04 septembre 1970

Berlin (Deutschlandhalle)

Titres :
1. Straight Ahead
2. Spanish Castle Magic
3. Sunshine Of Your Love
4. Hey Baby (New Rising Sun)
5. Message To Love
6. Machine Gun
7. Purple Haze
8. Red House
9. Foxy Lady
10. Ezy Ryder
11. Hey Joe
12. Power Of Soul
13. Lover Man

Berlin, 4 septembre 1970, avant-dernier concert de Jimi Hendrix, embarqué dans une tournée dont il ne voulait pas, les concerts de Jimi sont très inégaux depuis celui de l'Ile de Wight., Robin Trower, à jamais marqué par ce concert, félicita Jimi pour la performances de son groupe, mais Jimi déclina le compliment.
Jimi commence par exécuter quelques traits flamenco électriques... mais c'est avec Straight Ahead que le trio ouvre le concert berlinois, dès les premières mesures chantées, un constat s'impose : la voix de Jimi est terriblement fatiguée, il est obligé de forcer dès qu'il monte dans les aigus, plus encore qu'à l'Ile de Wight, Jimi lutte avec sa musique; Physiquement.
Les choses ne s'améliore pas sur Spanish Castle Magic, où Jimi zappe la moitié des paroles, et chante douloureusement le reste, en revanche, les qualités instrumentales de la performance sont bien présentes.
Toute sa carrière, Jimi a régulièrement puisé certaines de ses citations dans le répertoire de Cream, pour autant, la version de Sunshine Of Your Love qui suit est tout de même une bonne surprise car c'est la seule et unique version du trio Hendrix/Cox/Mitchell connue à ce jour, elle est d'ailleurs interprétée dans un style radicalement différent des versions explosives de l'Experience : préfigurant la carrière solo de Clapton dans les années 70, Jimi propose une version presque laid back du titre de "Disreali Gears" ! Les Beatles sont eux aussi à l'honneur : Jimi cite "I Feel Fine" puis "Day Tripper", dans une reprise qui, bien que surprenante, tient la route.
Le public allemand ne fut pas tendre avec Jimi en septembre 1970 : après l'exposé du thème d'introduction de Hey Baby (New Rising Sun), alors que Jimi débute son solo, les sifflements montent distinctement de l'audience, Jimi attaque le chant d'une voix fatiguée, même si la composition lui permet de ne pas trop forcer, il s'abstient d'ailleurs de chanter les passages plus aigus du refrain, comme à d'autres reprises lors de cette ultime tournée, Jimi interrompt le titre avant le second couplet...
... et lance l'introduction de Message To Love, joué sur un tempo énergique, instrumentalement, il n'y a rien à redire à la performance : c'est une version solide dont la seule surprise réside dans le son du solo, joué presque sans saturation.
Vient ensuite Machine Gun, c'est une page d'histoire qui se referme : c'est l'ultime version du titre récent le plus important de son répertoire Live, le chef d'œuvre de son dernier album en date et Jimi n'a pas loupé ce rendez-vous avec l'histoire dont il se serait bien passé : c'est une version extraordinaire de "Machine Gun" qu'il proposa au public de Berlin ce 4 septembre 1970.
Les problèmes vocaux rencontrés depuis le début du concert passent relativement bien ici, car Jimi double la plupart des parties vocales avec sa guitare, comme à son habitude, le solo central est certainement l'un des plus extrêmes de toute sa carrière, durant une minute trente, Jimi exprime toute la beauté qui peut se dégager de la violence, le solo final est va plus loin encore : au-delà des notes, Jimi développe un magma sonore puissamment évocateur dont l'intensité est exceptionnelle.
La suite est plus calme, le passage où il combine hammer et jeu de vibrato mélange parfaitement lyrisme et malaise, il cite ainsi le thème de "The Breeze And I", soutenu par un rythme bolero lancé par Mitch.
Sans conteste une des plus belles versions de "Machine Gun".
Purple Haze prolonge cette explosion de violence, avec un chant qui passe moyennement mais dont les parties de guitares compensent les faiblesses, Jimi transforme son hit de 1967 en un rock confinant au cauchemardesque.
Le climat se détend considérablement avec Red House, dont l'introduction, blues et calme, est remarquable, la voix de Jimi passe plutôt bien lors des couplets, le solo débute relativement calmement, mais à la sixième minute, le titre sombre complètement : sans doute en raison d'une corde cassée, Jimi se retrouve totalement désaccordé, il se fait copieusement siffler... même si une partie du public applaudit alors en réaction, lors du dernier couplet, Jimi ne tente même pas de placer un accord...
A
vec Foxy Lady, les problèmes techniques sont manifestement réglés, cette version ne rajoute toutefois rien à la légende : il a pas mal de flottements dans sa mise en place.
Jimi joue le riff d'introduction de Ezy Ryder, mais cède la place à Mitch qui joue seul le rythme qu'il applique à cette composition un moment, c'est un "Ezy Ryder" plutôt réussi que le groupe nous offre, avec un solo court mais original, le chant est très moyen lors du pont... mais c'est malheureusement récurrent.
Sur Hey Joe, Jimi peut poser sa voix sans trop forcer, soutenu maladroitement par les chœurs approximatifs de Billy Cox, nous avons le droit à la deuxième citation de "I Feel Fine" de la soirée.
La grosse surprise de la setlist est sans conteste Power Of Soul : uniquement joué lors de la balance de Berkeley, ce titre n'a jamais été interprété en concert par le trio Hendrix/Cox/Mitchell, Jimi semble très désaccordé lors des premières mesures... mais les choses s'améliorent pourtant rapidement, pour autant la composition ne décolle pas comme lors des shows du Fillmore, où le Band Of Gypsys était dans son élément, Jimi commence à chanter le premier couplet, mais n'insiste pas...
... et sans transition, joue une version instrumentale de Lover Man, au tempo plus modéré que d'habitude.
Au final ? Guitaristiquement, un grand concert de Jimi. "Machine Gun" est phénoménale, si Jimi n'avait pas ses problèmes de voix, sans doute l'un des meilleurs concerts de l'année.