Maintenant il n'y a plus que l'éloignement sans fin du sable sous nos pieds
à peine entend-on encore
le bruit des doigts
qui raclent le papier
Encore quelques passants
sans furie ni sans arme
tirent nos regards
vers leurs faces abstraites
Ce ne sont pas celles qu'on voudrait voir
celles avec qui on avait cru partir
et qui sont restées
plus bas encore que nos sourires
On entend au-dehors
des voix qui frappent à la vitre
et des figures en fuite
des déserts
Quelle est cette ombre qui m'enserre
serait-ce celle-là qui coule
comme une lame émoussée
en-travers de la page
qui ne fait que passer
devant ces yeux
qui ne sont pas les nôtres
qui n'appartiennent à personne ?
Comment savoir
ce qui se passe
quelle est cette heure qui sonne
là-haut sous les étoiles dérisoires
La pluie
sur tes épaules
et les odeurs fanées
de nos maigres étreintes
l'incendie sur la ville
et l'ampoule presque éteinte
qui n'éclaire plus que nos chevilles
iront bientôt s'échouer
où s'en iront nos pas
plus bas
vers d'autres voies lactées
On attendra la montée des mers à nos genoux
et puis à nos poitrines
et puis à nos cheveux
La chambre avant l'orage
est noire
et ton visage
s'enfuit vers un nouveau cauchemar
S'il y avait une porte
autre que celles que l'on pousse
sur des chambres toujours vides
S'il y avait une lumière
autre que cette singerie de lumière qui tombe
de l'entrelacs de nos peaux mêlant leurs sueurs
et de nos yeux
mêlant leurs peurs !