On parle encore de haut en bas par les fenêtres
seulement
les décors ont changé
ce soir sur la rivière
qui ne reflète plus ni les bruits ni les étoiles
le monde a la forme des ronds de fumée
que tu lances comme des bouées de sauvetage
dans l'abat-jour du vestibule
tu as le vent dans la poitrine
un cadavre d'enfant dans l'angle du couloir
dans un coin de décembre une ampoule sans lumière
ou plutôt
les dernières miettes abandonnées sur la paume de la table
sont le contour de ton visage
et sur le papier peint l'odeur du siècle qu'on efface
tel un sourire
tu cherches à discerner les souvenirs qui passent
comme l'éventail d'une gifle jetée contre les vitres
pas une main tendue
pas même une corde ou un grappin
lancé de haut en bas à travers les étages
tu as les yeux couverts de neige
et de poussière
tu cherches le futur
comme à colin-maillard sur le toit d'un gratte-ciel
et tu as beau garder la tête renversée en arrière
il n'y a rien qui tombe
pas même le plus petit le plus terne des murs
alors
tu ouvres la fenêtre
le silence est complet