la terre.
Le nom Grec de "Gaia", proviendrait du grec "Gé" (issu du Sumérien Ki) et de
l'Indo Européen "aia", la grand mère…
Notons que dans la théogonie Phénicienne, Beruth est la femme d'Hypsistus ,
mère d'Uranus et de Gé. "Gaea" est la forme poétique de Gé, la terr
(dictionnaire mythologique universel de E Jacobi page 191)
L'étymologie de notre mot terre viendrait du grec "Tarsos", qui en Grec est une
planche servant à sécher les figues, ou plus généralement une surface plane qui
donnera le tarse (du pied) et nommant en anatomie les fibres plates entourant l'oeil.
Enfin Coelus est en Latin l'équivalent du Grec Uranus, dont la femme
est Terra. En grec xeros (ξηρος) est ce qui est sec, aride, opposé à la mer, et
"η ξηρα (sous entendu γη)"
est la terre sèche ferme, par opposition à "τα υγρα" la mer (la haute mer étant en grec
"pelagos" ("πελαγος")).
Noter que la lettre Ξ (ksi) que l'on trouve dans le mot "xeros" serait notre lettre
sifflante "gs" ou ou "ks".
(Page 639 "Greek and English lexicon" de Monsieur James Donnegan 1826)

[7] Dictionnaire Sanskrit Français N Stchoupak, Nitti et Renou, Paris
Adrien Maisonneuve 1959. Page 561
colonne I : Mimite, mati miyate, : mesurer, délimiter en mesurant.

[8] Lexique Sanskrit, Gerard Huet, INRIA, 2005; page 236 . "ma", pr. r. mimıte
pr. Mati, pp. mita, mesurer, délimiter ; comparer avec. "Mıyate", être mesuré,
ériger.° Grec Metron, latin mensura, français mesure.
[9] Motilal Banarsidass Publishers page 203
[10] ibid page 599

[11] Préfixe que l'on retrouve dans le mot grec "thea-tron" (théâtre) : "Théa",
l'action de regarder, "ce que
l'on montre", ce "qui est digne d'être vu" et "tron" désigne le dispositif, l'outil.

[12] En grec "arotron" (αροτρον Anatole Bailly ed 1963 page 272 colonne III)
est la charrue, du verbe aroau, (αροω) signifiant labourer et du suffixe
"tron" instrument

[13] Dictionnaire Grec Français Anatole Bailly, page 1270, colonne II.

[14] Felix Gaffiot (page 974 colonne I) metrum : mêtre, mesure d'un vers.

[15] Edition 1920

[16] Christopher Faraone "Ancient greek love magic", Page 25

[17] Anatole Bailly Ed 1963, page 896, colonne I.

[18] Théophile Obenga "l'Egypte, la grèce et l'ecole d'Alexandrie"

[19] Anatol Bailly ed 1963 page 603 colonne III eisoptron o sesoptron un miroir

[20] Woodhouse page 532

[21] Ibid Anatole Bailly éditon 1963, page 1266, colonne I,
Metaphora, "μεταφορα" : changement, transport du sens, métaphore.

[22] Henry George Liddell, Robert Scott, A Greek-English Lexicon

[23] Anatole Bailly ed 1963, page 1258 : "méta" en grec est ce qui est au milieu,
permet de changer et "met" permet de passer d'une état à un autre, ou reporter,
comme dans le mot "metagennao" (page 1260 colonne I) signifiant "fait renaître"

[24] Anatole Bailly Ibid, met-eimi, "μετειμι", (page 1266 colonne III, 2, sens II)
aller à la suite, poursuivre.

[25] Anatole Bailly Ibid , page 1922 colonne II : "teuchos", "τευχος": ustensile, instrument.

[26] Anatole Bailly Dictionnaire abrégé page 776 : Retos ("ρητος") signifie "exprimé,
convenu , qu'on peut dire, qu'on peut divulguer". Pour Sophocle "ρητον αρητον
τ'επος" ("réton aréton t'épos"), "ce qu'il faut dire et ce qu'il faut taire", ou "le profane
et le sacré", ou encore "le bien et le mal".
Par opposition au Grec "arretos" (αρρητoς) Bailly page 275 colonne I, ce dont
on a pas parlé, ce qui est irrationnel°

[27] Dictionnaire Grec Alexandre Planche et Feauconpret (Edition 1885)
Page 508. "γεωμετρια" géométria : la géométrie

[28] Anatole Bailly Géometria (ed 1963 page 400 colonne I), arpentage, géométrie.

[29] Aristote au Mont Saint Michel. Sylvain Gouguenheim. Les Racines Grecques
dans l'Europe Chrétienne.
Paris, édition du Seuile 2008.

[30] Platon : "αγεωμετρητοσ μηδεισ εισισιτω", (ageometretos medeis eisito).
Le mot (αγεωμετρητοσ) "Agéometretos" désigne celui qui est ignorant des choses
de la géométrie, alors que le mot "geometretos" désigne celui qui est habile en
géométrie. Pour les Grecs l'on serait soit ignorant soit habile en géométrie,
il n'y aurait alors pas "d'honnète homme" ne connaissant la géométrie.

[31] Élève de Jamblique et son successeur. IVe siècle apr. J-C.

[32] Dictionnaire Anatole Bailly page 166 colonne III : inégal, injuste

[33] Dictionnaire Anatole Bailly page 26 colonne I: injuste, indocile, inique

[34] H.D. Saffrey : une inscription légendaire. Revue des études Grecques 81 (1968)

[35] Noté par David Le Breton en 2003. Essai d'Anthropologie.
Edition Métailié Paris, 2003.Page 55.