Littérature

Illustration générée par une intelligence artificielle (avec Bing), sur la base des indications fournies par Narjes Asadi. Cette image représente la naissance de Zâl, le fils de Sâm (un héros mythologique iranien) dans son grand palais. L'IA a imaginé ce moment extraordinaire en ajoutant la présence d'un ange au-dessus du bébé, comme si cette naissance était un cadeau divin.

La naissance de zÂl,
l'enfant aux cheveux blancs

Narjes Asadi, le 22 avril 2024

Voici le premier chapitre d'un conte inspiré d’un livre poétique iranien très ancien et très connu qui s’intitule le Livre des rois (Shahnameh). Ce livre a été écrit par le poète persan Ferdowsi, au Xe siècle. Il a écrit ses poèmes dans un style épique. Ce conte est inspiré d'un de ses poèmes. Dans ce chapitre, il y a un personnage très important qui se nomme Sâm, un champion et un héros iranien de l’époque dont Ferdowsi parle dans plusieurs poèmes. Le personnage Nobahar, en revanche, n’existe pas dans la version originale; elle est née dans la tête de l'écrivaine... 

Nobahar était une belle femme. Les tremblements de ses mains sur son visage en pleurs lui donnaient une grande beauté, semblable au reflet de la pleine lune brillant sur un étang limpide ridé par la brise. Elle essuyait ses larmes et embrassait son petit bébé.   

À travers ses larmes et les reflets de la lumière, le visage de son fils devenait de plus en plus clair. Il était comme une rose rouge avec des mains et des cheveux illuminés par la clarté argentée de la lune. Ses yeux brillaient, enfoncés entre ses cils blancs, en regardant tendrement sa mère.

Nobahar murmurait lentement et doucement à son fils : « D’où viens-tu ma vie? De quel territoire? De quel ciel? Tu viens du paradis ? Que tu es beau, avec ces cils argentés qui amplifient l'éclat de tes yeux et embellissent davantage tes joues couleur de tulipe! De quelle déesse céleste as-tu hérité?

Ah, mon beau fils, tes yeux me rappellent la beauté des yeux de ton père Sâm. As-tu senti les fleurs de paradis? D'où viens-tu, mon beau garçon, avec tes cheveux blancs de sage?»

Sept jours après cette naissance extraordinaire, personne n’était assez courageux pour annoncer cette nouvelle au héros Sâm. Finalement, l'une des dames de compagnie l’en informa. Il se précipita vers le palais de Nobahar, avec des yeux étincelants et pleins d'espoir en allant voir le bébé. 

Après avoir vu son fils blanc, il fut très déçu et en colère. Sans prêter attention à Nobahar et à ses yeux aimants, il arracha immédiatement son bébé des bras de sa mère et s'en alla vers une destination inconnue. 

Les jours passaient sans nouvelle de Sâm et de son bébé...

Nobahar était déçue et mélancolique, le récit de sa maternité était déjà fini... avant même qu’elle ait pu goûter le plaisir d’être mère. Elle retrouvait toujours le doux parfum de son bébé qui était partout. Elle n’aurait jamais imaginé que son grand amour Sâm pourrait la séparer de son fils, une séparation éternelle. 

À suivre...

Le soleil et la lune

Charles Trenet, 1939

Cette chanson de l'auteur-compositeur-interprète français célèbre, Charles Trenet, raconte l'histoire d'amour impossible entre le soleil et la lune, puisque l'un luit le jour, tandis que l'autre luit la nuit... Cependant, lundi dernier, cette rencontre improbable a bien eu lieu! 

Voici les paroles de la chanson, suivie de quelques images de l'éclipse du 8 avril 2024.

Sur le toit de l'hôtel où je vis avec toi

Quand j'attends ta venue mon amie

Quand la nuit fait chanter plus fort et mieux que moi

Tous les chats tous les chats tous les chats

Que dit-on sur les toits que répètent les voix

De ces chats, de ces chats qui s'ennuient

Des chansons que je sais que je traduis pour toi

Les voici, les voici, les voilà


Le soleil a rendez-vous avec la lune

Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

Ici-bas, souvent chacun pour sa chacune

Chacun doit en faire autant

La lune est là, la lune est là

La lune est là, mais le soleil ne la voit pas

Pour la trouver, il faut la nuit

Il faut la nuit mais le soleil ne le sait pas et toujours luit

Le soleil a rendez-vous avec la lune

Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

Papa dit qu'il a vu ça lui


Des savants avertis par la pluie et le vent

Annonçaient, un jour la fin du monde

Les journaux commentaient en termes émouvants

Les avis, les aveux des savants

Bien des gens affolés demandaient aux agents

Si le monde était pris dans la ronde

C'est alors que docteurs, savants et professeurs

Entonnèrent subito tous en chœur


Le soleil a rendez-vous avec la lune

Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

Ici-bas, souvent chacun pour sa chacune

Chacun doit en faire autant

La lune est là, la lune est là

La lune est là, mais le soleil ne la voit pas

Pour la trouver, il faut la nuit

Il faut la nuit mais le soleil ne le sait pas et toujours luit

Le soleil a rendez-vous avec la lune

Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

Papa dit qu'il a vu ça lui


Philosophes, écoutez cette phrase est pour vous

Le bonheur est un astre volage

Qui s'enfuit à l'appel de bien des rendez-vous

Il s'efface, il se meurt devant nous

Quand on croit qu'il est loin, il est là tout près d’nous [de nous]

Il voyage, il voyage, il voyage

Puis il part, il revient, il s'en va n'importe où

Cherchez-le, il est un peu partout


Le soleil a rendez-vous avec la lune

Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

Ici-bas, souvent chacun pour sa chacune

Chacun doit en faire autant

La lune est là, la lune est là, la lune est là

La lune est là, la lune est là mais le soleil ne la voit pas

Pour la trouver il faut la nuit

Il faut la nuit mais le soleil ne le sait pas et toujours luit

Le soleil a rendez-vous avec la lune

Mais la lune n'est pas là et le soleil attend

Papa dit qu'il a vu ça lui

Papa dit qu'il a vu ça lui!

Photos de Maryna Fomenko, Esteban Vera Ruiz Raquel Rezende et Alireza Saatsaz

Rimes masculines et féminines

La Valse, statuette en bronze de la sculptrice française Camille Claudel (1905)

La Voix du 311, le 16 avril 2024

Les étudiant(e)s en français de niveau 8 ont travaillé sur la reconnaissance des noms masculins et féminins. Voici une sélection de poèmes dont les rimes alternent les terminaisons typiques. Vive l'art de jouer avec les mots!

La mélancolie du mage

Ahmad Hemadi

Mon coeur est enfermé dans une cage

Je ne peux ouvrir de nouvelle page

Mon esprit ne quitte pas son image

Je suis un coquillage sur la plage


Ma tristesse grandit et augmente avec l'âge

Je pense beaucoup au départ et au voyage

Mais partir loin d’ici n’est que du maquillage

Mais où est donc la fuite et où est le passage?

À la poursuite de mon histoire

Narjes Asadi

C’est quoi la vie, et ma mission?

Je cherche toujours une solution.

Dois-je suivre la tradition?

Ou est-ce mieux l’invention?

Je rêve devant la télévision

Qu’est-ce qui se passera après cette session?

Je dois finir les révisions

Et je ne ferai pas de révolution


Il faut trouver un espoir

Où? Peut-être dans ma mémoire

Je vois mon âme sous les battoirs

Qui me dirige dans un miroir

vers un grand territoire

où je poursuis mon histoire

Rêves de jeune fille

Oksana Rusinova

Quand elle était une jeune fille, 

Elle habitait dans une grande famille. 

Elle n’avait pas de possibilité 

de bénéficier d’une libre mobilité


Elle rêvait d’un petit voyage 

Pour trouver un meilleur paysage. 

Elle voulait naviguer en bateau 

et se reposer dans un beau château


Dans sa tête elle laissait ce message  

En espérant le réaliser sans dommage 

Un jour, elle a dit: je déménage!

Maintenant, elle vit au château et sur la plage  

Ma folie

Poème d'Anastasiia Goma, le 13 avril 2024

Cette folie a changé ma vision

Pour quelque temps, et non pas pour toujours. 

Elle était devenue ma religion,

Je la suivais alors, jour après jour. 


Elle m'a tant inspirée… tout au fond 

Tellement brillait mon âme envoutée...

Sa chaleur merveilleuse qui confond,

M'a entourée, m'a fait tout oublier.


Puis nous avons un peu joué ensemble,

Nous avons parlé, avons ri, beaucoup.  

Elle était tout pour moi… Tout, il me semble! 

Soudainement, elle m'a prise au cou...




Elle m'a dévoilé tous mes secrets,

Le vide en moi à été révélé.

J’ai de la gratitude, sans regrets - 

Grâce à elle, je me suis réveillée. 


Je l'aimais tellement, de tout mon coeur, 

J'ai sacrifié mes valeurs et mon être.

Oui, j'accepte: elle est ma plus grande erreur,

Même si c'est douloureux de l'admettre...


Merci, ma folie, ma partie à moi, 

Tu resteras dans ma vie à jamais.

Je ne pourrai plus m'approcher de toi,

Tout est bien fini, juste comme il se devait....

Détail du Miroir Psyché, de la peintre française Berthe Morisot (1876)

Contes traditionnels des quatre coins du monde

La Voix du 311, le 28 février 2024

Voici une sélection de contes et légendes venus d'Europe, d'Asie ou d'Amérique, qui ont traversé les générations et les océans...

La renarde et la grue

Conte traditionnel d’Ukraine

Il était une fois une renarde et une grue qui habitaient à proximité et se rencontraient parfois dans la forêt.

Un jour, en rencontrant la grue, la renarde dit: «Ma chérie,  je t’invite chez moi pour demain, je vais te régaler, te gâter. Viens ma commère, je vais t'attendre!» La grue répondit: «D'accord ma voisine, je vais venir avec beaucoup de plaisir!»

La  renarde prépara du porridge au lait et l’étala dans une assiette plate et le mit sur la table. 

Quand la grue vint, la renarde l’invita à se servir en commentant: «Ma chérie, régale-toi, c’est mon repas préféré, je l’ai préparé spécialement pour toi.» La grue  essaya de le picorer, mais elle ne put pas manger sa portion, tandis que la renarde lécha son assiette avec un énorme appétit. La grue resta affamée et offensée, mais elle la remercia et l'invita pour le festin prévu chez elle.

En attendant la renarde, elle prépara du riz avec de la viande et le mit dans une cruche à col étroit...

La renarde, qui  était  très contente en prévision d’une délicieuse gourmandise, accourut chez la grue, mais à sa surprise, la grue posa devant elle la cruche. La renarde commença à tourner autour de la cruche, néanmoins elle ne put pas manger alors que la grue picorait et picorait...

Après cette situation, elles ne furent jamais plus amies et ne se parlèrent plus.

Donc on reçoit l’écho de ce qu’on crie.  On récolte ce qu’on sème. Traitez tout le monde comme vous souhaitez être traité.  

illustrations: N. Serdyukova

Les trois petits cochons

Conte traditionnel britannique, très populaire en Amérique Latine

Il était une fois trois petits cochons qui habitaient avec leur mère dans la forêt.

Un jour, la mère décida de forcer ses enfants à sortir de la maison pour qu'ils soient indépendants.

Le premier petit cochon qui s'appelait Nif-Nif décida de construire sa maison avec de la paille, le deuxième petit cochon qui s'appelait Nouf-Nouf décida de construire sa maison en utilisant du bois et le troisième petit cochon qui s'appelait Naf-Naf bâtit sa maison avec de la brique, même s'il n’avait pas le temps d’aller jouer avec ses frères.

Les petits cochons ne savaient pas qu'il y avait un loup affamé dans la forêt...

Le loup trouva la maison de Nif-Nif, frappa à la porte en disant: “Petit cochon, laisse-moi entrer! Sinon, je soufflerai et soufflerai et la maison s'effondrera”. Le cochon n' ouvrit pas la porte et le loup commença à souffler. Dès le premier souffle, la maison tomba. Nif-Nif s'enfuit vers la maison de son frère Nouf-Nouf.

Le loup trouva la maison de Nouf-Nouf, frappa à la porte en disant: “Petits cochons, laissez-moi entrer! Sinon, je soufflerai et soufflerai et la maison s'effondrera”. Les cochons n'ouvrirent pas la porte et le loup commença à souffler. Dès le premier souffle, la maison tomba. Nif-Nif et Nouf-Nouf s'enfuirent vers la maison de leur frère Naf-Naf.

Quand le loup trouva la maison de Naf-Naf, il frappa à la porte en disant: “Petits cochons, laissez-moi entrer! Sinon, je soufflerai et soufflerai et la maison s'effondrera”. Les cochons n'ouvrirent pas la porte et le loup commença à souffler. Après le premier, le deuxième… et le centième souffle, la maison n'était toujours pas tombée.

Le loup décida d'entrer par la cheminée car la maison était très solide et bien construite, mais les trois petits cochons préparèrent une soupe et le loup tomba dans la marmite, qui était très chaude. Après ça, le loup s'enfuit en promettant de ne jamais plus déranger cette famille.

La persévérance est une bonne pratique, même si on doit faire des sacrifices pour atteindre ses objectifs. Un travail bien fait vaut mieux qu’un travail vite fait.

Sésame, ouvre-toi!

Conte traditionnel oriental

Il était une fois un pauvre bûcheron qui s’appelait Ali Baba et qui avait une servante très intelligente dont le nom était Marjaneh.

Un jour, il alla dans la forêt et coupa des arbres près d’une caverne. Soudain, Ali Baba vit 40 voleurs qui y allèrent en disant: «Sésame, ouvre-toi!» À sa surprise, cette formule magique ouvrit la porte de la caverne où les voleurs entrèrent et dont ils repartirent en tenant des trésors.

Ali Baba essaya d’y entrer  en utilisant  cette formule magique et il réussit à obtenir des trésors pour lui-même. 

Quelques jours passèrent et son frère, Qasim , découvrit le secret. Malheureusement, Qasim oublia la formule magique après être entré dans la caverne et sans pouvoir en sortir. Il fut tué par les voleurs. 


Ali Baba trouva le corps de son frère dans la caverne en cherchant, puis il retourna à la maison mais les voleurs le suivirent Ali Baba en se cachant et, finalement, les voleurs trouvèrent sa maison et décidèrent de le tuer. 

Alors, les 40 voleurs entrèrent dans la maison d’Ali Baba en tant que voyageurs et le chef des voleurs cacha tous les autres voleurs dans des cruches et il commença  à parler avec Ali Baba...


Mais la servante d’Ali baba douta et essaya de voir dans les cruches… Elle vit qu'il y avait beaucoup de personnes dans les cruches. Elle prit un grand couteau et tua chacun des voleurs et cria à Ali baba:  “Attention, attention! Ce sont des voleurs.” Finalement, la servante sauva la vie d’Ali baba.


On peut dire que, quand on voit quelque chose de bizarre, on doit faire attention. On peut aussi conclure de cette histoire qu’il ne faut pas mépriser l’intelligence des servantes. 

Les invités non invités

Conte traditionnel persan

Il était une fois une vieille dame qui vivait dans une petite maison. Sa maison avait une petite cour où elle aimait passer du temps. Chaque jour, quand le soleil se couchait, elle préparait son thé, balayait la cour et arrosait les plantes. Ensuite, elle mangeait son pain et son fromage avec son thé, éteignait la bouilloire et allait se coucher.

Un jour d’automne, il faisait très froid et il pleuvait beaucoup. La vieille dame avait fini son thé et voulait se coucher. Soudain, elle entendit frapper à sa porte : "Toc, toc, toc..." Elle ouvrit la porte et vit un petit moineau trempé par la pluie. Il lui demanda s'il pouvait entrer pour se mettre au sec. La vieille dame eut pitié de lui et le laissa entrer. Elle lui donna une serviette pour qu'il se sèche et trouve un endroit chaud où dormir. 

Juste avant de s'endormir, ils entendirent à nouveau frapper à la porte : "Toc, toc, toc..." 

C’était un chien trempé qui demandait à entrer. La vieille dame lui ouvrit la porte et le laissa entrer.Elle lui donna aussi une serviette pour qu’il se sèche et se couche près du feu. Puis un chat mouillé arriva, suivi d’une poule et enfin d’une grosse vache. La vieille dame laissa tous les animaux entrer et se mettre au chaud. Le lendemain matin, quand la vieille dame se réveilla, elle fut surprise de voir que les animaux avaient préparé le petit déjeuner et nettoyé la cour.

Elle les remercia tous pour leur gentillesse et leur aide, mais elle leur dit qu'il était temps pour eux de partir car sa maison était trop petite pour eux tous.

Le chien lui demanda : «Ma gentille grand-mère, moi, je japperai pour toi, je ferai fuir les voleurs pour toi, est-ce que tu veux vraiment que je parte?» La vieille dame accepta de le garder avec plaisir.

Le chat lui demanda : «Je miaulerai pour toi, je chasserai les souris pour toi, me laisseras-tu partir?» Elle dit: «Non, mon chéri, reste ici!»

Le moineau dit du haut de la fenêtre: «Je gazouillerai pour toi; je te ferai un petit œuf. Me laisseras-tu partir?» La vieille dame lui dit: «Tu es petit et tu n’as pas besoin de beaucoup d’espace. Reste chez moi!»

Ensuite, Madame la vache lui posa la question: «Je meuglerai pour toi et,en plus, je te donnerai du lait frais. Me laisseras-tu partir?» La vieille dame lui dit en riant: «Reste! Ne t’inquiète pas!» Madame la poule dit en marchant: «Je chanterai pour toi, je te ferai un grand œuf. Dois-je partir?» La vieille dame lui dit en chantant: «Reste, reste, toi aussi!» Et depuis ce jour, ils vécurent tous ensemble dans la petite maison, s'aidant les uns les autres et partageant leur amour et leur amitié.

On doit aider ceux qui ont besoin d’aide et qui sont dans des situations misérables. Cette générosité sera peut-être récompensée un jour. Un proverbe persan dit: “Verse ta gentillesse dans la rivière; Dieu te la rendra dans le désert.”

Illustration: Ssplajn - Source: Dreamstime.com
Le Petit Chaperon rouge par l'illustratrice Jessie Willcox Smith, 1911

Le petit Chaperon rouge

Charles Perrault, 1697

Le conte traditionnel du Petit Chaperon rouge remonte au Moyen Âge. Il est probablement d'origine française, mais il en existe d'autres versions en Europe et dans le reste du monde. Il s'agit d'une histoire qui se transmettait autrefois de bouche à oreille. À la fin du XVIIe siècle, cependant, l'auteur français Charles Perrault l'a mise par écrit. Bonne lecture!

Il était une fois une petite fille de village, la plus jolie qu'on eût su voir : sa mère en était folle, et sa grand-mère plus folle encore. Cette bonne femme lui fit faire un petit chaperon rouge qui lui seyait si bien, que partout on l'appelait le petit Chaperon rouge.

Un jour, sa mère ayant fait des galettes, lui dit : «Va voir comment se porte ta mère-grand : car on m'a dit qu'elle était malade; porte-lui une galette et ce petit pot de beurre.» Le petit Chaperon rouge partit aussitôt pour aller chez sa mère-grand, qui demeurait dans un autre village.

En passant dans un bois, elle rencontra compère le Loup qui eut bientôt envie de la manger ; mais il n'osa, à cause de quelques bûcherons qui étaient dans la forêt...

Bas relief du Petit Chaperon Rouge scupté au palais Jacques Coeur, à Bourges (France) au XVe siècle - Photo Denis MSI

Il lui demanda où elle allait. La pauvre enfant, qui ne savait pas qu'il était dangereux de s'arrêter à écouter le loup, lui dit : «Je vais voir ma mère-grand, et lui porter une galette, avec un pot de beurre que ma mère lui envoie.»

«Demeure-t-elle bien loin?» lui dit le loup.

«Oh ! Oui», lui dit le petit Chaperon rouge ; «c'est par-delà le petit moulin que vous voyez tout là-bas, là-bas à la première maison du village.»

«Eh bien !, dit le Loup, je veux l'aller voir aussi : je m'y en vais par ce chemin-ci, et toi par ce chemin-là, et nous verrons à qui plus tôt y sera.»

Le Loup se mit à courir de toute sa force par le chemin qui était le plus court ; et la petite fille s'en alla par le chemin le plus long, s'amusant à cueillir des noisettes, à courir après des papillons et à faire des bouquets de petites fleurs qu'elle rencontrait.

Le Loup ne fut pas longtemps à arriver à la maison de la mère-grand ; il heurta : toc, toc.

«Qui est là ?»

«C'est votre fille, le petit Chaperon rouge», dit le Loup en contrefaisant sa voix, «qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma mère vous envoie.»

La bonne mère-grand, qui était dans son lit, à cause qu'elle se trouvait un peu mal, lui cria : «Tire la chevillette, la bobinette cherra.»

Le Loup tira la chevillette, et la porte s'ouvrit. Il se jeta sur la bonne femme et la dévora en moins de rien, car il y avait plus de trois jours qu'il n'avait mangé. Ensuite il ferma la porte et s'alla coucher dans le lit de la mère-grand, en attendant le petit Chaperon rouge, qui, quelque temps après, vint heurter à la porte : toc, toc.

«Qui est là ?»

Le petit Chaperon rouge, qui entendit la grosse voix du Loup, eut peur d'abord, mais croyant que sa mère-grand était enrhumée, répondit : «C'est votre fille, le petit Chaperon rouge, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma mère vous envoie.»

Le Loup lui cria, en adoucissant un peu sa voix : «Tire la chevillette, la bobinette cherra.»

Le petit Chaperon rouge se déshabilla et alla se mettre dans le lit, où elle fut bien étonnée de voir comment se mère-grand était faite en son déshabillé. Elle lui dit : 

ー Ma mère-grand, que vous avez de grands bras !

ー C'est pour mieux t'embrasser, ma fille.

ー Ma mère-grand, que vous avez de grandes jambes !

ー C'est pour mieux courir, mon enfant !

ー Ma mère-grand, que vous avez de grandes oreilles !

ー C'est pour mieux écouter, mon enfant.

ー Ma mère-grand, que vous avez de grands yeux !

ー C'est pour mieux voir, mon enfant.

ー Ma mère-grand, que vous avez de grandes dents ! 

ー C'est pour mieux te manger.

Et en disant ces mots, le méchant Loup se jeta sur le petit Chaperon rouge et la mangea.


Moralité

On voit ici que de jeunes enfants,

Surtout de jeunes filles

Belles, bien faites, et gentilles,

Font très mal d'écouter toutes sortes de gens,

Et que ce n'est pas chose étrange,

S'il en est tant que le loup mange.

Je dis le loup, car tous les loups

Ne sont pas de la même sorte;

Il en est d'une humeur accorte,

Sans bruit, sans fiel et sans courroux,

Qui privés, complaisants et doux,

Suivent les jeunes demoiselles

Jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles ;

Mais, hélas ! qui ne sait que ces loups doucereux,

De tous les loups sont les plus dangereux.

Portrait de Charles Perrault par le peintre Charles Le Brun, vers 1670

Poèmes des quatre coins du monde

La Voix du 311, le 17 février 2024

Voici une sélection de poèmes venus d'Europe, d'Asie ou d'Amérique, écrits ou traduits par les étudiant(e)s du niveau 7. La beauté des rimes et des rythmes d'une langue est toujours difficile à rendre dans une autre langue, mais nous avons essayé de partager la richesse et la diversité de nos poésies par l'intermédiaire du français.

Rivière - Neige

François Cheng


Traduction d'un poème du poète chnois Liu Zongyuan (773-819) - Dynastie Tang

Sur mille montagnes, aucun vol d'oiseau. 

Sur dix mille sentiers, nulle trace d'homme.

Barque solitaire: sous son manteau de paille.

Un vieillard pêche, du fleuve figé, la neige.

L'amour est un feu

Marilene Guedes


Traduction libre d’un poème du poète portugais Luís Vaz de Camões (1525-1580)

L'amour est un feu qui brûle sans être vu;

C'est une blessure qui lance sans douleur ;

C’est un bonheur qui se réjouit de son malheur,

C'est une peine qui semble avoir disparu.


C’est de ne pas vouloir bien plus que de vouloir ;

C'est se promener seul parmi de nombreux gens ;

C'est ne jamais se contenter d'être content ;

C'est désirer se perdre avec un fol espoir.


C'est vouloir être piégé par la volonté ;

C'est servir celui qui gagne, le grand vainqueur ;

C’est se soumettre à ce qui tue, par loyauté.


Mais comment peut-il susciter tant de faveur

Dans les cœurs des humains, leur aveugle amitié,

Si cet amour enfin est contraire à lui-même? 

Chant d’exil

Raquel Rezende


Traduction libre de La Canção do Exílio , un poème romantique de l'écrivain brésilien Antônio Gonçalves Dias (1823-1864)

Ma terre a des palmiers

Où chante le Sabiá,

J’entends ici gazouiller

Mais pas le chant de là-bas.

 

Notre ciel a plus d’étoiles,

Nos plaines ont plus de fleurs,

Nos forêts ont plus de vie,

Nos vies ont bien plus d’amour.

 

Seul dans la nuit, j’ai niché 

Loin des plaisirs de là-bas;

Ma terre a des palmiers,

Où chante le Sabiá.

 

Ma terre a des biens exquis,

Qu’on ne trouve pas ici ;

Je pense seul dans la nuit

Aux doux plaisirs de là-bas;

Aux palmiers de mon pays,

Où chante le Sabiá.

 

Dieu me garde de mourir

Sans retrouver mon pays;

Sans jouir à nouveau là-bas

De ce qui me manque ici;

Sans revoir ces palmiers-là,

Où chante le Sabiá

Fatal

Gisella Sirker


Traduction libre du poème Lo Fatal (tiré du recueil Cantos de Vida y Esperanza) du poète nicaraguayen Ruben Dario (1867-1916)

Bien chanceux l’arbre qui est à peine sensible

Plus encore la roche qui ne sent plus rien

Car la douleur de vivre est bien la plus pénible

La conscience de vivre, le plus grand chagrin


Être et ne rien savoir, être sans but certain

La peur d’avoir été, d’un terrible séjour…

L’effroi sûr et certain d’être défunt demain    

Et souffrir pour la vie et pour l’ombre, et puis pour


Ce que l’on ne connaît et qu’à peine on soupçonne

Et puis la chair qui tente, fraîche et polissonne 

Et la tombe veillant aux funèbres couronnes


Ni ne savoir où nous allons

Ni ne savoir d'où nous venons!

Il pleut dans mon coeur

Gérald Beasley


Traduction libre de Raining in my Heart, chanson enregistrée originalement par le chanteur américain Buddy Holly (1936-1969) Paroles en anglais: Boudleaux Bryant et Felice Bryant, avec une référence à Paul Verlaine.

Le soleil brille, le ciel est bleu,

Pas un nuage devant mes yeux


Mais il pleure

Il pleut dans mon coeur


Ô Monsieur Météo prétend qu'il fait beau

Mais comment ignorer que tu m’as quitté?


Et qu’il pleure

Qu’il pleut dans mon cœur?


Oh! Quelle tristesse! Quelle tristesse!

Qui peut m'aider dans ma détresse?


Ô ma douleur, rends donc les armes!

Ne vois-tu pas monter mes larmes?


Car il pleure

Il pleut dans mon coeur 

Remercier avec tristesse

Daily Echevarria Prierez

Étudiante cubaine

Depuis mon arrivée,

Je remercie Québec. 

De mon beau pays sec,

J’ai été exilée.


J’aime l’hiver si froid

Et même congelée,

J’aime la neige, là

Je sens la liberté!


Depuis mon arrivée,

Au Québec je rend grâce

Songeant aux gens, hélas,

Que là-bas j’ai laissés.


Je remercie toujours

Mon Québec bien-aimé,

Mais Cuba, mon amour,

est mon île attristée

Ma jolie mignonne

Ahmad Hemadi

Étudiant libanais

C’est la personne la plus chère

Elle est l’amour au fond des coeurs


La miséricorde sur terre

Et la tendresse la meilleure


Elle a le calme de la mer

Et le courage d’une lionne


Elle est soleil, elle est lumière

La vie et l'âme qu’elle donne! 


Je veux dire simplement: Mère

C’est ton nom, ma jolie mignonne 

Maudits déterminants!

Oksana Rusinova

Étudiante ukrainienne

La langue française est très difficile 

C’est comme ça! Maintenant, c’est mon tour 

D’endurer. Mais ce serait plus facile 

Si j’étudiais - je l’avoue -  chaque jour 



Je ne sais pas où trouver cette force 

Pour bien évoluer et bien progresser 

J’oublie comment on prononce “une entorse”

Ensuite, je ne cesse de stresser 



Je déteste tellement mes erreurs 

Que je répète encore… Quelle horreur! 

L’utilisation des déterminants,

Pour moi, est comme un asservissement



J'apprends en soufflant les nouvelles règles 

Mais il y a beaucoup trop d’exceptions 

Je me sens confuse, fragile et grêle

Comment mémoriser les expressions? 



Et la conjugaison de tant de verbes 

C'est mon cauchemar, ma grande faiblesse 

Quant à l’utilisation des adverbes? 

Une torture de la pire espèce! 



Je souhaite vraiment que dans 5 années 

Ma conversation soit instantanée

Cela serait tout à fait idéal 

Pour mon bien-être et ma santé mentale

Sortie de secours

Anastasiia Goma

Ancienne étudiante ukrainienne

Malheureusement, on pense souvent à toi

Comme si tu étais une sortie d'urgence.

On t'ignore, on te fuit... Pour revenir vers toi? - 

Ridicules… Nous manquons toujours l'évidence.


Cependant, tu es une porte principale, 

Derrière laquelle se trouve l'espérance.

Croire en Toi - c'est une décision radicale - 

Cela prend bien du courage, de la patience.  


On se cache, on cherche fébrilement des preuves,

Aveuglés par nos émotions et nos attentes...

Nos pensées coulent si vite, comme un long fleuve 

Elles secouent, blessant nos âmes combattantes. 


Dommage, on perd un temps tellement précieux,

Dans la recherche du bonheur et de nous-mêmes...

Pardonnes-Tu  à Tes enfants capricieux? 

Malgré tout ce que nous sommes, Toi, Tu nous aimes!

Patrick Senécal, auteur à succès, parfois surnommé le "Stephen King québécois" - Photo: Lëa-Kim Châteauneuf

le chef-d’oeuvre
de Patrick Senécal

Masoomeh Ghadiri Javid, Ahmad Hemadi et Alireza Saatsaz, le 14 janvier 2024

Patrick Senécal est un auteur québécois très populaire, surtout connu pour ses romans d’horreur. Certaines de ses œuvres littéraires ont été adaptées au cinéma. Senécal, considéré comme le Stephen King québécois, a écrit un roman qui, selon nous, est intéressant et assez facile à lire. Il s’agit du Passager.

Le Passager est un roman d’horreur du genre thriller qui met en scène le personnage principal, Étienne Séguin, employé comme  enseignant au Cégep de Drummondville. Comme il habite à Montréal, il doit constamment faire des allers-retours entre ces deux villes. Un jour, en allant à Drummondville, il voit un passager sur le bord de la route et l’invite à bord pour le conduire à l’endroit où il désire aller. Ces deux personnages développent tout de suite une amitié étrangement intime et sincère. Plus le temps passe, plus Étienne passe du temps à Drummondville (qui est aussi sa ville natale); certains souvenirs noirs de sa jeunesse remontent à la surface... Étienne commence peu à peu à découvrir la sorte de personne qu’il était durant sa jeunesse et trouve ainsi le lien entre le passager et son passé lointain. 

La fin de ce roman est tout à fait imprévisible et des rebondissements de toutes formes ont lieu tout au long de la lecture. Senécal a réellement le talent de captiver le lecteur, de l’amener à douter, de le convaincre de quelque chose, et de le trahir à la toute fin. 

Ce roman est un roman relativement simple à comprendre, même pour les personnes qui ne sont pas francophones à la base. Même si le français n’est pas notre langue maternelle, nous avons quand même réussi à comprendre et apprécier l’histoire.

Couverture du roman Le Passager, de Patrick Senécal, publié en 1995, aux éditions Alire - Source: Renaud-Bray

SOIR D’HIVER

Émile Nelligan, 1898

Ah ! comme la neige a neigé !

Ma vitre est un jardin de givre.

Ah ! comme la neige a neigé !

Qu’est-ce que le spasme de vivre

À la douleur que j’ai, que j’ai.

Tous les étangs gisent gelés,

Mon âme est noire ! Où vis-je ? Où vais-je ?

Tous ses espoirs gisent gelés :

Je suis la nouvelle Norvège

D’où les blonds ciels s’en sont allés.


Pleurez, oiseaux de février,

Au sinistre frisson des choses,

Pleurez, oiseaux de février,

Pleurez mes pleurs, pleurez mes roses,

Aux branches du genévrier.


Ah ! comme la neige a neigé !

Ma vitre est un jardin de givre.

Ah ! comme la neige a neigé !

Qu’est-ce que le spasme de vivre

À tout l’ennui que j’ai, que j’ai !…

Le poème d'Émile Nelligan Soir d'hiver a été mis en musique par le compositeur Claude Léveillée, en 1965