Dax, Reghaïa, fin de séjour

Dax, Reghaïa et Fin de séjour

Fin octobre 1962, je reçus ma désignation pour le stage de pilote hélico qui devait débuter vers le 12 novembre. Petite permission avant de retrouver DAX. Ambiance très différente du stage avion. Officiers et sous-officiers mélangés dans les mêmes brigades. L'ambiance "valise" règne en maître : les moniteurs, dès notre arrivée nous conseillent de ne pas défaire nos valises car nombre d'entre nous ne resterons pas longtemps….

Météo exécrable, il neige et il fait froid : les pales des hélicos commencent à givrer après 30 minutes de vol. La fatigue "statique" accumulée par les séjours en AFN, le divorce, la mauvaise ambiance et la météo difficile font que je peine énormément et que je ne progresse pas au rythme imposé par le "moule". 8h45 de "double" pour novembre et 19h15 pour décembre. Le 18 décembre je suis "lâché" en stationnaire et le 27 en tour de piste. Devant mes résultats plus que médiocres, mon moniteur me demandera si je le fais exprès!…Bel exemple du sens pédagogique élevé qui l'anime; le bruit court que certains moniteurs n'hésitent pas à se débarrasser de l'élève le plus faible pour avoir moins de travail… Noël triste. Test dit des 25 heures le 29 avec le Capitaine LEGARREC surnommé "le masque en acier chromé". La sentence tombe : "à revoir en contre test"… .Jour de l'An maussade à FAY (météo, divorce, stage…) et retour à DAX pour l'épreuve de vérité le 5 janvier 1963 suivi de l'élimination du stage pour "manque de précision à l'atterrissage mettant en jeu la suite du stage". Le capitaine BRACONNIER qui commande le stage fait un débriefing avec moi pour déterminer les causes de cet échec et nous sommes d'accord sur la fatigue accumulée non récupérée et les effets négatifs du divorce. J'ai l'impression que mon échec ne le laisse pas indifférent et cela me sera confirmé lorsque je le retrouverais à HABSHEIM et qu'il me renverra en stage hélico.

En attendant mon rapatriement je dois retourner à mon peloton qui, entre temps, a quitté CHERAGAS pour rejoindre le terrain de la REGHAlA, à une vingtaine de kilomètres à l'est d'ALGER. Arrivé le 15 janvier 1963, j'y attendrais patiemment, sans voler, mon ordre de retour en métropole.

Je prendrais l'avion le 23 janvier 1963 à Alger pour rejoindre Lyon et de là MULHOUSE où est stationné le Groupe d'Aviation Légère de la 7ème Division (GALDIV 7) auquel je suis affecté. Je suis titulaire d'une permission de 69 jours valable du 24/1/63 au 2/4/63 inclus correspondant à mes droits à permissions annuelles cumulées, afférentes à mon séjour en AFN. Toutefois, pour raison impérieuse de service, je dois rejoindre ma nouvelle affectation le 25/1/63.

Je quitte l'Algérie avec un total général de 1402 heures de vol dont 1124 heures de vol de guerre n° 2 en 438 missions.

La "baraka" (ou la Providence), qui m'a protégé pendant tout le séjour depuis la mine de MAGOURA, a détourné, outre les balles de Thompson des harkis, les très nombreuses balles que les fells ne manquèrent pas d'envoyer vers mes appareils lorsque je les survolais à basse altitude (50 m…). Grâce à Elle, il n'y eut pas un seul impact dans les Piper ou les Djinn que j'ai utilisé. "Mektoub"…

Une page se tourne définitivement, très amère, que je n'ai pas encore pu effacer de ma mémoire, ravivée à chaque 19 mars par les célébrations de cette journée de honte.... Et par l'échec de la mission qui nous avait été donnée, non par suite d'une défaite militaire mais par des décisions politiques que nous avons subi à notre corps défendant.

J'ai longtemps hésité à basculer dans la clandestinité de l'OAS mais son extrémisme m'en a retenu et, comme au moment du putsch, je ne voyais pas d'issue à son action. Ma haine pour la "Grande Zohra" n'en a été que plus vive.

Nous avons été trahis par celui en qui nous avions mis notre confiance, malgré les avertissements de quelques uns. Celui qui, à Alger avait prononcé le fameux "Je vous ais compris !…" Celui qui à ZENATA nous avait dit "Vous pouvez vous engager en mon nom, jamais la France ne quittera ce pays" Celui qui a donné l'Algérie à nos ennemis, qui est responsable de l'abandon des harkis, celui à cause duquel 25 de mes camarades de promotion et milliers de soldats sont morts pour rien !

HONTE A JAMAIS SUR LUI et sur ses inconditionnels, ceux qui tel DEBRE ont défendu l'Algérie Française (Le courrier de la colère) et se sont ensuite ralliés à ses vues.

J'ai souvent repensé à ces mots prononcés par le Commandant Elie DENOIX de SAINT MARC devant le haut tribunal militaire en juin 61 :

... On peut demander beaucoup à un soldat, en particulier de mourir, c'est son métier. On ne peut lui demander de tricher, de se dédire, de se contredire, de mentir, de se renier, de se parjurer...

De quel côté était l'HONNEUR ?....

Geryville cérémonie