Live At Winterland

Face 1

1. Fire
2. Manic Depression
3. Sunshine Of Your Love
4. Spanish Castle Magic

Face 2

1. Red House
2. Killing Floor

Release Date
mai 1987

Face 3

1. Tax Free
2. Foxy Lady

Face 4

1. Hey Joe
2. Purple Haze
3. Wild Thing

Enregistrés professionnellement, les six concerts donnés au Winterland en octobre 1968 auraient pu donner matière à un Live du Jimi Hendrix Experience si le groupe ne s’y était pas opposé à la réécoute des bandes.
Il faudra attendre le début des années 1980 pour entendre six titres de cette série de performances sur le "Jimi Hendrix Concerts" produit par Alan Douglas, ce dernier utilisera le reliquat de ce qu’il estimait publiable pour compiler un double album relativement court : le "Live At Winterland".
La première face du Live s’ouvre sur un "Fire" au mixage radical : Douglas a supprimé la partie d’orgue de Herbie Rich, nous laissant entendre le seul trio, le choix de Douglas peut se justifier musicalement dans la mesure où l’organiste du Buddy Miles Express retirait plus qu’il n’ajoutait vraiment au morceau, force est de reconnaître que ce mixage est assez efficace.
"C'est une histoire à propos d'un mec qui aimerait faire l'amour à sa musique plutôt qu'aux sempiternelles femmes ordinaires OK ?"
Suit une bonne version de "Manic Depression" (dont c’est la seule version soundboard officielle), d'autant que c'est un morceau dont la mise en place n'est pas des plus faciles : les 3/4 ternaires se font plutôt rares dans un contexte rock, Jimi assure d'ailleurs un chant correct malgré la complexité rythmique, Il se bat un peu avec sa guitare en début de solo, mais les tensions créées correspondent bien à l'ambiance du titre, "Cry on guitar !" lâche-t-il avant de reprendre le dernier couplet.
A noter la partie instrumentale de Mitch Mitchell, qui excelle dans sa performance.
"Bon, maintenant on aimerait faire un titre, de mecs vraiment super, c'est vraiment dommage, cette nouvelle qui circule comme quoi ils se séparent ou un truc comme ça. C'est un des groupes les plus importants du monde, vous savez."
Jimi précise qu'il parle de Cream, puis que "Ce n'est pas histoire de dire qu'on peut jouer le truc mieux qu'eux... hum, c'est histoire de montrer qu'on a pigé les mecs, et qu'on a pigé la chanson, qu'on aimerait faire à notre sauce..."
Cette version instrumentale de "Sunshine Of Your Love" commence sur de très bonnes bases : l'Experience est alors sans doute le seul groupe à pouvoir rivaliser en terme de puissance avec Cream.
Après l'exposé du thème, Noel Redding se lance dans un solo de basse au son incroyable (peu de guitaristes jouent avec un son aussi saturé !) alors que Jimi l'accompagne de sa guitare en tant que percussionniste.
Après quelques accords diaboliquement placés, Hendrix cite le "Outside Woman Blues" de Cream (du même "Disreali Gears"), puis le groupe plonge tête baissée dans une improvisation du style de celles de Cream : la notion de soliste et d'accompagnateur se dilue au profit de l'improvisation collective.
Le groupe conclut en reprenant le thème : c'était un bel hommage que l'Experience rendait ce soir-là à Cream !
"Spanish Castle Magic" est présentée dans une version solide (et relativement courte), malgré les problèmes techniques rencontrés lors du concert dont le titre est extrait, le chant de Jimi est irréprochable, mais c'est le groupe dans son ensemble qui impressionne : solidité rythmique de Redding, inventivité éclatante de Mitch Mitchell et un solo très inspiré de Jimi, dont les idées fusent comme aux meilleurs jours.
La face 2 commence par la présentation d’un titre alors largement ignoré du public américain car absent (au grand regret de Jimi) de la version US de leur premier album : "Red House".
Le premier cycle de 12 mesures du solo est étonnant : Hendrix attaque avec un son très tranchant (même s'il fait un sacré pain à un moment) alors que Noel Redding joue une ligne de basse pour le moins étrange, qui passe mieux quand Mitch Mitchell met le turbo au début du second cycle.
A ce stade, l'hostilité entre Redding et Hendrix est presque palpable musicalement, le troisième cycle est marqué par le passage en accords percussifs en contretemps, presque jazzy... mais, contrairement à la version du concert donné la veille, Jimi reprend le chant tout de suite après.
Il change la fin du dernier couplet de façon radicale :
"Si mon bébé ne m'aime plus...
Seigneur je sais très bien que sa sœur grassouillette au gros cul le fera... Heu, laissez-moi le dire correctement !...
Sa soeur le fera !"
Cette version est malheureusement loin d'être une des meilleures, celle jouée la veille était autrement plus convaincante, elle sera d’ailleurs retenue sur le "Variation On A Theme" publié un peu après par Douglas.
L’autre titre de cette face est aussi un blues : c’est le "Killing Floor" de Howlin’ Wolf où le groupe est rejoint par Jack Casady à la basse, la version ne rivalise pas en puissance avec celle de Monterey, mais reste de bonne tenue. Hendrix et Mitchell donnent de leur personne, mais le rendu des deux basses est moyen (et assez confus) : plus de concision n'aurait sans doute pas nuit à l'ensemble.
Le second disque s’ouvre avec "Tax Free", qui s'étirait en fait sur une vingtaine de minutes, a priori en raison de problèmes techniques obligeant Mitch Mitchell et Noel Redding à combler pendant plus de 11 minutes.
La version publiée sur le "Live At Winterland" est très largement éditée : il ne subsiste rien de cet intermède, le travail de Douglas est d'ailleurs plutôt bien vu car, à ce stade, c'est la meilleure version proposée par le groupe au Winterland.
Le thème est parfaitement exposé par Jimi, et sa première improvisation de qualité, pour ceux qui ne possèdent pas la version complète : le groupe reprend un peu avant que Jimi ne surfe sur les harmonies du "Tomorrow Never Knows" des Beatles, précédant un passage en feed back rappelant son travail en studio sur "Cherokee Mist".
De même que pour "Fire", Douglas propose un mixage trio de "Foxy Lady" (en prêtant l'oreille, on entend tout de même l'orgue par moments) plutôt judicieux dans la mesure où l’orgue avait des problèmes de justesse relative avec le reste du groupe.
La version de "Hey Joe" qui ouvre la face 4 est fabuleuse, le groupe réussit en effet de main de maître les nouveaux arrangements de son introduction, et le chant de Jimi est tout simplement excellent.
Le premier solo de Jimi, très bon, diffère notablement de la version studio (avec un son proche du Clapton de "Disreali Gears"), à noter aussi une fin de morceau où Mitch Mitchell casse la baraque, Il va sans dire que retenir ce titre pour le "Live At Winterland" relevait de l'évidence.
Tout n'est pas parfaitement en place sur "Purple Haze", mais la version est énergique, servie par l'enthousiasme de groupe, là encore, la présence de ce titre sur le "Live At Winterland" se justifie sans problème.
Il n'en va pas de même pour "Wild Thing", d’autant que cette version était déjà présente sur "The Jimi Hendrix Concerts" ! On est loin de la magie de Monterey : le solo de Jimi semble plus visuel qu'autre chose…
Au final ? Un Live alors essentiel du Jimi Hendrix Experience, même si les choix opérés alors par Douglas continuent à poser question...